Mercredi 9 février 2022 Froissé, plié, enroulé, déchiré, cartonné… Le papier se décline sous toutes ses formes dans Peau de papier, un spectacle jeune public (dès 5 ans) imaginé par le Colectivo Terrón.
« Inventer mon propre son »
Par Stéphane Duchêne
Publié Mardi 11 mars 2014 - 10193 lectures
Photo : Lionel Baboulin
Peau
La Bobine
ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement
Depuis ce Vercors où elle vit « accrochée à la montagne », Perrine Faillet aka Peau poursuit, avec "Archipel", sa mue de musicienne et d’artiste visuelle, se plaisant à explorer toutes les voies possibles en quête de la vérité qui gît sous la Peau. Rencontre et critique de ce deuxième album avant son concert à la Bobine.
D'où vient le nom Peau ?
Perrine Faillet : Quand j'ai décidé de me lancer dans un projet solo, j’avais envie de faire davantage appel à l'imaginaire qu'à la réalité de qui je suis en tant que Perrine. Et puis c’est un mot qui a plusieurs facettes : intimiste, sensible, féminine, sensuelle, mais aussi organique. Cette dualité m'intéresse parce que j'ai envie de faire une musique à la fois agréable et abordable tout en cherchant des formes un peu plus surprenantes et dérangeantes.
La peau, c'est à la fois ce qui nous met en contact avec l'extérieur et ce qui nous en protège...
Oui, j'aime cette idée de l’interface entre notre monde intérieur et le monde extérieur. Ce rapport à l'enveloppe de notre propre identité me parle beaucoup.
Au départ, vous vous destiniez au cinéma. Comment-êtes vous passée à la musique ?
En réalité, j'ai toujours été intéressée par l'art en général plus que par un domaine en particulier. J'avais démarré des études en arts du spectacle à Bron [près de Lyon – NDLR], plus par intérêt pour le spectacle vivant et le théâtre. Mon intérêt pour le cinéma en tant qu’art global a grandi petit à petit. J'ai alors eu envie de creuser cette voie et de me former de manière plus poussée au cinéma d'animation dont les formes expérimentales m’intéressaient beaucoup. Et puis en parallèle de mes études, un projet m'a été proposé, qui était à la fois musical et théâtral. J'avais une petite pratique de la musique, régulière depuis longtemps mais sans formation poussée. Au départ, c'était une aventure assez anecdotique, mais entre l'écriture et la composition, j'y ai consacré de plus en plus de temps. Pour vivre pleinement les choses, j’ai dû faire un choix et ce fut la musique. Même si j'ai toujours gardé en parallèle une activité vidéo sous diverses formes, que j’ai d’ailleurs rapidement rattachée à la musique notamment via mes clips.
De ce point de vue, la musique est aussi une pratique qui permet d'englober plusieurs formes d'art...
C'est difficile aujourd'hui de faire de la musique sans avoir une image forte. Je vivrais difficilement le fait que mon image puisse m'échapper. Je suis donc assez contente d'avoir des idées arrêtées là-dessus et d'être capable avec mes petits moyens de les faire exister, que ce soit en vidéo, via la photo, le graphisme pour les disques... L'idée du clip de l'Instant T, avec les cassettes vidéo, je l'avais en tête depuis des années et j'étais contente de pouvoir la mener à bien grâce à Peau. Parce que j'ai eu le temps de le faire, qu'on m'en a aussi donné les moyens. La musique n'englobe pas tout mais c'est déjà un bon terrain de jeu sur lequel il y a plein de possibilités. Je ne m'ennuie pas.
On vous compare souvent à Björk, Camille ou Émilie Simon mais qu’est-ce qui vous inspire réellement musicalement ?
J'aime bien les formes surprenantes qui parviennent à rompre un peu avec le ronron de la production musicale actuelle. Quand je parle d’Archipel, j’évoque souvent James Blake, que j'ai beaucoup écouté. C'est quelqu'un qui, avec un abord très romantique et une voix un peu facile, propose un univers musical complètement barré. J’aime les artistes qui creusent un chemin pour les autres. Je suis aussi beaucoup touchée par les voix, donc quand les deux se cumulent, c'est l'idéal. Plus généralement, j’ai beaucoup écouté de musique électronique, un univers que je ne connaissais pas trop et j'y ai trouvé beaucoup de choses très intéressantes en termes de sonorité. N'étant pas instrumentiste, traiter ces matières-là, les couper, les monter, les manipuler via l'outil informatique, c'est assez cohérent avec ma manière de travailler qui est assez indépendante – même si, pour ce deuxième disque, j'ai beaucoup travaillé avec Daniel Bartoletti, un musicien grenoblois dont j'aime beaucoup le travail. Une fois que j'ai défini mes envies, on est allés ensemble dans ce sens-là.
En dépit de la direction plus électro prise sur Archipel, votre musique, avec la manière dont elle est produite, conserve une dimension très organique. Est-ce une identité musicale à laquelle vous teniez ?
Même s'il m'importe de faire quelque chose de vivant et que je suis attachée à la dimension organique, au fait qu'il y ait de la chair, je n'avais pas ça réellement en tête pendant la création du disque. Je ne sais donc pas trop comment définir ce côté organique – mais s'il est là, tant mieux. Je pense que le rapport à la voix y est pour beaucoup : la façon dont elle est placée maintient un rapport direct avec l'auditeur. La voix reste toujours là comme un guide. Et puis comme je n'ai pas une culture très ancienne en matière de musique électronique, je ne suis pas énormément influencée par ces esthétiques. Je les découvre, et c'est peut-être ce qui me permet d'inventer mon propre son, sans essayer de copier.
Sur Archipel, vous chantez aussi davantage en français mais en conservant une approche assez anglo-saxonne des textes, avec un soin apporté à leur musicalité peut-être davantage qu'au sens...
Pour moi, le langage est surtout sonore. Quand j'écris, et même si je ne suis pas forcément fière de ça, je me soucie assez peu dans un premier temps du sens et des thématiques que je vais aborder. Je cherche surtout à ce que ça sonne bien et à ce que les mots associés les uns aux autres forment une matière qui me plaise et que j'ai plaisir à m'approprier. Souvent, j'ai une grosse partie de la matière musicale sur laquelle je fais beaucoup de yaourt avant de me dire qu'il faut que je m'attèle au texte pour aller plus loin. Et je ne m’arrête pas tant que ça ne sonne pas parfaitement. C'est donc assez acrobatique et fastidieux parce qu'il y a plein de moments où ça sonne bien mais où ça ne veut rien dire, ce qui est plutôt embêtant (rires). Mais quand c'est là, je me sens tout à fait bien à l'idée de défendre mes textes sur scène. Ils racontent quelque chose qui peut être suggéré, métaphorique, chacun y mettant un peu ce qu'il veut.
Dans l’interprétation, vous oscillez toujours entre le chant, le spoken word, voire quelque chose qui mêle les deux…
Je ne suis pas une grande chanteuse, et mon identité se joue entre la musique, les textes et la manière que j'ai de les transmettre le plus justement possible dans une globalité. En mettant en place le projet Peau, j'ai pensé à cette adresse, très directe. Surtout, le parler-chanter permet aussi de retrancher de la mélodie – je trouve que, parfois, mettre de la mélodie pour mettre de la mélodie peut desservir l'arrangement qu'il y a derrière. L'idée, c'est que la voix ne soit pas toujours le personnage principal du morceau, mais puisse aussi se mettre au service de la musique.
À Grenoble, on vous dit grenobloise, à Lyon, lyonnaise, alors que vous êtes originaire du Vercors où vous vivez toujours. Quel rapport entretenez-vous avec cet environnement ? Et jusqu'à quel point est-il présent dans votre œuvre , sachant que des morceaux comme Avalanche, Uyuni ou le titre de l'album Archipel y font plus ou moins directement référence ?
Quand on me dit que je suis grenobloise, ce n'est pas tout à fait faux : je vois Grenoble depuis la montagne où je suis accrochée, mais je ne me sens pas du tout urbaine. J'ai grandi ici et ces dernières années, je me sens encore plus dans la nature puisque j'habite dans un endroit assez perdu. Je travaille essentiellement chez moi, et je m'aère la tête sur les sentiers, dans la forêt, pour écouter les titres en cours de création avec un peu de recul. Cet environnement, je n'y fais pas explicitement référence dans mes textes, mais il est présent sur ce disque comme un paysage. Car ce paysage influence qui je suis et donc, par définition, ce que je fais.
Peau, vendredi 14 mars à 20h30, à la Bobine
pour aller plus loin
vous serez sans doute intéressé par...
Mercredi 12 janvier 2022 La fille de qui l’on sait et sa mère se livrent (et se délivrent) l’une l’autre dans un double portrait au miroir tenant autant de la catharsis que de l’apprivoisement mutuel, à la lisière timide du privé et du public. Rencontre avec Charlotte...
Mardi 2 novembre 2021 À l’instar de Paul Sanchez, Peaux de Vaches, le premier long métrage de Patricia Mazuy, est revenu ! Plus de trente ans après sa réalisation — bénéficiant au (...)
Vendredi 22 octobre 2021 Grenoble Underground organise une semaine dédiée au tatouage au Ciel, avec exposition, ateliers, discussions et l’élection du tatouage le plus laid (le vainqueur aura droit à un cover offert).
Vendredi 13 novembre 2020 Même s’il a provisoirement fermé ses portes au public, l’Office de tourisme de Grenoble Alpes Métropole n’a pas renoncé à mieux faire connaître la ville aux curieux. Plusieurs de ses initiatives récentes en témoignent. Revue de détail.
Mardi 8 décembre 2020 Sculpture. Le Musée Hébert devrait rouvrir prochainement avec son exposition consacré à Jean-Baptiste Carpeaux. L'occasion de redécouvrir cet artiste important de la seconde moitié du XIXe siècle.
Lundi 17 juin 2019 Revenant de quelques infortunes artistiques, Jean Dujardin se prend une belle veste (au sens propre) taillée sur mesure par Quentin Dupieux en campant un monomaniaque du cuir suédé. Un conte étrange et intrigant totalement à sa place lors de la...
Mardi 12 février 2019 de Nathan Ambrosioni (Fr, 1h42) avec Guillaume Gouix, Noémie Merlant, Sébastien Houbani…
Mardi 29 janvier 2019 C’était il y a un peu plus de deux ans : pour fêter ses trente ans d’existence, le collectif Archipel Urbain, plaque tournante européenne vitale, (...)
Lundi 7 janvier 2019 Il lance ce mercredi 9 janvier un cycle de trois films baptisé "En Cavale".
Mardi 16 octobre 2018 de Nicolas Champeaux & Gilles Porte avec Winnie Mandela (Fr, 1h43) documentaire
Lundi 11 juin 2018 Samedi 16 et dimanche 17 juin, le Centre chorégraphique national de Grenoble (CCN2) et ses partenaires investissent la Bifurk pour un week-end de spectacles, ateliers, concerts, rencontres & co qui donne très envie. Le nom de l’événement ?...
Vendredi 6 avril 2018 Et rouvre au public mardi 10 avril à 14h. On l’a visitée en amont.
Lundi 12 février 2018 de Levon Minasian (Arm.-Fr.-Bel., 1h30) avec Samuel Tadevosian, Maria Akhmetzyanova…
Mardi 13 juin 2017 Seul en scène pendant un peu plus d'une heure, le comédien interprète différents personnages, et notamment des ados qui montent la fameuse pièce d'Edmond Rostand. En découle un spectacle à succès (quelque 400 représentations) généreux et...
Mardi 9 mai 2017 de Fabrice Du Welz (G.-B.-Fr.-Bel., int. -12 ans avec avert., 1h42) avec Chadwick Boseman, Luke Evans, Teresa Palmer…
Mardi 21 mars 2017 Presque deux siècles après sa naissance en terre iséroise, Henri Fantin-Latour se dévoile (à nouveau) au public avec une rétrospective "À fleur de peau". Connu pour ses natures mortes florales et ses portraits, le peintre a surtout construit une...
Lundi 19 décembre 2016 Jeudi 22 décembre au 102, ce sera nuit blanche d’écoute collective...
Mardi 13 décembre 2016 Qu’il soit encensé ou victime de traversées du désert (c’est un peu le cas en ce moment), Robert Zemeckis demeure un auteur touche-à-tout et un authentique (...)
Lundi 10 octobre 2016 L'une des femmes les plus drôles de France (oui, oui) sera vendredi soir au Grand Angle de Voiron pour son grand retour sur scène après sept ans d'absence. On sera dans la salle.
Mardi 28 juin 2016 Deux fois par an, le circuit Pathé concocte pour le jeune public un marathon cinéma, avec un classique et deux avant-premières. C’est déjà les grandes (...)
Samedi 3 octobre 2015 Prévu ce samedi soir pour l'"Ouverture lumière" des Rencontres-i, biennale arts-sciences, il aura finalement lieu dimanche, toujours à 20h30.
Mercredi 17 juin 2015 Producteur branché devenu star mondiale au gré d'une ascension exponentielle, Pharrell Williams est aujourd'hui le nouveau roi de la pop. Et en plus, il a un chapeau à poser sur un éventuel melon.
Mardi 10 mars 2015 À tout juste 27 ans, le metteur en scène Julien Gosselin donne à voir avec sa version théâtrale des "Particules élémentaires" à quel point l’écrivain Michel Houellebecq creuse depuis vingt ans un même sillon désenchanté. Créée en 2013 à Avignon,...
Mardi 1 juillet 2014 Alors que se tient cette semaine la trente-septième édition du maintenant incontournable Festival du film court en plein air de Grenoble, la Cinémathèque, porteuse de l’événement depuis le début, inaugure de nouveaux locaux dédiés à la mémoire du...
Mardi 11 mars 2014 Lorsqu’on évolue sur les crêtes, il faut avoir le sens de l’équilibre, la démarche subtile mais assurée, se jouer du vertige et des gouffres. C’est donc en (...)
Mercredi 26 février 2014 Zoom sur les 17 que l’on peut écouter depuis le mercredi 26 février grâce à l'asso Dynamusic / Retour de scène. Certains seront même sur la scène de l'Ampérage le samedi 1er mars.
Lundi 20 janvier 2014 On avait déjà fait le coup une fois en titrant « ça c’est du théâtre » (pour le Notre terreur du collectif D’ores et déjà). On ne va donc pas décliner le (...)
Vendredi 10 janvier 2014 Un clavier qui dégouline comme le mur d’eau d’une cascade derrière lequel on se serait brièvement caché, une rythmique myocardique, une voix flottante hantée (...)
Jeudi 19 décembre 2013 L’award du meilleur single made in Grenoble : Instant T de Peau
En juin dernier, la Grenobloise Perrine Faillet, alias Peau, sortait le beau clip de (...)