Entretien / Emmanuel Merle, poète*, est le parrain du festival Parole Ambulante. Propos recueillis par YN
Petit Bulletin : Vous êtes le parrain de la nouvelle édition de Parole Ambulante, un festival qui donne à voir la poésie dans tous ses états. Quel regard portez-vous sur ces nouvelles formes de poésie : lectures, slam, performances, spectacles ?Emmanuel Merle : Il y a 3000 ans, des types déclamaient avec accompagnement musical la poésie d'Homère. En ce temps-là, la poésie n'était pas élitiste. Je suis particulièrement sensible au fait que depuis quelques années elle soit descendue de l'Olympe où le XXe siècle la reléguait. La poésie retrouve sa dimension orale et rythmée: il faut s'en réjouir.
L’Amérique est au programme : vous êtes vous-mêmes beaucoup plus proche de la littérature américaine que de la littérature française…C'est vrai que demeure chez moi l'image (sans doute fausse) de la France comme un petit village. Et j'ai souvent vérifié que sa littérature tournait en rond comme une mobylette le samedi soir qui n'aurait pas les moyens de prendre la route. Parfois, il est difficile de lutter contre "l'idée" de l'espace (une survivance du go west du XIXe siècle). Sans parler de celle de nature sauvage (survivance cette fois du mythe du Paradis Perdu). Le fait est que la littérature américaine, du moins celle que j'aime, possède un souffle et une couleur qui me semblent faire défaut au noir et blanc français.
Pouvez-vous nous dire un mot du spectacle auquel vous participez, autour de votre œuvre et de celle de Gaston Miron…Gaston Miron est une tourmente à lui tout seul. Il va être difficile de ne pas le trahir pendant la lecture et impossible de hisser mes propres textes à son niveau de révolte. C'est difficile d'endosser le texte d'un autre et encore plus d'endosser le sien. Mais deux voix, une guitare et l'intimité du Théâtre des Marronniers devraient donner un coup de main à la poésie.*Dernier livre paru : Un homme à la mer (Gallimard)
