Starship Troopers

En adaptant le tendancieux Etoiles, garde-à-vous ! de Robert A. Heinlein, Paul Verhoeven livrait une œuvre au cynisme ravageur. FC

Le roman original n’accepte aucune équivoque dans son interprétation. Robert A. Heinlein a nourri le récit de cette guerre entre les humains et des insectes extraterrestres de son propre passé militaire. Il y décrit une société futuriste, où l’on n’acquière le droit de vote qu’après avoir fait son service dans l’infanterie mobile, et dont les fondements bellicistes sont en permanence légitimés par le professeur “d’histoire et de philosophie morale“ Dubois (qui s’avèrera être un lieutenant-colonel de réserve…). Quand on propose à Paul Verhoeven d’adapter le livre à l’écran, il a tout d’abord la même réaction que lorsqu’on lui a proposé le script de Robocop : le rejet catégorique d’un scénario effroyablement bas du front, dont le propos va totalement à l’encontre de sa vision des choses (rappelons que dans sa prime jeunesse hollandaise, le réalisateur fut le témoin quotidien des exactions nazies). Puis il accepte le projet, à condition d’y apporter sa touche. Le film deviendra alors l’un des hold-ups artistiques parmi les plus fameux dans l’histoire hollywoodienne…«Come on troopers, wanna live forever ?!»
Starship Troopers est doté d’un budget extrêmement conséquent, où la part belle est accordée à des effets spéciaux totalement révolutionnaires pour l’époque. La mise en scène de Verhoeven se charge de sublimer les splendides séquences de vols spatiaux, et pousse jusqu’à l’excès la représentation graphique de la violence lors des scènes de combat. Il s’agit en fait d’un leurre, visant à détourner l’attention du réel propos du film : en épousant aveuglément le point de vue de ses héros imbéciles (le regard caméra d’un reporter dans le feu de l’action en dit long à ce sujet), improbable casting de Ken et de Barbie venus pour la plupart de la télévision, le réalisateur fait la démonstration de leur implacable stupidité guerrière. Exit les longues conversations entre Dubois et ses étudiants, ces derniers passent leur temps à s’échanger des messages d’amour, et s’engageront dans le conflit pour les beaux yeux de leur voisin de tablée. La dénonciation se fait en filigrane, puis de façon de plus en plus décomplexée, jusqu’à ce qu’un des héros arrive vêtu d’un uniforme rappelant ceux de la Gestapo. Plus de dix ans après sa réalisation, Starship Troopers est un film dont la clairvoyance politique sidère. On conseille l’écoute du rageur commentaire audio du cinéaste, qui explicite tous ses choix artistiques tout en pestant contre l’incompréhension que rencontre encore le film…

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