Un doigt de provocation

Tête d’affiche de la pétulante Mark XIII Birthday Party, le joliment nommé Fukkk offf n’aura d’autre choix que d’électriser le dancefloor de ses beats assassins. François Cau

En se rencardant un peu sur le bonhomme, on voit que Bastian Heerhorst, l’homme derrière ce patronyme si peu délicat, vient d’Hambourg. Et là, on fait illico la jonction avec les deux plus fameux représentants électro de la cité, Boys Noize et Digitalism, le cœur plein d’espoir, jusqu’à ce qu’on jette l’oreille aux productions de Fukkk offf : une sorte de dance bâtarde, que son créateur définit comme de la hard électro, qui vous agresse de ses lignes de basse et de ses beats insistants, le tout porté par des lyrics répétitives, qui vous font du rentre-dedans avec une absence de finesse déconcertante. Le tout évoquerait presque un Benny Benassi shooté aux stéroïdes, le fruit des tergiversations artistiques d’un artiste en phase terminale de création qui voudrait vous forcer à danser, quitte à vous braquer un flingue virtuel sur la tempe. Et ça marche. Jurant mais un peu tard que l’on ne s’y laisserait plus prendre, on se retrouve à hocher de la tête de toutes ses forces et à se défoncer le talon sur le sol en une cadence martiale, jetant de temps à autre des regards discrets par-dessus son épaule pour vérifier que personne ne nous voit. Disco caprice
Bastian Heerhorst ourdit ses premières armes de DJ dans les clubs underground du quartier rouge d’Hambourg, se taille une réputation de stakhanoviste du dancefloor, avant de se faire rattraper par une grosse crise artistique au moment de passer véritablement à l’acte. Devant son ordi, sur le point de composer ses premières tracks, il se retrouve tétanisé par les nouveaux diktats en vigueur dans les musiques électroniques, qu’il a pu tester dans le cadre de ses précédents remixes, le tout au détriment du son qui le fait vibrer. A deux doigts de tout laisser tomber, lui vient alors l’illumination qui lui donnera son charmant pseudonyme : fuck off, on s’en fout, on fonce dans le tas de la sonorité dancefloor, après moi le déluge. Les deux premiers singles (I’m a freak et Rave is king) signent sa profession de foi, louvoient entre des boucles addictives, des basses omniprésentes, des voix féminines répétant indéfiniment les mêmes messages pas vraiment subliminaux, porteuses d’un hédonisme club qui n’aura que rarement été assumé à ce point. L’ex wonderboy du quartier rouge donne dans le racolage passif, mais le fait avec un talent certain, tutoyant la vulgarité accrocheuse pour mieux la retourner de fond en comble. Et quand bien même, son but avéré est de faire danser, de remuer les corps tout en épanchant sa soif d’efficacité. Repéré par le label new yorkais Coco Machete (tout un programme), il planche dès lors sur son premier album. L’amour et la violence
Love me, hate me, kiss me, kill me a débarqué dans les bacs mondiaux en juin dernier, avec le single éponyme comme figure de proue - un rouleau compresseur électroclash voué à tout défourailler dans les clubs, où l’on imagine déjà les concours parmi les danseurs pour déterminer qui fera le playback le plus lascif. Le disque dispense son lot impressionnant de pistes foutrement entraînantes, de voix féminines à la sensualité pour le moins agressive. Fukkk offf cède plus que jamais au joug écrasant de l’efficacité dancefloor, quitte à se mettre à dos les puristes que de toute façon il conchie. C’est dire à quel point notre homme a monstrueusement intérêt à assurer derrière les platines ce samedi soir, d’autant que le public des soirées diligentées par les sbires du Mark XIII n’a pas vraiment l’habitude de se faire caresser à rebrousse-poil. Mais à l’écoute des réinterprétations live des morceaux emblématiques du sieur Fukkk offf, on peut gager que le bonhomme oeuvrera de toutes ses forces pour nous livrer un set mémorable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite, en tout cas. Mark XIII Birthday Party
Samedi 26 septembre, de 18h à 1h au Mark XIII, de 0h30 à 5h à l’Ampérage

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