"Vertiges" de Nasser Djemaï : ma famille va craquer

Vertiges

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Théâtre / Avec "Vertiges", l’auteur et metteur en scène grenoblois Nasser Djemaï termine sa trilogie autour de la construction identitaire brillamment entamée avec "Une étoile pour Noël" et "Invisibles". Une nouvelle pièce intense et (trop) dense centrée sur un réel peu vu sur les plateaux de théâtre : c’est justement ce qui fait sa force.

« L’identité n’est pas un héritage mais une création. Elle nous crée, et nous la créons constamment » : voilà ce que déclarait en 2006 le fameux poète palestinien Mahmoud Darwich (1942 – 2008) au journal Le Monde. Des mots qui résonnent parfaitement avec le projet artistique que Nasser Djemaï développe depuis 2005, à tel point qu’il les utilise pour ouvrir la note d’intention de sa nouvelle création Vertiges.

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Une pièce créée mi-janvier à la MC2 qui clôt ainsi sa trilogie sur l’identité et les racines initiée avec Une étoile pour Noël (dans laquelle un gamin prénommé Nabil va accepter de s’appeler Noël pour se conformer aux désirs d’une partie de la société) et Invisibles (sur les chibanis, ces travailleurs magrébins restés en France sans leur famille). « C’est comme si, d’une certaine manière, Nabil tue son père sur Une étoile pour Noël ; le même Nabil, qui s’appelle Martin, retourne dans les enfers pour lui parler dans Invisibles ; et, à la sortie des enfers, ramène la lumière auprès de sa famille – c’est Vertiges. Mais le danger est de propager un nouvel incendie » nous expliquait le metteur en scène et auteur il y a un an.

« Monde parallèle »

Le point de départ de Vertiges est le retour de Nadir, fils si brillant, dans l’appartement familial du fait de la maladie du père vieillissant. Un appartement étouffant où vivent donc presque en vase clos les parents, immigrés maghrébins à la maîtrise incertaine du français (Nasser Djemaï leur a écrit des phrases sans pronoms relatifs), avec le frère et la sœur de Nadir, l’un et l’autre plus modernes à leur manière.

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Avec cette matière, Nasser Djemaï ouvre de nombreuses portes (les liens familiaux, la condition de ces immigrés écartelés entre deux pays, le poids de la religion…) et s’essaie à plusieurs styles (la pièce part sur un schéma très réaliste qui volera vite en éclats), donnant une réelle sensation de vertige à l’ensemble. Un trop-plein qui noie quelque peu le discours et laisse imaginer que Nasser Djemaï n’a pas assez confiance en son histoire.

Alors que c’est au cœur de ce récit que se trouve toute la force de Vertiges. Dans ce drame familial intense, fait de cris et de joies, mettant en scène des personnages qu’on ne voit que rarement sur les scènes de théâtre. « Il existe des mondes parallèles, tout près de chez nous […], des kystes urbains perçus aujourd’hui comme des prisons à ciel ouvert, des ghettos » écrit Nasser Djemaï en note d’intention. En découle un théâtre qui n’est pas voyeur ou moralisateur, mais simplement juste. Et pleinement contemporain.

Vertiges
À la MC2 jusqu’au samedi 28 janvier

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