Gérardmer jour 3 : à la croisée des genres

Alors que les habitués du festival pestent contre la perte de vitesse de l’événement, tant en termes d’ambiance que de pertinence dans les choix de programmation, les films du jour ont tout de même dispensé leur lot d’émotions fortes. FC

Rien de tel pour entamer cette dernière journée marathon qu’un programme de courts-métrages, mises en bouche inégales pour les copieux plats de résistance à venir. Parmi les six films présentés, un seul tire vraiment son épingle du lot : Toute ma vie de Pierre Ferrière. D’une grande qualité en termes de réalisation, de dialogues et d’interprétation (Vincent Desagnat y est convaincant, c’est dire), l’œuvre aura définitivement emporté l’adhésion du public avec sa chute irrésistiblement brutale. On retourne ensuite à la compétition officielle avec Die Tür d’Anno Saul (photo). Un réalisateur venu de la comédie sociale, qui se frotte pour la première fois au cinéma de genre - avec succès. Il nous décrit, sur un ton pince-sans-rire tout bonnement imparable, l’enchaînement de conséquences fâcheuses d’un paradoxe temporel, dans lequel le toujours impeccable Mads Mikkelsen se débat avec panache. Le principe rappelle le très bon Los Cronoscrimenes dans son utilisation de l’argument fantastique, et offre une galerie de personnages finement brossée. Les hostilités se poursuivent avec deux films hors compétition impatiemment attendus. Dans un premier temps, Splice de Vincenzo Natali, film qui marque la plus grande réussite artistique de son auteur. Cinéaste aussi inventif que maniériste, il tendait jusqu’à présent à épuiser la saveur de ses concepts par la précision par trop méthodique de sa mise en scène. Relecture pour le moins radicale du mythe de Frankenstein, Splice lie de façon étonnamment subtile le calvaire de son couple de héros à leur intimité. Marasme relationnel, angoisse de la maternité, dérives parentales, Natali greffe à sa trame de base des enjeux inattendus, et n’hésite pas à aller loin dans le malaise. Ceux qui s’étaient fâchés avec le Georges Romero abscons de Diary of the Dead auront l’occasion de se réconcilier avec le barbichu grâce à sa sixième exploration en territoire zombie, Survival of the dead. Sis sur une île du Delaware où s’affrontent deux clans en plein déchaînement de morts-vivants, le film mêle gore, western et comédie en un tout ludique, où le réalisateur s’affranchit enfin des impératifs discursifs qui plombaient ses deux précédents opus. Romero a enfin percuté qu’il avait fait le tour de la question, et s’amuse comme le gosse qu’il n’est plus. Survival of the dead est un grand n’importe quoi, un divertissement parfois trop conscient de son inutilité, mais qui se regarde avec un certain plaisir. Coupable, il va sans dire. Enfin, on clôt cette journée de projections par du nanar serbe rutilant. Zone of the dead de Milan Konjevic et Milan Todorovic a beau assumer son côté série B, le résultat, peu aidé par une post-synchro des plus virevoltantes, n’est néanmoins pas à la hauteur des espérances. Souffrant de gros problèmes de rythme, le film pâtit surtout de son caractère ultra-référencé, qui tend très rapidement à lui ôter toute forme d’identité propre. Une petite note mitigée pour terminer cette journée bien remplie. On se retrouve demain pour le palmarès.

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