"Les 12 Travelos d'Hercule" : « C'est vraiment parti comme une blague entre copains »

Les 12 Travelos d'Hercule

La Bifurk

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Spectacle / Et voici un spectacle qui fait plaisir à voir ! Soit des comédiens qui, le temps d’une soirée, deviennent des drag-queens et font du play-back sur des chansons très variées. Une aventure née à Grenoble il y a un an et demi qui commence à connaître un beau succès, et qui est surtout très drôle et parfaitement exécutée. Alors avant d’aller samedi 1er juin à la Bifurk admirer ces "12 Travelos d’Hercule", on a parlé du projet avec Colin Melquiond (alias, sur scène, Coco Mojito) et Quentin Gibelin (alias Miss Blueberry).

« Le spectacle met le public dans un état de laisser-aller assez dingue. Il y a un côté : chacun peut être comme il a envie d’être, alors lâchons tout ! Au début, je ne comprenais pas pourquoi tout le monde gueulait autant, même pendant les chansons. Puis, au fil des représentations, j’ai compris. Et c’est plutôt agréable en fait ! » Depuis un an, un show né à Grenoble fait de plus en plus parler dans la région. Et galvanise littéralement le public comme nous l’avons constaté lors d’une représentation lyonnaise, et comme nous l’a confirmé le comédien grenoblois Colin Melquiond (dit Coco Mojito au plateau).

Soit, sur scène en mode cabaret (avec bar ouvert pendant toute la représentation), des comédiens qui se transforment en drag-queens pour proposer une série de numéros en play-back sur différents morceaux tous interprétés par des femmes – Gloria Gaynor, Yma Sumac, Diam’s ou encore un improbable trio (dit "des secrétaires") composé de Dorothée, Jane Birkin et Karen Cheryl. Un choix de ne pas chanter en live à la base questionné par la troupe mais qui permet finalement aux interprètes de se donner à fond, débarrassés de toute contrainte de justesse – « On fait des trucs qui seraient complètement impossibles à faire si on chantait vraiment ! » Tout ça avec le plus de précision possible dans le jeu.

« Un vrai travail de comédien »

Quentin Gibelin, autre comédien de l’aventure (installé lui à Lugny-lès-Charolles, en Saône-et-Loire), tient d’ailleurs à cette exigence. « J’ai tout de suite lutté pour qu’on fasse ça sérieusement avec un vrai travail de comédien. Sinon, autant aller dans une boîte de nuit tard le soir quand tout le monde est bourré. On essaye vraiment de faire un spectacle de qualité. Surtout que c’est un défi de passionner les gens avec des chansons qu’ils peuvent écouter n’importe où. »

Une maîtrise du jeu (tous ont été formés dans des écoles de théâtre) qui leur a permis de développer des personnages différents les uns des autres (la maîtresse de cérémonie exubérante, la jeune fille populaire, la veuve noire, la dépressive allemande…), ce qui se ressent dans le choix des titres diffusés. « Au départ, on a eu du Dalida, du Mireille Mathieu… Puis, au fur et à mesure, les grands classiques des shows drag-queen se sont un peu fait évincer par des chansons plus inattendues – même si on a toujours du Mireille Mathieu ! D’ailleurs, on choisit moins une chanson pour se faire plaisir qu’un numéro dans sa globalité. Celles que je fais, ce n’est pas ce que j’écoute au quotidien mais je me suis dit à chaque fois qu’il y avait un truc intéressant pour mon personnage de Miss Blueberry. »

« Faut qu’on arrête de rigoler ! »

Flash-back. En octobre 2017, le comédien grenoblois Tom Porcher réunit au Midi / Minuit onze de ses potes (pas forcément grenoblois) avec une envie (faire un cabaret drag-queen à l’image de celui de Mado à Montréal) et une idée de titre (Les 12 Travelos d’Hercule) en tête. Quentin Gibelin : « C’est vraiment parti comme une blague entre copains, avec ce titre que Tom trouvait marrant. On s’est alors tous retrouvés dans le théâtre et on s’est posé plein de questions : qu’est-ce que ça veut dire qu’être drag-queen ? Comment on se maquille ? Qu’allons-nous faire sur scène ? » Un laboratoire qui débouche sur une présentation publique, puis sur des suivantes dans d’autres lieux à la faveur d’un bouche-à-oreille prometteur dépassant le simple cadre des amis d’amis.

Colin Melquiond : « Dès les premières représentations en janvier 2018 au Lavoir Public à Lyon, on a eu des retours super élogieux de grandes figures du théâtre lyonnais. On s’est alors dit : ah bah ce n’est peut-être pas qu’une grosse blague notre truc en fait, faut qu’on arrête de rigoler ! » Ensemble (il n’y a pas de metteur en scène attitré), ils ont donc travaillé leurs costumes, bossé la partie maquillage avec deux professionnels, peaufiné le rythme du show (conçu en trois parties de cinq ou six numéros), trouvé une forme d’adresse au public (avec deux d’entre eux à la présentation)… Tout ça pour ne pas prendre à la légère et avec trivialité (ce que le titre aurait pu laisser craindre) ce monde très codifié (et volontairement outrancier) des drag-queens qu’ils ont découvert au fur et à mesure.

« La drag-queen fait son show »

« Une drag-queen, c’est quelqu’un qui utilise des clichés de genre – qu’est-ce qui fait qu’on est une femme par exemple – qu’il mélange et qu’il grossit par 10 000 à la loupe. Ça crée une sorte de personnage hybride qui est à la fois amusant, sexy, effrayant… Un personnage qui a vraiment rapport au spectacle : la drag-queen fait son show ! Pas forcément dans un cabaret – elle peut juste être là pour animer une soirée – mais forcément dans le cadre d’une fête » résume Quentin Gibelin. Un univers de plus en plus grand public aujourd’hui (grâce notamment au show télévisé américain de RuPaul) qui se retrouve conjugué à toutes les sauces. Colin Melquiond : « C’est sûr que c’est vraiment à la mode en ce moment. Mais je trouve qu’on ne se met pas dans une suite, on fait quelque chose de plutôt original. Enfin, je crois ! »

On ne peut que lui donner raison à la vue du résultat, véritable déflagration queer (quel tableau final !) qui crée une complicité immédiate avec le public. Tous les publics même. « Un jour, dans un festival, on a joué devant 70 enfants. J’avais peur parce que j’avais l’impression qu’on allait se faire lyncher par les parents. Mais ça a été la folie, les mômes étaient tellement contents, ils criaient le nom de leur drag-queen préférée. À la fin, on a même fait des selfies avec eux, c’était incroyable ! » À l’image de ce spectacle atypique et tellement généreux – tout ne se finit pas le dernier tableau achevé, loin de là ! Alors vous savez ce qu’il vous reste à faire, samedi 1er juin à la Bifurk ou la saison prochaine à Grenoble (le spectacle sera repris).

Les 12 Travelos d'Hercule
À la Bifurk samedi 1er juin à 20h

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