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Quand on arrive en livre !

Yourself & Yours

Les amours insaisissables éternellement renouvelées

On va voir le dernier Hong Sang-soo comme le dernier Woody Allen. On s’assoie dans le film comme dans notre fauteuil de velours rouge, on en accepte la réalisation, le rythme et le jeu si particuliers et familiers. Le coréen comme l’américain s’appuie sur un canevas bien connu. Reste au spectateur de se concentrer sur les subtiles variations apportées deci-delà où se trouvent l’originalité de l’opus. Pourtant, Hong Sang-soo creuse le même sillon avec ses thèmes de prédilection : les relations amoureuses, l’ivresse, le temps subjectif.

Le film est une suite de pastilles, pas toujours agencées chronologiquement, entourées d’un brouillard éthylique et de vapeurs de cigarettes. Les mathématiciens diraient que la narration de Hong Sang-Soo est discrète et non continue… peut-être parce que le temps n’est continu que dans nos montres et nos agendas … peut-être que subjectivement, c’est un mic-mac pas possible, un capharnaüm d’idées, d’émotions, de sensations et de réalités fantasmées. Dans ce temps non linéaire, que devient l’Amour ? Que devient-il dans les interstices ? Que devient l’Amour lorsqu’on ne se dit pas “je t’aime” ? Enfin, que devient-il lorsqu’on le parsème d’énormes bitures amnésiques ?

C’est là le problème du couple (Youngsoo ♂ et Minjung ♀) dont on suit un moment de crise. Youngsoo aime Minjung qui, elle, aime surtout la boisson, alcoolisée de préférence. Youngsoo fait promettre à Minjung d’arrêter de boire ou plutôt de ne pas boire plus de 5 verres. Fondé sur des rumeurs, Youngsoo est persuadé que Minjung a brisé sa promesse, l’engueule et l’insulte, Minjung part (le couple fait un break - possible jeu de mot du réalisateur autour de la jambe cassé de Youngsoo dont il ne donne pas la cause).

En gros, la thèse du film est que posséder l’être aimé, c’est le tuer. Pourquoi cette urgence, très masculine par ailleurs, de saisir, posséder, réduire notre bienaimé(e) ? Au regard de cette urgence, quel plus grand péril que l’ivresse ? Ce moment où nous sommes étrangers à nous-mêmes est dangereux par sa frivolité et son amnésie. Combien de couples observe-t-on en soirées se faire la gueule parce que l’un et/ou l’autre est trop ivre ? Attention, ne croyez pas les arguments avancés, ce n’est pas pour une raison de santé ou de honte mais par peur le (la) perdre. Hong Song-soo pousse plus loin le raisonnement : chez lui, la biture efface et gomme. Ainsi, après quelques verres, Minjung a totalement oublié Youngsoo et reproduit le même schéma avec d’autres. D’ailleurs, il y en a sûrement eu d’autres avant lui. Naturellement, les hommes qui croisent la route de Minjung sont désarçonnés par cette Carmen sud-coréenne.

Dans une époque égocentrée du Me, Myself & I, Hong Sang-soo nous offre son miroir Yourself & Yours prônant la complexité mystérieuse de l’Autre.

Il y a quelque chose de Eternal sunshine of the spotless mind dans ce film, quelque chose qui dit que l’Amour doit être sans cesse recommencé, renouvelé, finalement qu’il est “enfant de bohème”.

Devriez-vous aller voir Yourself & Yours ? Ca dépend si vous voulez voir un film intelligent qui vous aidera à comprendre le couple et l’Amour… Sinon, il parait qu’ils repassent Police Académy 72 sur la TNT...

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