Transmusicales : interview de la Mverte

Nous avions pu rencontrer La Mverte l'année dernière à l'occasion des 36e Transmusicales à Rennes. Il jouait à l'Ubu deux heures après l'interview. Comme il était présent également cette anné et que l'interview n'a pas été publiée, nous la produisons ici.

Nous avons pu rencontrer La Mverte à l'occasion des 36e Transmusicales à Rennes. Il jouait à l'Ubu deux heures après l'interview, et la veille, le groupe DBFC du même label "Her Majesty's Ship Records" (HMS Records pour les intimes) était programmé au Parc Expo. Nous avons voulu en savoir plus sur ce jeune artiste (il a sorti sont premier EP en février), et son label fortement inspirés par des eighties pop et synthétiques.

- Pourquoi La Mverte écrit avec un v ?

L'histoire est drôle car avant de faire La Mverte j'avais un vieux nom de DJ Antheros Thanaton. J'étais en studio à Berlin avec mon pote Hugo (NDLR : Hugo Capablanca) qui habite Berlin depuis 8 ans qui m'a dit : "t'as qu'à t'appeler la Muerte, c'est cool". Donc La Muerte c'est génial et comme dans Antheros Thanaton il y a Thanatos... La Mverte avec un v, c'est parce que un jour, j'ai reçu un mail d'un mec qui je crois fait du punk à roulette, et me dit "tu vas arrêter de t'appeler la Muerte parce que j'ai déposé le nom à l'INPI". Du coup, pour ne pas lui donner raison, j'ai changé le u en v et voila !

- D'où l'orthographe à la Romaine ?

Oui c'est pas du tout un truc de hype comme Chvrches...

- Depuis la sortie de ton EP qu'est-ce qui a changé pour toi ?

C'est une super année. Je suis hyper content. Mon premier disque solo est sorti en février. J'ai eu plein de trucs à la sortie du disque qui étaient assez inattendus pour moi, on m'a proposé plein de dates, même des dates à l'étranger. C'était bizarre pour moi de susciter un intérêt. En fait mes morceaux ne sont pas du tout calibrés "je vais faire un truc qui va déchirer les dancefloors et je vais tourner partout". Je fais juste la musique que j'ai envie de faire de la façon dont j'ai envie de la faire, avec des vraies machines. Il y a eu les RedBull Academy aussi, à Tokyo, c'était inattendu, tout s'est hyper bien enchaîné, et les Trans aujourd'hui : c'est pas du tout un truc que j'attendais !

- D'ailleurs comment as-tu été repéré pour les trans, comment cela s'est-il passé avec Jean Louis Brossard ?

En fait, je pense que c'est parce que j'ai été sélectionné aux RedBull Music Academy (RBMA) cette année que du coup je joue aux Trans. Parce que c'est une scène RBMA et j'imagine qu'il doit y avoir une connexion entre les deux.

- Pour les RBMA as-tu envoyé une candidature ?

Oui, il y a eu 6200 candidatures de 114 pays différents et 59 personnes de prises. Et j'ai eu la chance de faire partie de ces personnes là.

- Du coup est-ce que ton travail est plus orienté studio ou live maintenant ?

Avec la préparation de mon 2ème EP qui va sortir en février 2015, je commence à avoir suffisemment de morceaux pour monter un live qui se tient. Pour moi tout me plait à part égale. J'ai commencé la musique en étant bassiste dans des groupes post-punk quand j'étais jeune. La prod en studio ça me plait autant. C'est un tout, ce sont de multiples facettes d'un même truc.

- As-tu une formation de musicien à la base ?

Non je suis complètement autodidacte. Je crois que j'ai du prendre 3 mois de cours de basse, mais j'ai arrêté parceque ça me saoulait, le mec me faisait jouer les Red Hot Chilli Pepper...

- Comment composes-tu ? Avec des ordinateurs, reason ou autre ?

Pas du tout. Mon coeur de setup c'est une TR-707 (NDLR TR-707 est une boîte à rythmes fabriquée par la société Roland en 1985) et un SH-101 (NDLR : synthétiseur analogique Roland de 1980). Je fais quasiment tout avec le SH. C'est un clavier dont j'adore la texture, j'adore le grain. C'est hyper versatile. Avec la 707 ça fonctionne bien pour faire des séquences, pour faire des lignes de basse. C'est hyper dynamique, hyper facile. Tu as une idée, tu la poses et ça sonne tout de suite. A un moment j'ai fait de la musique avec un ordinateur mais j'ai assez vite arrêté. Les possibilités quasi-infinies avec les plugins, je passais plus de temps à faire mes presets, mes patchs sur les plugins qu'à faire de la musique. Quand tu passes une après-midi à faire un truc tu te dis : "alors ça fait 4h que je suis sur cette texture de son, j'ai pas lancé une séquence, juste arrête, fais de la musique".

- Justement, pour incarner différemment la musique sur tes lives est-ce que tu projettes de jouer avec des musiciens sur scène ?

Pour l'instant le live je le conçois pour moi seul mais c'est une chose que j'ai apprise en tournant avec Yan (NDLR Yan Wagner), quand tu fais de la musique et que tu commences à tourner c'est tout une part de business que tu as du mal à appréhender et du coup je préfère le monter seul. Déjà c'est cool de faire tout, tout seul. Après je ne suis pas contre m'ouvrir et prendre un mec avec moi, ça donne plus de possibilités, plus de mains, forcément. Mais en terme d'économie, c'est mon premier projet, premier live, pour le faire tourner c'est plus rationnel de faire un truc simple avec une personne sur scène. C'est suffisamment difficile de tourner, si en plus ton live te coûte trop cher, tu ne joues pas. Et moi j'ai juste envie de jouer !

- Que vas-tu nous jouer pour tout à l'heure ?

C'est hyper étrange parce que c'est pas du tout un format auquel je suis habitué. Ce sont des sets d'1/2h et c'est difficile en temps que DJ de créer un univers en 1/2h. J'ai donc préparé plein de morceaux pour chaque 1/2h. La première ce sera sur des tempo plutôt lents. La 2e plus mid-tempo autour de 110, ça monte en puissance et la 3e ce sera plus high tempo.

- Pourrais-tu nous décrire tes influences, ton univers musical ?

C'est hyper large. J'habitais avec ma mère qui écoutait beaucoup de disco modern-jazz et quand j'allais chez mon père c'était plutôt New Wave, post punk, genre New Order, Depeche Mode. A partir de 10-12 ans j'ai commencé à chercher la musique par moi-même, et je me suis ouvert à la musique électronique, house, techno, acide. En ce moment j'écoute beaucoup de minimal-wave, synth-wave. J'écoute beaucoup de choses différentes.

- Nous sommes grenoblois : il y a The Hacker qui joue ce soir, je sais aussi que tu as remixé Miss Kittin : te sens-tu proche de ces gens là ?

C'est hyper drôle, parce que quand j'avais 12 ans, mon beau-père m'avait emmené à la FNAC et m'avait dit "c'est ton anniversaire, choisis le CD que tu veux", et j'avais ramené une compile d'électro clash dans laquelle il y avait The Hacker. C'est une musique qui m'a tout le temps accompagné, toute cette période Gigolo, Carretta et compagnie j'ai grandi avec, et c'est aussi ce qui a formé ce que je fais aujourd'hui. The Hacker pour nous c'est notre Laurent Garnier, il y a un truc de transmission d'histoire, il a beaucoup apporté en terme de confirmation d'esthétique.

- Est-ce que tu vas prendre le temps de faire ces Trans en spectateur ?

Hier il y avait DBFC, avec David Shawn, c'est le boss de mon label. C'est la famille, du coup on y était. On est vraiment venu pour les copains ! Ce soir il y a Aguayo et Barnt, il y a aussi un groupe italien qui s'appelle Ninos du Brasil que j'ai vraiment envie de voir et que j'aime beaucoup, un truc un peu punk avec des percus. Et évidemment The Hacker... Dans une programmation de festival, il y a à boire et à manger, et c'est difficile de faire des méga line-up pour toi, je suis hyper exigeant (rires).

- Donc avec DBFC vous êtes sur le même label "Her Majesty's Ship" ? Peux-tu nous expliquer ?

C'est le label de David Shaw et Charlotte Delacroix est la manageuse. Sur le label il y a donc David Shaw and the Beat, DBFC qui viennent de sortir un maxi, et il y a Sara avec son projet SR Kreps. Elle était chanteuse d'un groupe qui s'appelait Slove qui était sorti sur Pshent. Il y a aussi The Rimeshooters et Wassive, sorte de Métro Area, house genre un peu backroom, ... et moi !

- Il y un truc qui nous avait plu : c'est la reprise des "The The" par David Shaw and the Beat, parce que c'est un groupe monumental dont plus personne ne parle...

Ah oui "Infected". Sa reprise est ultra bien tournée, ça fonctionne vraiment bien en contrepied du morceau. Il y a toujours ce côté un peu George Michael dans la voix. Quand il le joue en live c'est la leçon. En général il le joue en entrée de set, le morceau il est à 100bpm, et le base beat il te met tout de suite dedans. Quand tu prends juste la séquence du début, t'as l'impression que ça va envoyer, mais quand il commence à chanter il y tout ce truc ambivalent, ultra groove. Ca fonctionne hyper bien. Je ne dis pas ça parce que c'est David, je le pense vraiment. Avec David on a ce genre de rapport, quand on bosse, on se dit les choses que ce soit bon ou mauvais.

- DBFC sont-ils contents de leur passage d'hier soir ?

Oui, bien sûr ils sont contents. Le côté ultra Hacienda, ça marche. C'est aussi des trucs qu'on écoute, tu vois les Happy Mondays...on vient aussi de là !

- Revenons à tes projets 2015, tu prépares ton 2ème EP : le format album ne te tente pas ?

Pour le 2e EP il y a un morceau hors format et deux morceaux plus club, dans des tempo assez jouables. Et oui, l'album j'y pense, j'ai commencé à acheter des boucles, j'ai des idées, des lignes de basse, quelques paroles.

- Et sur les dates, te verra-t-on à Nuits Sonores par exemple ?

Nuits Sonores, je ne sais pas, mais j'aimerais bien ! Avec le 2e EP et le premier, plus d'autres choses à côté, la prochaine étape c'est de trouver un tourneur pour le live, et pour mes DJ sets, parce que je viens de là et je prends autant de plaisir à faire de la musique qu'à la jouer. Je n'ai pas envie de faire un live et d'annéantir totalement l'aspect DJ.

- Tu n'avais pas prévu de vivre de la musique ?

Si ! C'est un choix que j'ai fait tout de suite. J'ai fait des études qui n'avaient rien à voir, je savais que je voulais faire de la musique. Et j'aurais pu avoir un emploi avec une grosse rémunération mais je préfère gagner beaucoup moins et faire ce que j'ai envie de faire.

- Comment as-tu basculé ? Il y a eu un événement particulier ?

Pas du tout. Mais quand j'étais plus jeune, mes parents n'étaient pas hyper chauds pour que je fasse de la musique.

- C'était "Passe ton bac d'abord" !

Oui, il y a un peu de ça.Ils savaient que j'avais le potentiel scolaire pour faire des études, que j'ai faites d'ailleurs. Je me souviens, en prépa, je leur avait dit que je voulais faire une école d'ingénieur du son. Ils m'ont dit : "ok on te soutient, mais par contre tu payes ton école, tu payes ton loyer, et tu payes ta bouffe, mais on ne t'empêche pas de le faire". Quand tu as 18 ans c'est un peu compliqué. Du coup j'ai fait mes études en faisant de la musique à côté mais je savais très bien que j'allais finir par faire de la musique. Pour moi c'était évident. C'est un truc qui vient de loin. Je ne me suis pas dit je veux faire de la musique, je la faisais déjà !

- Dernière question : qu'est-ce que tu as commandé à noël ?

(rires) En fait, j'ai acheté un synthé et ça m'a ruiné. Il faut que j'achête une MPC. Comme je suis en train de monter mon live j'aimerais une MPC1000 qui ne sont plus produites, et qui sont bien car elles sont légères et compactes avec plein de sorties. Une MPC1000, la black édition, ce serait bien.

Propos recueillis le 6 décembre 2014 aux Transmusicales par Michel et Bruno

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