Gentils que nous sommes, l’envie nous prend de vous conseiller une petite balade du côté du quartier Saint-Laurent : entrer dans quelques galeries de choix, niant les travaux qui se déchaînent dans la rue, provoque un émerveillement ma foi bien agréable. Chez Alter-Art, l’exposition de Christine Coblentz enchante l’œil par la luminosité duveteuse de ses peintures. On adore ses « idées de nuage » – ouate dorée et bleus incertains – dont le flou généreux n’est pas sans rappeler les Nymphéas de Monet, dans une version purement abstraite, dénuée de toute recherche formelle construite sur le trait, embrassant avec bonheur le plaisir pur du geste commun à la matière et à la couleur. Ses photographies, « la bataille du dessin », étonnent par la délicatesse des milliers de petits points éparpillés sur fond blanc – promesse du dessin – qui ne sont en fait que des résidus d’une pierre noire utilisée par l’artiste pour dessiner tout autre chose. Un cocon délicat qui tranche avec l’ambiance de la galerie L’Etranger, où les peintures de Christian Favory vont plutôt chercher du côté d’un dédale kafkaïen vertigineux : entrelacs métalliques et barreaux grisâtres cachent des bouts de ciel lumineux, espoir bleuté mais lointain. Symétrie et anarchie, angles pointus et agressifs évoquent un monde de vitres et d’aluminium, un vaste champ industriel tissant inlassablement sa toile : cauchemar moderne par excellence.
Laetitia GiryEtats de chose (suite)
Jusqu’au 5 juin, à Alter-Art
St Ex 0.1
Jusqu’au 21 mai, à la galerie L’Etranger
