Grosses pelloches

Cinéma / Un tour du monde des 4 mois à venir avec trois grandes stations : le cinéma français, le cinéma de genre et le cinéma d’auteur. Christophe Chabert & François Cau

Premier constat de cette rentrée : le repli des blockbusters américains. Mais après un été pareil, véritable torpillage des écrans mondiaux par les grosses prods hollywoodiennes, le M40 ricain est logiquement à sec. Oh, il y a bien un Disney de Noël (Il était une fois…), une nouvelle trilogie héroïc-fantasy (À la croisée des mondes), un dessin animé Dreamworks avec des abeilles (Bee Movie) et, très attendu, le nouveau film photoréaliste du grand Zemeckis, Beowulf. Mais tout cela se concentre sur la fin d’année, fêtes obligent. Avant, les distributeurs semblent se résoudre à offrir au public des films plus adultes. C’est simpliste comme le fonctionnement du cerveau d’un costard-cravate, mais bon, on n’est plus à une stupidité près !Touche pas à ma France !Cette désertion entraîne mécaniquement le cinéma français à surinvestir l’espace de la rentrée : entre 4 et 8 films par semaine jusqu’à Noël ; il va y avoir des morts, sinon des fausses couches. Les tendances ? Ben, toujours les mêmes… De la comédie populaire : le remake de L’Auberge rouge par Krawczik avec Jugnot dans le rôle tenu par Fernandel, L’Invité de Laurent Bouhnik, dont le casting prometteur — Auteuil, Lemercier, Lhermitte — est assombri par le fait que le film traîne dans les tiroirs d’Europacorp depuis plusieurs mois… Du thriller, avec des projets plutôt portnawak sur le papier : Si j’étais toi, de Vincent Perez avec David Duchovny ou l’adaptation du jeu vidéo Hitman par Xavier Gens, dont le premier film, Frontières, attendu par tous les geeks de France, est aussi dans les cartons d’Europacorp ! Des acteurs qui réalisent : Jalil Lespert pour 24 mesures, Jacques Nolot pour Avant que j’oublie et Bernard Campan, acteur-réalisateur de La Face cachée. Bizarrement, c’est du côté du blockbuster de genre que les propositions méritent le plus d’attention : notamment Chrysalis de Julien Leclercq, polar futuriste dont l’esthétique chiadée et le charisme de son acteur principal (Dupontel) laissent espérer le meilleur. Et puis le retour de Florent-Emilio Siri avec son ambitieux projet sur la guerre d’Algérie, L’Ennemi intime. Sinon, pêle-mêle, le cinéma d’auteurTM verra défiler les noms de Noémie Lvovsky, Nicolas Philibert, Damien Odoul ou, joie ! Pascal Thomas. Pour finir ce panorama hexagonal, trois gros films à prendre avec des pincettes : 99F de Jan Kounen d’après le nanar littéraire de Beigbeder, Sa majesté Minor, comédie mythologique de Jean-Jacques Annaud avec le curieux duo Vincent Cassel-José Garcia, et le remake (impossible, disent les puristes) du Deuxième souffle de Melville par Alain Corneau. Ouf !Mauvais genresComme prévu, les fans de cinéma fantastico-horrifique devront se contenter de plats réchauffés ascendant junk food avariée. L’un des principaux responsables de ce marasme (la saga Saw) en arrive à son quatrième épisode et ce alors que son croquemitaine 1/ était en phase terminale 2/ finissait avec la gorge tranchée dans le précédent opus… Même cas de figure pour Resident Evil Extinction, franchise filmique imbécile qui repêche ici le has been Russell Mulcahy. Pour ne pas déprimer totalement, on attend tout de même patiemment 30 days of night, adaptation du génial comics du même nom par le roublard David Slade (Hard Candy), tout en se préparant à pleurer de chaudes larmes devant l’arlésienne I am Legend, dont les premières images laissent présager un complet contresens du matériau de base. C’est définitivement du côté des (vrais) cinéastes qui auscultent les œuvres des seventies qu’il faudra se pencher pour garder espoir : Douglas Buck avec son remake du Sœurs de Sang de Brian De Palma, Rob Zombie et sa nouvelle vision du mythe Halloween, ou enfin Juan Carlos Fresnadillo, qui parvient à nous livrer une suite aussi efficace et choquante que son modèle avec 28 semaines plus tard. Rayon comédie énorme, autre genre ingrat bien dévoyé ces derniers temps, nous aurons la joie de découvrir aux côtés de la valeur sûre Will Ferrell (dans Les Rois du Patins, sympa mais sans plus) les challengers que sont Supergrave et En cloque, mode d’emploi, ou enfin l’outsider Greg Araki, qui après le magnifique Mysterious Skin nous livre une comédie potache (Smiley face) avec Anna Farris en glandeuse psychotrope.Grandes signatures mondialesL’automne 2006, exceptionnel, avait vu une impressionnante série de grands cinéastes signer de grands films. C’est moins le cas en 2007, mais ce dernier trimestre voit aussi apparaître une génération d’auteurs qui devraient confirmer les espoirs mis en eux. Niveau valeurs sûres, Woody Allen avec Cassandra’s dream (dans la lignée de son magnifique Match Point) et David Cronenberg avec Les Promesses de l’ombre (à nouveau avec Viggo Mortensen) tiennent la corde. Juste derrière, en rescapés cannois, Wong Kar-Wai (My blueberry nights), Gus Van Sant (Paranoïd Park) et James Gray (La Nuit nous appartient) devraient faire notre bonheur cinéphile. Si American Gangster relève plutôt de l’entertainment pur et dur, on peut compter sur le solide Ridley Scott pour lui donner une envergure personnelle ; et Sidney Lumet, vétéran en plein retour de gloire, pourrait créer la surprise avec son nouveau polar, 7h58 ce samedi-là. En Europe, l’excellent Fatih Akin confirmera avec De l’autre côté tout le bien qu’on pense de lui depuis Head on. Du côté des cinéastes asiatiques enfin, les réfractaires engoncés dans leurs préjugés pourront se conforter avec Soie du taïwanais Chao-Bin Su (énième ghost-story avec enfant mort plaintif), ou avec des œuvres contemplatives destinées aux jurys de festivals internationaux (Souffle de Kim Ki-duk et La Forêt de Mogari de Naomi Kawase). Il faudra néanmoins compter sur les personnalités artistiques d’auteurs renouvelant leur filmographie respective. Citons à cet égard le grand Park Chan-wook (Old Boy, Lady Vengeance), qui nous offre avec Je suis un cyborg une splendide pause récréative dans son exploration des bassesses humaines ; Lee Chang-dong (Oasis, Peppermint Candy), de retour sur grand écran avec le mélo Secret Sunshine ; ou enfin l’intrigant film marabout de ficelle Triangle, avec rien moins que Tsui Hark, Johnnie To et Ringo Lam à la réalisation.

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