Le Chat potté

Dans la série, rarement grandiose, des productions animées Dreamworks, Le Chat potté est plutôt une bonne surprise. À condition toutefois d’oublier les faiblesses criantes des scénarios de ces produits «familiaux». Christophe Chabert

Soyons clairs : les trente premières minutes du Chat potté sont foutrement plaisantes. Débarrassées de l’attirail fantastico-trivial et passablement laid des derniers Shrek, les aventures de ce chat latino fougueux s’épanouissent dans un contexte d’espagnolade intemporelle au décorum soigné et au pittoresque assumé. Le personnage lui-même est bien trouvé : mi-bandit errant, mi-séducteur exubérant, mais avant tout très mimi, il attire une sympathie difficilement répressible. Le film enchaîne ainsi à une vitesse grisante les péripéties, les gags et les inventions visuelles, jusqu’à une battle-dance qui vaut remake chaste de la mythique scène de strip combat à l’épée dans Le Masque de Zorro. On se dit que la présence en tant que producteur exécutif du grand Guillermo Del Toro (il l’était déjà sur Kung-fu Panda 2) n’est peut-être pas pour rien dans ce regain de vitalité inattendue des productions animées Dreamworks.

Le scénario empoté

Comme si ces efforts pour monter la barre d’un cran avaient épuisé tout le staff, la suite est moins glorieuse. À commencer par le bricolage scénaristique qui tient lieu d’histoire : un salmigondis de conte et de feuilleton populaire brassant n’importe comment Le Comte de Monte Cristo, La Poule aux œufs d’or (devenue une oie), Jack et le haricot magique et Humpty Dumpty… Cela donne par moments de beaux élans esthétiques, comme la virée dans les nuages et le château des géants. Le reste du temps, c’est un concentré des structures les plus éculées apprises dans les manuels pour scénaristes. Les séquences multiplient les conflits artificiels qui ne font jamais progresser l’action, provoquant juste de très mécaniques renversements de caractérisation (l’œuf ami prépare sa vengeance, la chatte libre se soumet peu à peu à son gros matou). On retrouve par ailleurs l’impuissance flagrante d’Hollywood quand il s’agit de créer un méchant vraiment méchant. Ici, il n’y a qu’une multiplication de dangers temporaires et finalement anodins, les personnages montrant toujours en bout de course un visage sympathique. Schématique aussi, le banal récit de rédemption qui se développe au dernier acte et qui pousse à dire que si Shrek avait pu, un temps, laisser croire que Dreamworks faisait du mauvais esprit, ce n’était qu’un malentendu. Chez eux aussi, ce sont les bons sentiments qui font la loi.

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