Glandeur et descendance

Le Théâtre Antique de Vienne va trembler ce mercredi avec le concert de The Offspring, groupe emblématique du punk rock passé à la moulinette des années 90. François Cau

Octobre 1994. Quelques mois après que Kurt Cobain se soit tiré une balle dans la tête, la planète rock, encore hagarde, veut croire de toutes ses forces au renouveau du punk américain avec les sorties consécutives de Dookie de Green Day, Let’s go de Rancid et Punk in Drublic de NOFX, et reçoit donc le troisième album des californiens de The Offspring, Smash, avec bienveillance. Le chanteur, Dexter Holland, se cache sous des dreads à la Zack de la Rocha (chanteur de Rage Against The Machine), balance des lyrics semi désenchantées d’une voix aiguë qui se fait crécelle dès qu’elle pousse un peu trop (c’est-à-dire souvent), avec un goût prononcé pour les onomatopées récurrentes, qui d’un « la-la-lalala-lala », qui d’un « ah-ah, ah-ah » ou d’un « wo-ho » - une pétulante marque de fabrique encore d’actualité aujourd’hui. Les membres du groupe apparaissent dans leurs premiers clips en performers dark dans des caves, histoire qu’on sente bien leur teen spirit ; moins propres que les jeunots de Green Day, plus présentables que Rancid et NOFX, une sorte de compromis à même d’effaroucher les parents sans trop les inquiéter non plus. Dérisions
Les guitares sont proéminentes, les riffs bourrins, les singles (Come out and play, Self esteem, Gotta get away) construits autour de refrains dévastateurs et doucettement anxiogènes. La génération MTV, certaine d’avoir trouvé son nouveau héraut en révolte passive, fait un triomphe à l’album. Ce ne sera pas forcément le cas du suivant, Ixnay on the Hombre, élaboré selon les mêmes principes. La recette de The Offspring, du punk rock indé Canada Dry et donc accessible au plus grand nombre, trahit dans cet album un manque de saveur que les simagrées vocales d’Holland surlignent encore un peu plus. En 1998, Americana marque un tournant décisif dans la musique du groupe, qui se drape dans des atours plus pop, punchy et déconnant pour reconquérir le public, comme en témoignent les singles Pretty fly (for a white guy), Why don’t you get a job et The Kids aren’t alright. The Offspring n’essaie même plus de dissimuler son côté branleur, il l’assume ouvertement et ça lui réussit plutôt bien sur ce coup-là. Les clips de ces morceaux, totalement synchrones avec le petit virage fun et désinvolte, enfoncent encore un peu plus le clou dans le décalage soft. Doutes
Les années 2000, par contre, verront le groupe s’engoncer dans de fâcheuses redites, au point que de ce côté de l’Atlantique, Offspring devient au fil des ans un souvenir de plus en plus lointain. Pourtant, la formation a sorti quatre albums (et un Greatest hits, ce qui n’est jamais bon signe) depuis Americana, et tourne régulièrement en Europe. Quand on voit leur live aux Eurockéennes en 2008, la nostalgie en prend un coup sévère : Dexter Holland arbore une coupe de gendre idéal à la Justin Bieber, ses sbires ressemblent tous à des quadras usés, le set survit majoritairement autour des titres de Smash et Americana, aveu flagrant quant au reste de leur discographie, réduites à quelques singles épars. Les retours de leurs concerts récents rassurent cependant un peu, et laissent espérer que leur performance viennoise dépassera le stade de la simple réminiscence poussant à dire que finalement, les années 90 n’ont rien à envier aux années 80 en termes de résistance relative au passage du temps. Autre atout de taille : après la première partie assurée par les minets de Simple Plan, “progéniture“ (traduction française de “offspring“) autoproclamée de la formation, la crédibilité et la légitimité rock ne devraient pas trop être ardues à défendre. The Offspring + Simple Plan
Mercredi 7 septembre, au Théâtre Antique de Vienne

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