Barry Lyndon, l'Histoire d'un arriviste

Barry Lyndon
De Stanley Kubrick (1975, GB, 3h07) avec Ryan O'Neal, Marisa Berenson...

Le statut de Stanley Kubrick dans l’histoire du cinéma est définitivement unique. Ses films font désormais figure de classiques que les salles programment régulièrement, comme on montrerait des tableaux de maître dans un musée des beaux-arts. Il est vrai qu’il n’y a rien de tel qu’un Kubrick pour se laver le regard d’un cinéma contemporain prompt aux académismes de tout ordre, et admirer la manière dont le cinéaste sait à chaque fois déjouer les pièges de ses matériaux.

Barry Lyndon (1975) en est un excellent exemple : la reconstitution historique du XVIIIe siècle européen et de ses guerres permet à Kubrick de mobiliser d’impressionnants moyens (des centaines de figurants costumés) et d’appuyer sur son réalisme (ces fameuses scènes d’intérieur uniquement éclairées à la bougie, donnant à l’image une texture inimitable) mais sa mise en scène n’adopte jamais les canons filmiques attendus : il zoome et dézoome dans les plans, passant du proche au lointain selon ce procédé d’ordinaire vulgaire, mais qui produit ici un effet de modernité spectaculaire. Il en est de même pour l’histoire racontée : comment Redmond Barry, Irlandais d’extraction modeste, ambitionne de s’élever dans l’échelle sociale pour intégrer la haute société aristocratique anglaise, confiant dans son culot et dans sa volonté.

Pour Kubrick, comme il l’avait déjà montré dans Orange mécanique, l’aristocrate ne se définit pas par son titre, mais par son tempérament et sa capacité à fixer ses propres valeurs. Barry reste dans son être un homme du peuple et, une fois parvenu à ses fins, il ne fait que singer les mœurs aristocratiques, ce qui entraînera sa chute. L’ironie du récit est tout entière contenue dans une voix off géniale, qui derrière son emphase littéraire n’est que sarcasmes et moqueries envers le héros. La voix du cinéaste, qui n’a pas oublié de se représenter dans le tableau.

Christophe Chabert

Barry Lyndon
De Stanley Kubrick (1975, ÉU, 3h07) avec Ryan O’Neal, Marisa Berenson…
Jeudi 18 décembre à 19h30, au Club

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