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Élégance italienne
Par François Cau
Publié Lundi 14 décembre 2009 - 3880 lectures
Photo : Stefania Talini
Pionnier de la musique électronique européenne successivement associé aux scènes avant-garde, italo-disco, new wave, électro et on en passe, Maurizio Dami alias Alexander Robotnick sera de passage ce samedi au Bar MC2, dans le cadre du Mois Italien. On a sauté sur l’occasion pour lui poser quelques questions. Propos recueillis par Damien Grimbert
Maurizio Dami : Avida était un groupe à mi-chemin du théâtre et de la musique. Nos paroles et nos performances étaient très ironiques, et liées avec un courant musical underground de l’époque, la "musica demenziale". Un album d’Avida incluant des morceaux inédits vient d’ailleurs d’être édité récemment par Creme Organization.À quoi ressemblait la scène club italienne des années 80 ?
J’ai eu la chance de vivre à Florence à cette époque. Au début des années 80, ma ville était presque la seule en Italie à prêter immédiatement attention à toutes les nouveautés en provenance d’Angleterre et des Etats-Unis. Musique, théâtre, art, design, Florence était vraiment à la pointe. J’ai rejoint un large groupe de gens qui se projetaient vraiment dans le futur, peu importe que tout le monde les ait oubliés depuis. Je pense que c’est lié au statut très provincial de Florence. Parfois, dans de telles conditions, des miracles se produisent. Mais paradoxalement, l’italo-disco était déjà un peu ringard à l’époque, un truc des 70’s. Plus jeune, j’étais fan de disco, particulièrement de choses funky comme Scic! Ou Moroder, mais dans les années 80, j’étais plus branché Joy Division. Il faut dire aussi, pour être honnête, qu’à l’époque, je ne suivais pas l’italo de très près, juste les trucs les plus commerciaux, qui étaient vraiment mauvais. Des morceaux comme Space Woman, de Charlie, je les ai découverts il y a quelques années seulement.Comment est né votre fameux morceau Problèmes d’amour ?
Giampiero, le boss de Materiali Sonori, m’incitait à faire de la disco, parce qu’on était fauchés. “On peut faire de la thune facile avec de la disco” il me disait, “mets juste un kit basse/batterie en 4x4 et tu vends 10 000 copies !”. Donc j’ai fait ça avec mon matos un peu cheap, et on a vendu 10 000 copies, ce qui m’a un peu déçu à l’époque, je m’attendais à plus. Mais quelques années plus tard, j’ai realisé que ce morceau avait eu une grosse influence sur la musique électronique, et que c’était devenu un morceau culte pour certains DJs. Au final, c’est mieux comme ça, c’est cool d’avoir fait un morceau qui intéresse encore les gens aujourd’hui.A la fin des années 80, vous vous impliquez de plus en plus dans la scène world music ?
Les musiques ethniques m’ont toujours intéressé, dès les années 70, j’ai commencé à collectionner des cassettes de musiques arabes et africaines, j’étais fan de groupes comme Osibisa, King Sunnia De, Fela Kuti… Quand j’ai commencé à produire de la musique électronique au début des années 80, j’ai essayé d’y intégrer mes connaissances en musiques ethniques. Mais j’ai atteint mes meilleurs résultats dans les années 90. Travailler avec des musiciens africains, indiens et kurdes est une expérience inoubliable. Je me suis éclaté avec Masala et The Third Planet. On expérimentait une sorte de "nouvelle vague" de la world music. Et j’étais vraiment enchanté de jouer live avec eux ! Mais peut-être que c’était trop tôt. Au bout d’un moment, on a été submergés par la music « chill out » à base de samples « exotiques » et ça a été la fin. Donc en résumé, j’adore toujours les musiques ethniques, mais de nos jours, je ne crois plus trop au mix de cultures, contrairement à cette époque où j’étais à fond.Vous êtes finalement revenu à la musique électronique en 2002 ?
Au début des années 2000, j’étais complètement fauché… Pas d’argent, pas de boulot : la world music n’était plus à la mode. Quelqu’un m’a envoyé un e-mail me demandant si j’étais toujours DJ, ce que je n’avais en réalité jamais fait jusqu’alors. J’ai sauté sur l’occasion, répondu que je mixais encore, mais avec un ordinateur portable, puis j’ai foncé m’acheter le portable en question. J’ai eu tellement de hauts et de bas dans ma vie… Mais ce n’est pas vraiment un come-back, la scène electro actuelle est tellement différente de celle des années 80… C’est plus quelque chose de nouveau. Parfois, la musique actuelle peut sonner comme à l’époque, mais l’état d’esprit et le mode de vie de la nouvelle generation sont radicalement différents de ceux des acteurs et du public de la musique électro du début des années 80.Quels sont vos projets en cours ?
Je travaille sur mon dernier album. Complètement fait avec du matériel analogique, fini les logiciels. Mon studio actuel me rappelle celui que j’avais dans les années 80, en un peu moins dépouillé, évidemment. Je m’éclate vraiment. En janvier, le label britannique This is Music va sortir un projet basé sur l’improvisation analogique, The Analog Session sur lequel j’ai impliqué Ludus Pinsky, un très bon ami, et un génie de l’électronique. Enfin, je m’implique de plus en plus dans les vidéos fait maison, c’est ma nouvelle passion.Alexander Robotnick
samedi 19 décembre au Bar MC2, dans le cadre du mois italien
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