Ambiance centre

Dans le monde hype, cruel mais cosy des bars du centre-ville, nos deux envoyés spéciaux en sont arrivés à la conclusion implacable qu’entre Jean-Marc du Vertigo et Christophe de l’Estancot, il y a six degrés de séparation. Le détail de ce cheminement ci-dessous. Ben Dussy & François Cau

Jean-Marc, Le Vertigo18 Grand Ruewww.vertigo-club.comC’est à la Villa Bayard que notre virée nocturne commence. Rendez-vous avec Jean-Marc, Dj et Directeur Artistique du Vertigo, qui nous présente son neveu dans l’arrière-salle à la lumière tamisée. «Il mixe ici, à la Villa, mais c’est pas moi qui l’ai placé !» s’exclame-t-il en rigolant. La musique qu’il passe au Vertigo est très éclectique, même si on peut y retrouver une forte influence électronique. Quant aux artistes qui y seront prochainement programmés par ses soins, on peut citer Starsailor, l’ancien bassiste de Madonna qui s’est récemment lancé en solo. «Au Vertigo, nous recevons des Djs de qualité, le but est de remplir le club, mais sans pour autant virer Hip Hop et R’n’B, il n’est pas question de remplir pour remplir. Hier soir, on m'a demandé du Michel Sardou en échange d'une bouteille de Champagne, j'ai refusé». Un avis sur le public grenoblois ? «Quand tu as travaillé à Grenoble, tu peux limite bosser partout, c’est un public très difficile à cerner. Il nous est arrivé de programmer des choses qui aurait blindé n’importe quel club partout en France, mais qui n’ont fait bouger personne à Grenoble, malgré une comm' solide et un gros buzz national autour». Nous remercions notre compagnon de début de soirée, et lui demandons qui nous pourrions aller voir de sa part. Il hésite, penche un moment pour une serveuse du Tamara arborant un t-shirt Mark XIII pendant ses services, mais opte au dernier moment pour Yannick, boss du magasin Interface et membre du duo Human Body. Nous échappons sournoisement aux premières envolées house de la Villa.Yannick, Interface Records1 place de Bérullebigelow.free.frChangement d'ambiance assez brutal. Ben croyait échapper à la musique électronique, et le voilà plongé en pleine apocalypse drum'n'bass au Mark XIII. Yannick nous repère rapidement (en même temps avec ma béquille c'était pas super dur non plus). Nous grimpons à l'étage nous lover dans les fauteuils, tandis que le son martèle les tympans de mon infortuné comparse. Depuis 1997, Yannick et son compère Stéphane Deschezeaux dispensent leurs bons offices électro sous le patronyme d'Human Body. En attendant leur prochain single sur le label Goodlife, le duo se retrouve à l'honneur sur la compilation Elektrowave (sortie le 21 mars chez Discordian), hommage aux sonorités électro new wave des bonnes vieilles années 80. Pour fêter ça, ils seront à l'affiche de la prochaine soirée Electro/Choc au George V, le 15 avril. Quand on l'interroge sur le public grenoblois, Yannick s'avère plus optimiste que son prédécesseur. On ira même jusqu'à dire qu'il a assuré le quota "y a de l'espoir" de notre périple. «Pour les soirées autour de l'électro, les noctambules grenoblois sont un bon public, assez hétéroclite mais qui se retrouve autour de la musique plus qu'autour de l'évènement». Yannick nous conseille le dernier album de Trisomie 21 et nous enjoint à aller voir Philippe, barman et véritable figure de proue des bars du centre.Philippe, Le Styx6 place Claveyson04 76 44 09 99Toujours aussi enjoué, Philippe se prête volontiers au jeu, bien qu'il n'ait strictement aucune idée de qui bien être ce Yannick qui nous a aiguillé vers lui. Visage familier du triangle infernal Place du Trib' / Place Claveyson / Place Notre-Dame, Philippe a servi au Cyber Café, au Broadway, à la Table Ronde, et même au Styx du temps où il portait le nom de Café du Nord. Quand on lui demande d'où vient sa vocation, aucune hésitation. «C'est quand j'ai vu Cocktail avec Tom Cruise, je me suis dit que je voulais la même vie que lui, et je l'ai à peu près eu (...) non, par contre, je n'écoute pas les Beach Boys». Mais depuis le film de Roger Donaldson, 17 années se sont écoulées. Tandis que le shaker de Tom s'agite à l'infini sur les VHS usagées, Philippe ne peut s'empêcher de tomber le masque pour donner dans la sincérité. «Dix ans en arrière, il y avait une connivence entre les bars, maintenant il y a trop de différences entre les présentations de produits, l'air de rien ça crée des niveaux. Depuis le passage à l'euro, tout a pris 30%, les gens sortent moins, font plus attention, ont tendance à se réfréner. Si tu sors toute la semaine, ton budget s'en ressent». Le pire étant que le discours n'apparaît pas si amer mais bien tangible. Et où sort-il, du coup, ce pilier de la vie nocturne grenobloise ? «A Lyon. Lorsque j'ai du temps libre, il ne se passe jamais rien ici, si je veux faire la fête je bouge ailleurs». Ce qui ne l'empêche de nous diriger vers un bar quasi mitoyen, La Renaissance.Jean-Michel, La Renaissance1 rue du Palais04 76 44 53 52Après les courtes introductions, maîtrisées à la perfection par vos serviteurs à ce stade du parcours, Jean-Michel s'attable avec nuit autour d'une bonne vieille bière. Sa voix trahit rapidement ses origines marseillaises, l'accent a laissé place à un ton chantant assez addictif. «Je suis arrivé là il y a 10 ans, le monde de la nuit était forcément tout autre. La soirée commençait à l'apéro, il y avait beaucoup de délires entre voisins, on se rejoignait, on faisait les fermetures, on allait au Triplex, qui était à l'époque l'un des premiers endroits où il y avait de la techno et de la house. Maintenant, je ferme à 1h, et il faut que je sois de retour ici à 11h ; les responsabilités sont différentes». Au bout de dix années d'exercice, notre homme ne regrette pas sa cité phocéenne pour autant, ses attaches grenobloises semblent solides. «Dans chaque ville il y a un état d'esprit, comparer deux villes seraient une erreur. Les grenoblois sont sympathiques, ouverts et attachants. Je sais que je finirai par retourner à Marseille, mais de toute façon je ne pourrai pas m'empêcher de revenir ici. Il suffit d'aller dans des endroits où tu te retrouves, de mettre de côté l'aspect superficiel du milieu de la nuit». Sur ces dernières paroles, Jean-Michel nous laisse finir nos bières et nous incite à aller rendre visite à Cyril du ND Café. Cyril, ND Café3 rue Frédéric Taulier04 76 51 79 87Nous rencontrons donc Cyril, 34 ans, gérant du ND Café, dans son bar où une poignée d’étudiants assis au fond se dandinent sur Gettin’ Jiggy With it de Will Smith tandis qu’une clientèle plus agée discute ensirotant quelques drinks au comptoir. Cyril était responsable de secteur en téléphonie mobile avant de s’initier au monde nocturne en travaillant pendant trois ans à l’Alpe D’Huez. «Ça fait un an que j’ai repris ce bar avec un collègue mais je suis à Grenoble depuis tout petit. Je trouve personnellement que la nuit grenobloise est devenue très triste depuis quelques années». Il s’éloigne un instant. «Excusez-moi, le jeudi, c’est moi qui m’occupe de la musique. Ouais, je disais, c’est devenu triste, il faut dire que le pouvoir d’achat a baissé, les gens n’ont plus la possibilité de sortir quatre fois par semaine, il se restreignent généralement à un soir maintenant...». Selon Cyril, la clientèle du ND Café est assez variée, même si on voit plus d’étudiants les mercredis et jeudis et plus de grenoblois les vendredis et samedis. «Mais bon, ici, on fait souvent des soirées à thèmes, c’est ce que j’aime, organiser des soirées où les gens se font plaisir... Ce soir par exemple, c’est autrichien, nous explique Cyril pendant que les Bee-Gees miaulent en fond sonore, on nous a demandé de la musique internationale ! En général, on aime bien passer des medleys. De Goldman ou Earth, Wind And Fire...». Des souvenirs négatifs ? «Non, ma hantise, ce serait une bagarre générale dans le bar, mais ça n’est jamais arrivé». Nous remercions Cyril qui nous propose d’aller rendre une petite visite à Christophe de L’Estancot... Christophe, l’estancot3 rue de la Paix04 76 00 08 40La déambulation nous mène donc finalement à l’Estancot où Christophe nous accueille. Sur ses 38 ans, il en a passé près de 13 derrière un comptoir. Après quelques boulots ponctuels, il a bossé cinq ans au Favori, un bar grenoblois aujourd’hui décédé, puis, en septembre 97, c’est presque par hasard qu’il se retrouve à l’Estancot. «Un ami à moi tenait le bar avec sa femme, ils se sont séparés et il fallait quelqu’un pour reprendre». L’on pourrait lui demander si la lassitude ne se fait pas sentir avec le temps... «Quand tu es dans le milieu de la nuit, c’est difficile de partir faire autre chose, si tu as la possibilité d’ouvrir ta propre affaire, c’est mieux. Et puis moi, j’ai une famille, des enfants, je ne sors plus vraiment très souvent». La déco de l’Estancot fait partie des plus originales dans les lieux nocturnes grenoblois, les caisses de Dockers, le sable au sol... L’espace est confortable, bien que vite rempli. «Je me souviens avec beaucoup d’émotions de la coupe du monde 98, étant fan de foot, ça reste mon meilleur souvenir, on était 150...». Ce qui, avec 77 m2, fait plus de deux personnes au m2. «Mais ma clientèle est très tranquille, baba cool dans le bon sens du terme, il n’y a pratiquement jamais d’embrouille ici....». Des regrets sur l’évolution de la nuit grenobloise ces dernières années? «Oui, peut-être le fait que l’apéro se perde un peu, avant, on le prenait vers 19H puis on allait manger chez soi et on resortait vers 23H, je ne saurais pas expliquer à quoi c’est du mais maintenant, les gens sortent de plus en plus tard.... D’ailleurs excusez-moi mais il est l’heure, je dois fermer...».

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