« Déconstruire les préjugés » avec Migrant'scène

Ouverture du festival

Salle Olivier-Messiaen

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Voilà plusieurs mois que la question des migrants agite l'Europe – et, plus largement, le monde. À travers son festival Migrant'scène, la Cimade, association qui aide les étrangers en difficulté sur le territoire français, propose de réfléchir sur ce sujet via une approche artistique. Rencontre avec Daniel Delpeuch, coordinateur des équipes du festival, pour en savoir plus. Propos recueillis par Charline Corubolo

Quels sont les objectifs du festival Migrant'scène qu’organise la Cimade au niveau national ?

Daniel Delpeuch : Grâce à l'art, on veut apporter un regard différent sur les étrangers, montrer qu'ils sont comme nous, que ce sont des personnes et non des chiffres statistiques. L'art est un bon moyen de le faire, il permet de déconstruire un peu les préjugés, d’ouvrir le débat.

Qu'est-ce que l’on verra à Grenoble pendant deux semaines ?

Il y a beaucoup de choses cette année, on est un peu montés en puissance avec du théâtre, du cinéma, de la photographie… Le thème est « les réfugiés », autrement dit les demandeurs d'asile. Des gens qui ont des choses à nous dire, notamment sur les raisons pour lesquelles il quitte famille, maison et pays. Ils y sont contraints à cause de la guerre, de l'absence de perspective, de craintes concernant l'éducation de leurs enfants… On leur donne donc la parole tout au long du festival à travers deux choses : un atelier de slam de la Cimade ouvert depuis 4 ans, dans lequel les réfugiés écrivent des textes, et un atelier de lecture de l'association de parrainage républicain l'Apardap qui a permis l'écriture du livre Avant l'exil, j'étais quelqu'un qu'ils liront pour l'ouverture du festival.

Et il y aura aussi des spectacles…

Oui, deux pièces de théâtre et un one-man-show. En ouverture, juste après les deux ateliers, se jouera la pièce Rivesaltes de Vincent Bady qui traite du camp de détention du même nom en activité de 1939 à 2007, où ont été placés des Juifs déportés, des généraux allemand prisonniers, des Tsiganes, des harkis, pour devenir un centre de rétention administrative en 1983. 70 ans d'histoire de non accueil de la France envers des étrangers qu'elle jugeait indésirables. La seconde pièce s'appelle Rue des voleurs (photo) par la compagnie grenobloise La Fabrique des petites utopies. Elle raconte l'exil d'un jeune marocain aujourd'hui. Et il y aura Pie Tshibanda, réfugié congolais en Belgique, avec son spectacle Un fou noir au pays des blancs à la fois tendre, émouvant et hilarant. C'est la seule soirée payante du festival [Daniel Delpeuch continue ensuite à nous dérouler le programme : un documentaire, une exposition, un café-débat… – NDLR].

Vous défendez un art militant. Les différentes propositions ont-elles été choisies uniquement pour leur propos politique ou, également, pour leurs qualités artistiques ?

Elles ont été choisies en raison de l'intérêt artistique, avec la volonté de montrer des belles choses mais, en même temps, sur des sujets qui nous intéressent. On sélectionne des proposions qui permettent de réfléchir et de se faire une opinion sur l'image des réfugiés, pourquoi ils viennent chez nous, qu'est-ce que l'exil…

À qui s'adresse le festival ?

À tout le monde, mais s'il devait y avoir une cible, ça serait les jeunes. La jeunesse est l'avenir, elle n'est pas encore formatée comme nous. Moi je ne suis plus un jeune (rire). Mais de manière générale, on s'adresse aux gens qui ne comprennent pas et qui veulent comprendre, qui ne connaissent pas et qui ont envie de connaître, qui sentent les peurs et qui veulent trouver des réponses pour savoir où ils en sont et s'il y a lieu d'avoir peur. Le tout en luttant contre le sentiment xénophobe qui se répand parce que ce n'est pas en rejetant l'autre que l'on va améliorer les conditions de notre société.

Le festival Migrant'scène est organisé par la Cimade. Quel est son rôle ?

La Cimade, Comité inter-mouvements auprès des évacués, est une vieille association créée en 1939 et en fonctionnement depuis 1940. Elle s'occupait à l'époque des évacués, des gens qui habitaient entre la ligne Maginot et la frontière allemande, principalement des Alsaciens et des Lorrains déplacés de l'autre côté du Massif central. Les mouvements de jeunesse de la Cimade proposaient un accompagnement, ce qui ne se faisait pas à l'époque. Après, elle est intervenue dans les camps où étaient enfermés des militants républicains espagnols, des Juifs éloignés de l'Autriche et de l'Allemagne, des étrangers arrêtés en France. L'association s'est donnée pour mission de faire sortir des camps ceux qui n'avaient rien à y faire. Lorsque la ligne de démarcation a été franchie par les Allemands, la Cimade est rentrée en résistance et les réfugiés des Alpes ont été évacués vers la Suisse. Ça c'est l'origine de la Cimade. Après la guerre, elle a continué ses activités. Le gouvernement lui a demandé de faire la même chose mais cette fois avec des prisonniers allemands et des collaborateurs. Elle a accepté. Ensuite, il y a eu les prisons, où elle intervient toujours et à partir de 1983, les centres de rétention administrative. Il s'agit d'aider des étrangers en difficultés en s'occupant de la partie sociale de l'accueil : comment faire des recours, prévenir les familles... Et à côté de cette vocation, elle développe des actions à l'étranger et des manifestations de sensibilisation comme le festival Migrant'scène, qui a de plus en plus d'impact.

Migrant’scène, du mardi 17 au dimanche 29 novembre dans divers lieux. Programme chaque semaine dans le journal ou sur www.festivalmigrantscene.org

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