On n’est pas là pour disparaître
Editions Verticales 2007
On n’est pas là pour disparaître, qui a véritablement mérité son Prix Wepler Fondation La poste 2007 (un des prix littéraires les plus intéressants), est le 7e texte d’Olivia Rosenthal. Ni roman, ni simple portait ou récit d’un homme atteint de la maladie d’Alzheimer, ce texte, plutôt objet littéraire singulier et inventif, comporte tous les atours de la littérature que l’on aime. Olivia Rosenthal y enchevêtre plusieurs voix. Toutes, paradoxalement tentent de dire l’indicible avec des mots, de mettre des mots sur une maladie indicible, celle où l’on perd les mots, justement, la maladie de A (pour Alzheimer). Et ce projet littéraire, pourtant «voué à l’échec» selon les mots de l’auteur, parvient à communiquer au lecteur la sensation d’effacement qu’engendre la maladie. Olivia Rosenthal circonscrit sans pathos cette vie sans passé, sans présent ni avenir - une vie de souffrances informulables . Il y a la voix de Monsieur T. auquel l’auteur rend visite régulièrement et qui a poignardé sa femme. À présent, «Monsieur T reprend chaque jour la même déclaration d'amour et chaque jour Madame X est à la fois surprise et flattée de découvrir qu'elle lui est destinée». Il y a la voix d’Olivia Rosenthal qui parle de la disparition de toutes traces de ses ancêtres, dont celles de sa sœur. Puis la voix de la femme et de la fille de Monsieur T. Et, en parallèle, imbriqué dans le récit, la vie de celui qui a son corps défendant donna son nom à cette maladie, le docteur Alzheimer, ou la destinée malheureuse du docteur, professeur humain, effacé par sa maladie. Pudique, tout en restant singulier – comme ces propositions d’exercices de mémoires piqués dans le texte – On n’est pas là pour disparaître à l’écriture précise et lapidaire, nous habite longtemps. SD
