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Par Stefan Hertmans (Belgique). Écrivain belge flamand, Stefan Hertmans est l’auteur de poésies, romans, essais, pièces de théâtre et nouvelles. Guerre et Térébenthine est la restitution tendre et sensible de la vie de son grand-père à partir de ses carnets de notes : ce roman raconte sa passion pour la peinture, ses amours perdues et le traumatisme de la Grande Guerre, offrant par la même occasion un puissant panorama du siècle dernier et de notre histoire, collective et individuelle.

Je trouve très difficile, en tant qu’auteur, de m’en tenir à un mot ou à une idée clé. Même si une telle proposition part d’une bonne intention, elle me rappelle la question du livre que l’on aimerait emporter sur une île déserte. Ma réponse sera toujours : aucun, car le livre n’est rien sans la bibliothèque, sans la trame de textes d’où il extrait, comme chaque ouvrage, chaque passage, sa valeur et sa signification. Isolé, ce livre est presque vide de sens – il est la mort de la littérature, et toute personne qui a déjà brûlé mentalement la bibliothèque sera bien en peine de répondre à la question à propos de ce Seul Livre, en pensant à cet unique palmier s’agitant stupidement sur un bandeau de sable horriblement chaud. Le plus souvent, ceux qui ne proposent qu’Un Seul Livre détestent le caractère ouvert de la bibliothèque.

Face à ce paradis de la monotonie, j’aimerais proposer la belle maxime de Walter Benjamin : « Je me suis toujours représenté le paradis comme une sorte de bibliothèque ».

Cela vaut aussi pour cet unique mot clé : il suppose que l’on ne souffre pas de ce que Hegel a appelé la « négation » – autrement dit que l’on ne souffre pas de cette mort de l’écriture que signifie tout compte fait la focalisation sur une seule notion, pensée ou maxime – car on risque par la même de nier tout le reste sous l’emprise de ce diktat d’une préférence qui est étrangère à l’imagination littéraire.

Non, en ce sens on ne peut pas trouver de mot clé, parce qu’on ne peut tout simplement pas trouver une seule serrure qui puisse isoler cette idée de tout ce qu’elle recouvre et qui est à l’origine de la réflexion.

Par conséquent, et parce que le paradoxe est toujours inhérent à l’hypothèse, il n’y a pour moi qu’une seule idée clé que nous devons respecter : celle que le poète allemand Friedrich Hölderlin appelait « Das Offene » – l’ouverture, le début, le commencement. Cependant, et c’est précisément ce qui est profondément inhérent à ce terme allemand, il implique aussi toute fin, qui devient impossible. L’ouverture n’est pas seulement un prélude à diverses possibilités ; elle est aussi l’impossibilité d’une fermeture définitive.

Hölderlin vivait à une époque d’espoir, celui d’assister à une version allemande de la révolution française. En définitive, elle ne s’est pas produite, et chaque révolution qui a touché l’Allemagne a entraîné le pays plus loin dans sa crise d’identité. Hölderlin l’a lui aussi ressenti : ce n’est qu’en restant une culture ouverte qu’une nation, une identité, peut continuer de s’émanciper.

Cela vaut aussi pour l’écrivain : il ne peut que se déclarer favorable à l’ouverture de toutes les possibilités – et s’opposer à tout mot clé, qui l’enfermerait en lui-même comme dans une identité préfabriquée, et laisserait se refermer derrière lui comme la porte d’une cellule de prison la porte des possibilités infinies.

Version Originale

Ik vind het erg moeilijk om mezelf als auteur vast te pinnen op een sleutelwoord of sleutelgedachte.

Hoe goed de uitnodiging ook is bedoeld, ze doet me denken aan de vraag welk boek men mee zou willen nemen naar een onbewoond eiland. Mijn antwoord is steevast: geen enkel, want het boek is niets zonder de bibliotheek; zonder het netwerk aan teksten dat elk boek, elke tekst zijn waarde en zijn betekenis verleent, is dat éne boek nagenoeg zinloos – het is de dood van de literatuur, en de vraag naar het Ene Boek kan dan ook slechts zonder problemen worden beantwoord door wie in gedachten de bibliotheek al heeft afgebrand, denkend aan die ene stomme waaiende palmboom op die strook gruwelijk heet zand. Lieden die Een Boek aanbidden, haten meestal de openheid van de bibliotheek.

Tegenover dit paradijs van de monotonie stel ik graag de mooie maxime van Walter Benjamin: “Het paradijs heb ik me altijd als een soort bibliotheek voorgesteld”.

Zo is het ook met dat ene sleutelwoord: het zou veronderstellen dat men niet lijdt onder wat Hegel de ‘negatie’ heeft genoemd – dat men met andere woorden niét zou lijden onder de manier waarop het zich vastpinnen op één begrip, een gedachte of één maxime eigenlijk de dood van de schriftuur betekent – omdat men daarmee al het andere dreigt te negeren onder het dictaat van een preferentie die vreemd is aan de literaire verbeelding.

Nee, er is in die zin geen sleutelwoord te vinden, omdat er simpelweg niet één slot te vinden is dat deze gedachte zou kunnen afgrenzen van alles wat daarachter ligt en waarmee het denken begint.

Daarom, en omdat de paradox altijd inherent is aan de stelling, is er voor mij slechts één sleutelgedachte die we in ere moeten houden: die, welke de Duitse dichter Friedrich Hölderlin ‘Das Offene’ noemde – de openheid, de ouverture, het begin, de aanhef. Maar, en dat ligt in de Duitse uitdrukking juist zo inherent besloten: het impliceert ook elk einde, dat onmogelijk wordt. Het Opene is niet slechts het openen van de mogelijkheden; het is ook de onmogelijkheid om die ooit definitief af te sluiten.

Hölderlin leefde in een tijd van hoop op een Duitse versie van de Franse Revolutie. Die is er uiteindelijk niet gekomen, en elke revolutie die Duitsland trof, sleurde het land dieper de identiteitscrisis in. Dat is wat Hölderlin ook voorvoelde: het is slechts door een open cultuur te blijven, dat een natie, een identiteit zichzelf kan blijven emanciperen.

Zo is het ook met de schrijver: hij kan zich slechts bekennen tot de openheid van alle mogelijkheden – en zich keren tegen elk sleutelwoord, dat hem in zichzelf zou opsluiten als in een prefab-identiteit, en waarmee de deur van de onbeperkte mogelijkheden als een celdeur in het slot zou vallen achter zijn rug.

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