C'est du propre

Claude Burgelin et Gérard Pommier

Villa Gillet

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Le psychanalyste Gérard Pommier est invité à la Villa Gillet et publie un livre où l’on en apprend de bien bonnes sur le nom propre… Notamment en quoi notre vie érotique peut être fort bonne ! Jean-Emmanuel Denave

Des éditions universitaires, une couverture blanc cassé sans illustration, un titre (Le Nom propre, soit en l’occurrence : le prénom, le nom de famille et le surnom) et un sous-titre (Fonctions logiques et inconscientes) à faire fuir même les plus curieux d’entre vous… Le nouveau livre du psychiatre et psychanalyste Gérard Pommier n’a rien de sexy a priori. Pourtant, parmi les mille et une choses passionnantes que l’on y lira, on apprendra ceci : que le nom propre nous donne justement l’accès au sexy, à l’érotisme, au désir…

Cette thèse, lacanienne à l’origine, est ici retravaillée et réélaborée dans tous ses détails et conséquences. Résumons-la en quelques mots : le nom est un rempart symbolique contre l’excès de la jouissance corporelle, ce qui nous permet de subjectiver cette jouissance et de ne pas se perdre dans sa dépersonnalisation, son gouffre sans repère et mortifère. Le nom propre est, comme le dit Pommier, un poteau indicateur de l’interdit de l’inceste. «Le rapport du sujet à son nom lui impose des conditions symboliques étroites qui commandent jusqu’à sa capacité de jouir et se reproduire».

De Lacan au Bonhomme Colas

Cette perspective psychanalytique se déploie en différentes sous-thématiques, dont l’une des plus intéressantes a trait à la psychose. Pommier reprend Lacan, qui interpréta la psychose comme «forclusion du nom du père», soit la non reconnaissance et la non subjectivation de son propre nom, qui fait sombrer le sujet dans le narcissisme primaire et l’impossible ou difficile accès à l’objet, à l’autre, à l’altérité du réel. Au-delà de la psychanalyse, le livre de Pommier est aussi un formidable "voyage" anthropologique et historique parmi les avatars et les métamorphoses de la nomination.

Du totémisme, par exemple, où le nom est réparti par rapport au totem de la tribu, jusqu’aux débuts des monothéismes où le nom donné à l’enfant par les parents est donné au nom d’un dieu qui lui-même… n’a pas de nom ! Pendant mille ans, les enfants ne recevront ainsi qu’un seul nom : leur prénom actuel. C’est François 1er qui, dans l’ordonnance fameuse de Villers-Cotterêts (1539) et pour des raisons pratiques d’état civil, fit du surnom des individus leur nom propre et de leur ancien "nom" leur prénom (vous suivez ?). Bref, avec François, on régresse de mille ans et on revient, selon Pommier, au totémisme primitif. Le "Bonhomme Colas" (surnom du roi, colas signifiant niais et stupide) eut pour maîtresse en titre Anne de Pisseleu ! C’est dire s’il n’était pas très éveillé en ce qui concerne le nom, le propre et le symbolique.

Gérard Pommier
en dialogue avec Claude Burgelin
A la Villa Gillet, mercredi 13 mars
Gérard Pommier, Le Nom propre, PUF.

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