Une autre vision de l'électro

DJ/producteur globe-trotter, pionnier de la scène électronique française, Frédéric Galliano se passionne depuis bientôt 5 ans pour les rythmiques électroniques sans concessions du kuduro angolais. Avec son spectacle live Kuduro Sound System, il sera l’une des têtes d’affiche de cette nouvelle édition du festival Electrochoc. Propos recueillis par Damien Grimbert

Petit Bulletin : Comment définiriez-vous le kuduro ?
Frédéric Galliano : C'est la première musique électronique 100% africaine. Elle a été créée en 1996 en Angola, par Tony Amado. La base, c’est un « kick » de house, accéléré à 136 BPM, avec des éléments rythmiques liés aux percussions traditionnelles du carnaval angolais et un chant particulier, propre au kuduro. Depuis, ça a évolué, les beats, les chants, les flows… ont encore accéléré, mais la base reste la même. Et surtout, une forme de danse unique, ultra-spectaculaire, est née avec cette musique...C’est un style musical hyper énergique, à l’impact immédiat, et qui ne respecte aucune des conventions habituellement en cours. Il y a vraiment un côté « tout est permis », non ?
Oui, il y a un côté assez fou. Maintenant, les règles sont plus établies, le kuduro file sur des rails plus « normalisés », mais pour moi, ça reste quand même bien plus innovant que ce que l'on a fait en Europe ces 10 dernières années.
La situation a évolué depuis deux ans. Le kuduro est devenu plus fréquentable. Des groupes hardcore comme Os Lambas sont signés sur LS Production en Angola, des titres passent à la radio nationale, il y a une émission de télé.... C'est rentré dans les moeurs même si cela reste une musique de ghetto dans sa fabrication. Les gens fréquentables n'ont plus honte de dire qu'ils écoutent du kuduro…Comment se « vit » le kuduro sur place ?
Le kuduro se diffuse principalement via les candongeiro, les bus collectifs populaires. C'est là que se crée le buzz sur un titre ou un groupe. Ensuite, il y a les petites discothèques de quartier, mais le set kuduro n'excède jamais un quart d'heure. Les concerts se résument souvent hélas à du play-back. Trouver des chanteurs capables d'aligner 45 minutes de chant impeccables est plus que difficile, c'est avant tout une musique de studio. La seule exception, le seul vrai professionnel du kuduro, c’est Dog Murras, que j'avais d'ailleurs invité pour un concert au Bataclan. C’est pour ça qu’en 2006, avec Kuduro Sound System, j'ai vraiment développé le premier show de kuduro 100% live…Justement, quelle forme prend le Kuduro Sound System sur scène ?
C'est un live non-stop de 45 minutes, travaillé en direct sur ordinateur, avec des chanteurs et danseurs live. Ça demande une énergie énorme et c'est brut de décoffrage, pour rendre compte non seulement de ce qu'est le kuduro mais aussi de la vie à la capitale, Luanda, sans doute la ville la plus folle et difficile au monde. Et je fais aussi un DJ-set avant le spectacle.Les occasions de voir ce show sont rares…
Trouver des gens suffisamment ouverts pour programmer mon spectacle est assez difficile. Il y a beaucoup de mépris et d'ignorance de la part des programmateurs concernant ces nouvelles formes de musiques électroniques. Tu ne vois jamais de DJs de Rio, d’Angola, d'Afrique du sud, du Mozambique, d'Inde dans les festivals électro... Ensuite on me dit souvent que mon spectacle est trop « dur » mais c’est juste proche de la réalité angolaise ! Les gens aimeraient bien écouter un truc qui passe comme de la lambada, très joli, gentil, un peu sucré... Je laisse ça à d’autres, je sais ce que je dois défendre. Vous avez déjà sorti deux albums de Kuduro Sound System, l’un en 2006 et l’autre en 2009. D’autres projets dans ce sens ?
Je prépare actuellement d'autres morceaux, et je vais sortir au mois de juin un DJ-mix de kuduro/coupé-décalé/logobi sur Wagram, avec pleins d'inédits persos et de nombreux morceaux d'autres artistes.Vous intéressez-vous également à la baile funk de Rio, aux sons émergents sud-africains ?
Je suis allé de nombreuses fois à Rio depuis 2006. J'ai enregistré plusieurs morceaux avec des artistes des favelas. J’ai fait des mixtures de baile funk et de house, ça me semble intéressant. J'ai co-produit le groupe As Danadinhas, dont j'espère pouvoir sortir l'album. Et en ce moment, je travaille en Afrique du Sud avec DJ Mbuso et DJ Fisherman. J'ai co-réalisé deux titres de son prochain album. Je vais sans doute également travailler pour Big Nuz, un des plus gros groupes de kwaito. En Namibie, j'ai aussi rencontré des artistes avec des possibilités de production. Je m'intéresse pas mal à l'Inde... Bref, le monde est vaste et sans limites !Le mot de la fin ?
En plus de 10 ans de voyages en Afrique, et dans les pays du Sud, j'ai vu beaucoup de choses évoluer grâce au développement d'internet, aux ordinateurs pas chers. Et pour moi, c’est évident, le futur de la musique électronique se trouve dans l'hémisphère Sud.Soirée électro / Afrique avec Frédéric Galliano & Kuduro Sound System et Banko
Dimanche 4 avril au Fil (St-Etienne), dans le cadre du festival Electrochoc

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