La colline a des yeux

Dans le désert, ça tue, ça charcle, ça bouffe son prochain : les tueurs dégénérés reviennent en pleine forme dans un remake rutilant. Nikita Malliarakis

La tendance actuelle de Hollywood à revisiter les succès historiques du cinéma de genre donne lieu à du déchet, mais aussi à d’heureuses surprises. Après le remake de Massacre à la tronçonneuse, c’est au tour de La Colline a des yeux de Wes Craven d’être énergiquement relifté avec la bénédiction de son auteur original. Cauchemar d’une famille ordinaire traquée dans le désert par un groupe de dégénérés, le film de Craven avait fait forte impression en 1977, jusqu’à faire figure de classique et donner lieu à une suite peu inspirée. La Colline a des yeux a hélas subi l’outrage du temps, ses imperfections techniques dues à un budget limité paraissant désuètes aux yeux de certains. Pour redonner un peu de lustre à son œuvre, Craven a fait appel à un jeunot bien de chez nous : Alexandre Aja, réalisateur du couillu Haute tension, dont l’amour pour les psychopathes campagnards ne saurait être mis en doute. Le choix est judicieux : pour être le fils du redoutable Alexandre Arcady, Aja n’en est pas moins metteur en scène plus que prometteur. Dynamique et joyeusement sanglant sans tomber dans la parodie, sa version de La Colline a des yeux fait plus que rendre hommage à l’original, dont il reprend fidèlement le concept tout en le musclant. La hache, c’est mauvais pour la santé
La version 77 avait pour héros une famille américaine (le père flic à la retraite, la mère, la fille et son mari baba-cool accompagnés de leur bébé) : Aja reprend point par point sa composition, en y ajoutant deux enfants. La même logique est suivie pour les antagonistes : la tribu de cannibales voit sa composition respectée, avec plusieurs membres supplémentaires. Cet élargissement du cercle des protagonistes permet à Alexandre Aja de gagner en nervosité et en suspense. Tout en rendant possible un plus grand nombre de scènes d’action, l’augmentation du nombre de protagonistes donne au film un aspect choral accentuant d’autant l’horreur des situations. Une autre initiative bienvenue vient donner à la tribu de tarés une épaisseur supplémentaire : de simples rednecks sadiques, les dégénérés deviennent des mutants victimes d’expérimentations nucléaires. Cet ajout donne une nouvelle dimension au récit tout en permettant, dans une logique purement horrifique, de renforcer la monstruosité des personnages. Tantôt écrasé de soleil, tantôt plongé dans une frissonnante terreur nocturne, La Colline a des yeux reprend point par point les ambiances horrifiques du premier film en les magnifiant par la grâce d’un budget important et de progrès techniques considérables. Le film, sauvage et brutal, y gagne en violence brute, compensant largement la perte de l’aspect rugueux du film de Wes Craven. Animé par un authentique respect pour le genre, ce nouvel avatar de la saga des cannibales du désert atteint son but, en confirmant chez Aja un talent de cinéaste de genre aussi sincère que pur et dur.LA COLLINE A DES YEUX
D’Alexandre Aja
(EU, 1h43) avec Aaron Stanford, Emilie de Ravin…

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