Docteur en rapologie

Biographie / S’il est une figure incontournable du hip hop français, Oxmo Puccino s’en est affranchi pour construire sa propre vision, puissante, lucide et littéraire. Retour sur un parcours où quelques menues concessions n’entachent guère une intégrité exemplaire. françois cau

C’est en 1995, à l’âge de 21 ans, que Abdoulaye Diarra devient Oxmo Puccino au sein de l’hiphopée Time Bomb. Il se fait tout d’abord remarquer par le titre Pucc Fiction, co-signé avec Booba (qui à l’époque était encore rappeur – et plutôt bon, en plus) sur l’une des mixtapes du label, il enchaîne les featurings formateurs (notons sa participation au projet Sad Hill), avant de sauter le pas en 1998. Alors que les “ténors“ du hip hop français amorcent lentement leur sinistre stagnation et leur lugubre autocaricature, la sortie d’Opéra Puccino remet les pendules à l’heure. Un timbre rauque distille des textes matures, osant les digressions bien vues et des jeux de mots inspirés, sur des compos servant habilement un fond généralement désabusé (notamment sur les superbes L’enfant seul et Qui peut le nier!), étonnant d’acuité. Black DesperadoIl faudra trois ans pour que le second album arrive dans les bacs, mais l’attente est récompensée par un disque encore plus maîtrisé. Exit les featurings patelins et hors sujet de K-Reen ou Pit Bacardi, L’amour est mort est une introspection exigeante dans des arcanes encore jamais explorées par les rappeurs hexagonaux – ce qui explique peut-être son insuccès dommageable et injuste. Oxmo Puccino nous a offert une pépite de 22 titres, gorgée de morceaux magnifiques (À ton enterrement, L’amour est mort, Ghettos du monde), où même les titres plus légers emportent plus que l’adhésion (le roublard Tango des Belles Dames). L’artiste enfonce tous les clichés en vigueur pour nous livrer - sans didactisme lourdingue - son acception de ce que devrait être le hip hop : un moyen d’expression sans fards, sans enrobage surfait, où l’adéquation entre musique et lyrics est pensée en parfaite cohérence. Mais comme nous sommes dans un monde qui ne reconnaît pas le talent à sa juste valeur, le succès public de cet album majeur est loin d’être à la hauteur des attentes. Le Cactus de Sibérie (2004) sera à ce titre un léger retour en arrière, avec des mélodies plus aguicheuses, débutant sur les chapeaux de roue avec le triplé gagnant des excellents Le Cactus de Sibérie, Black Desperado et On danse pas. La poésie est plus diffuse, les featurings (K-Reen et Kool Shen) sont dispensables, mais le ton unique du sieur Puccino est toujours là, insubmersible, entier.

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