L'apocalypse joyeuse

Faute de sortie en salles, c’est en DVD et Blu-Ray qu’il faudra découvrir le film essentiel de Richard Kelly "Southland tales", récit de fin du monde dont le futur est devenu antérieur, mais dont l’esthétique est toujours aussi contemporaine. Christophe Chabert

Southland tales commence par un home movie : des enfants qui courent avec une DV au poing dans un goûter d’anniversaire. Et puis boum ! Un champignon atomique s’élève à l’horizon, l’onde de choc va tout dévaster, mais ce sont toujours ces images domestiques qui enregistrent l’événement. Scène suivante : l’écran se sépare en une multitude de petites fenêtres où défilent images d’actualité, dessins tirés d’une bande dessinée et docus animaliers, grand zapping d’une télé imaginaire qui nous raconterait en voix-off comment l’Amérique est entrée en guerre avec l’axe du mal et a promulgué un patriot act si radical qu’il empêche les citoyens de franchir les frontières entre ses états. C’est désormais au seul Texas que se joue l’élection présidentielle et ce sont, bien entendu, les Républicains qui l’emportent. Enfin, dernière news urgente, on apprend la disparition de l’acteur Boxer Santoros, soutien officiel du parti… La fiction de Southland tales a commencé depuis cinq minutes, et sa boulimie romanesque et visuelle est lancée. Qui l’aime (passionnément) la suive (jusqu’à la folie).

Le film terminal de la culture geek

Car plutôt que de calmer le jeu, Richard Kelly appuie encore sur l’accélérateur, multipliant les personnages (une starlette du porno, un flic débile, un marchand d’arme défoncé, un vétéran de l’Irak parano), les enjeux (le contrôle d’une énergie entièrement naturelle et infinie, substitue d’un pétrole dont les vannes ont été coupées), et les complots. Southland tales, dans cette euphorie narrative, fait entrer toutes les images, et régurgite sur un air de fin du monde joyeuse l’Histoire américaine post-11 septembre. Dans cette mécanique démente, mais aussi dans l’incompréhension qu’il a suscité, le film est à la culture geek ce que La Porte du paradis était au western : un renversement radical déguisé en célébration définitive. Car Kelly politise à l’extrême son propos et pointe la technologie comme l’arme ultime de la société de contrôle. L’organique et le charnel sont dès lors un horizon libératoire : les corps venus de la culture pop (Sarah Michelle Gellar, The Rock, Christophe Lambert et Justin Timberlake) sont là pour résister par leur souplesse à ce monde qui vitrifie tout et clone des images sans référents réels. Grand roman cinématographique, plein de trous, de clefs et de digressions, Southland tales est une œuvre monde et une œuvre monstre. Un film inouï, inépuisable et inoubliable !

Southland tales
De Richard Kelly (ÉU, 2h25) avec The Rock, Sarah Michelle Gellar…
En DVD et Blu-Ray chez Wild Side le 25 mars

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