Mouais

Batman Beginsde Christopher Nolan (EU, 2h19) avec Christian Bale, Katie Holmes, Liam Neeson...D'abord, surprise face à ce Batman réaliste, se faisant tabasser dans une prison tibétaine, puis apprenant le kung-fu avec un maître ambivalent, prêchant le "bien" par l'insurrection violente pour mettre à bas un pouvoir corrompu qui maintient le peuple dans la misère et l'ignorance. Christopher Nolan réussit ce dépoussiérage du justicier nocturne par la méthode X-Men : un futur très proche et politiquement très actuel. Même quand l'action reprend ses droits, elle reste sale, physique, presque apocalyptique (avec ces pauvres zombifiés qui sèment la terreur dans un Gotham city très new-yorkais). L'ambition du cinéaste est cependant, comme Ridley Scott dans Kingdom of heaven, curieusement honteuse de ses audaces : dialogues mi-figue mi-raisin, entre punchlines hors-sujet et sentences psychologiques neuneu, et syndrome du "qui trop embrasse, mal étreint". Et vouloir tout mener de front, discours politico-social et blockbuster spectaculaire, film choral (une douzaine de personnages travaillés avec soin) et genèse d'un héros mythique (Christian Bale est sans doute le plus crédible de tous les Batman vus à l'écran), déconstruction narrative et récit linéaire, Batman Begins n'évite pas une certaine confusion, sinon, malgré ses 140 minutes, une forme de précipitation. Où l'on mesure aussi que si le cinéma hollywoodien choisit aujourd'hui de s'engager dans une voie adulte salutaire, il rame toujours derrière les séries télé pour arriver à véhiculer de la pensée et du divertissement dans un même mouvement.Brodeusesd'Eléonore Faucher (Fr, 1h28) avec Lola Naymarck, Ariane Ascaride...Une des révélations françaises de l'année dernière : un premier film qui suit l'apprentissage sentimental et professionnel d'une jeune fille dissimulant sa grossesse non désirée. Elle quitte le microcosme du supermarché où elle est caissière pour intégrer l'atelier d'une brodeuse n'ayant jamais fait le deuil de son fils tué dans un accident... Faucher, comme son personnage, travaille scénario et mise en scène avec une précision artisanale : c'est de la belle ouvrage, à n'en point douter, même si on en vient à se lasser de tant de soins. Brodeuses finit par ressembler à un film des Dardenne filmé par Greenaway. Un grand écart original, mais pas complètement convaincant.Le Cercle 2de Hideo Nakata (EU, 1h50) avec Naomi Watts...Hideo Nakata refait son propre film aux Etats-Unis. ‚a ne vaut évidemment pas l'original : le scénario insiste lourdement sur tous les ressorts psychologiques et familiaux pour séduire le public américain. Ce qui est beaucoup plus passionnant, c'est la façon dont Nakata s'affranchit des normes de mise en scène hollywoodienne, réussissant au moins par (grands) moments à inoculer un peu de son onirisme asiatique. La séquence de la baignoire et de l'attaque des cerfs restent de belles scènes de fantastique sensuel.Les conséquences de l'amourde Paolo Sorrentino (Ita, 1h50) avec Toni Servillo, Adriano Giannini...Et l'époque de sa sortie, on avait essayé de résumer le nouveau long métrage de Paolo Sorrentino comme "du Wong Kar-Wai post-Anges Déchus tourné en Suisse avec des vieux". Sans oublier de citer au passage un Toni Servillo absolument somptueux, ombre invisible mais sensible, clopant à tout va sur fond de pop-rock et d'électro ; il est pour beaucoup dans l'équilibre d'un film fier d'être bancal. Si elles se perdent parfois dans le mélange ininterrompu des genres, ces Conséquences redressent vaillamment le cap dans leur superbe scène finale, se ralliant une fois pour toute au versant mélancolique de leur intrigue à rebours.L'Esquived'Abdellatif Kechiche (Fr, 1h57) avec Sara Forestier, Osman Elkharraz...Un an et demi après sa sortie en salles, qui aurait prédit qu'on parlerait encore du deuxième long d'Abdellatif Kechiche ? Entre temps, une pluie de Césars s'étant déversée sur le film à la surprise générale, L'Esquive a été élevé au rang de symbole d'un cinéma français indépendant et néanmoins accessible. On ne lui contestera pas une certaine clairvoyance, ainsi qu'une vraie force pour décrire des situations paroxystiques avec une profonde vérité (l'explosion de la prof de français, l'intervention des flics...). Pas de morale à deux sous dans ce jeu de l'amour, du langage et de la banlieue, mais une grande lucidité sur la réalité sociale (comme chez Audiard, il n'y a pas ici de rédemption par la culture et l'art). Reste à nous convaincre que la production fauchée du film (image en DV tremblée, raccords hasardeux) est effectivement une question de moyens, et pas une manière de minimalisme esthétique déguisé. La réponse au prochain Kechiche produit par... Claude Berri !L'interprètede Sidney Pollack (EU, 2h) avec Sean Penn, Nicole Kidman...Difficile de faire plus con que ce scénario qui mêle casseroles sentimentales et complot politique improbable entre l'Afrique et les Etats-Unis. ‚a gâche un peu le duo de stars, limités à des personnages sans épaisseur, mais ça ne gâche pas pour autant le plaisir. En filmant New York comme personne, notamment la salle de l'ONU dans laquelle il fut le premier à tourner, Pollack réussit à développer une véritable atmosphère et un style qui ne manque pas de panache. L'attentat dans le bus et la tentative de meurtre vue de l'appartement d'en face constitue deux beaux moments de cinéma qui nous rappelle que Pollack compte, et qu'on aimerait le voir tourner enfin des projets plus personnels.J'aime Huckabeesde David O'Russell (EU, 1h47) avec Jason Schwartzman, Jude Law, Dustin Hoffman...Profitant d'une brèche dans le cinéma de studio, l'iconoclaste David O'Russell (Flirter avec les embrouilles, Les Rois du désert) s'engouffre à l'intérieur et embarque un casting luxueux dans un film improbable, comédie existentielle à base de dialogues philosophiques et de quiproquos absurdes. Au moins, ça ne ressemble à rien de connu et, même si on voit bien toutes les limites de la chose (dont la plus grosse est justement de ne pas avoir de limites), on se surprend à regarder avec plaisir ces ratiocinations fantaisistes, comme si le goût de la comédie était le seul vrai message métaphysique délivré par le cinéaste.Kingdom of heavende Ridley Scott (Ang, 2h20) avec Orlando Bloom, Eva Green...S'engageant dans des aventures de plus en plus couillues, Ridley Scott visait haut avec Kingdom of heaven. Trop haut probablement, car cette fresque sur les croisades se focalisant sur le siège de Jérusalem veut courir beaucoup de lièvres en 2h20. L'introduction (une heure !) prend un soin inhabituel à brosser des personnages ambivalents et à exposer les enjeux politiques de l'époque ; elle souffre paradoxalement de nombreuses ellipses la rendant plutôt confuse. La deuxième partie, plus spectaculaire, ne transige pas avec le point de vue du cinéaste (et du personnage principal) : comment entrer dans une guerre inévitable alors que l'on cherche à préserver la paix ? Au wargame live de La Chute du faucon noir, Scott substitue une forme de jeu de stratégie et de conquête (façon Age of empires), en conservant comme figure centrale celle de l'homme ordinaire dont l'héroïsme n'existe que dans la durée du conflit. Belle idée d'un film parfois inspiré, parfois lourdingue, mais toujours courageux.Matadorde Pedro Almodovar (1986, Esp, 1h50) avec Assumpta Serna, Antonio Banderas...L'un des plus vibrants exemples de la dégénérescence irrévérencieuse dont a pu se targuer le cinéma de l'enfant terrible du cinéma espagnol, avant sa reconnaissance internationale. Un ancien matador ne peut plus éprouver de plaisir que si ses maitresses simulent la mort ; son élève, bridé par une mère violemment bigote, s'accuse de ses meurtres en série ; une avocate, familière des frontières ténues entre Eros et Thanatos, entre dans la danse. Tango foutraque entre pulsions sexuelles et mortelles, parsemé de scènes magnifiques mais quelque peu plombé par sa narration, Matador porte en lui les germes d'un cinéma du désir inavouable ne demandant qu'à exploser, et s'achève sur l'une des plus belles scènes de toute la filmographie d'Almodovar, au son de la superbe chanson Esperame en el Cielo. Papade Maurice Barthélémy (Fr, 1h18) avec Alain Chabat, Martin Combes...Mélo familial déguisé en comédie : ça commence comme une pochade où Alain Chabat fait le guignol pour amuser son fiston. Mais précisément, le numéro ne prend pas : dans cette voiture qui ne va nulle part, s'installe peu à peu entre père et fils un rapport silencieux qui confine au non-dit. Evocation délicate du deuil et de la culpabilité, ce joli film à rebours des mauvais RRRrrrr !!! et Casablanca driver est un joli film sur des hommes vulnérables, réussissant à capter ce qu'ils n'arrivent pas toujours à dire mais qui ne cessent de les habiter.Quand la mer montede Yolande Moreau et Gilles Porte (Fr, 1h33) avec Yolande Moreau, Wim Willaert...Même si on était sorti charmé mais pas totalement convaincu du premier long métrage de Yolande Moreau (la faute à un dernier tiers plombant un peu le ton aérien de l'ensemble), on a tout de même esquissé un sourire réparateur lors de la dernière Cérémonie des Césars, en la voyant rafler le prix du Meilleur Premier Film à l'infâme Yann Moix. Cette mesquinerie mise à part, saluons ce road-movie des plus plaisants, porté vers les hauteurs par la grâce de son casting trois étoiles (Olivier Gourmet, Jackie Berroyer, l'excellent Bouli Lanners et la révélation Wim Willaert).Robotsde Chris Wedge (EU, 1h25) animationAussi sympathique que vite oubliée, cette fable à base de robots aux attitudes et sentiments humains, trop humains, a d'indéniables qualités : bien écrite, souvent drôle, curieusement engagée (ce n'est pas vraiment les riches contre les pauvres, mais plutôt une relecture tordue des relations maître/esclave)... En revanche, elle pointe aussi les limites du cinéma d'animation numérique à l'Américaine qui, en dehors des studios Pixar, a bien du mal à sortir de ses paraboles-pastiches au réalisme décalé et déjà un peu dépassé.Saharade Breck Eisner (EU, 2h05) avec Matthew MacConaughey, Penelope Cruz...Pochade de gros bourins dans le désert qui piquent aussi bien à Indiana Jones qu'à James Bond. ‚a ne vaut ni l'un ni l'autre, et Penelope Cruz en médecin humanitaire nous rappelle que les bons sentiments ne font pas forcément les bons acteurs. Mais les scènes d'action sont bien foutues et Matthew McConaughey a de solides arguments auxquels on ne saurait résister sous la canicule. ca tombe bien, c'est le film idéal pour se mettre au frais.Travauxde Brigitte RoŸan (Fr, 1h35) avec Carole Bouquet, Jean-Pierre Castaldi...Une comédie de boulevard bob où tout prend l'eau dans l'appart' d'une avocate incapable de dire non quand il s'agit de décider de sa propre vie. On est content de revoir Marcial di Fonzo Bo (inoubliable dans L'Homme que j'aime de Stéphane Giusti). On n'ira pas jusqu'à dire qu'on se réjouit de retrouver Aldo Maccione et Jean-Pierre Castaldi, mais ce casting improbable apporte une touche de fantaisie à cette comédie qui frise le navet sans jamais tomber dedans. Quant à Carole, c'est le Bouquet : elle retrouve l'énergie et la folie qu'elle respirait dans Grosse fatigue, sans jamais se départir de son image de grande bourgeoise. ‚a ne suffit pas à faire un bon film mais ça détend.Vaillantde Gary Chapman (EU, 1h30) animationAprès Papy fait de la résistance, voilà mini-pigeon qui joue au soldat héros pendant la seconde guerre mondiale. Ce n'est pas la moindre originalité de ce dessin animé que d'envoyer le cinéma d'animation en mission pour donner des couleurs (et de l'humour) au film de guerre. La mission casse-gueule est à peu près réussie : l'humour crado juste ce qu'il faut et surtout une technique 3D jouissive vous assureront du beau spectacle pour vous détendre avec les petits.Va, vis et deviensde Radu Mihaileanu (Fr, 2h20) avec Ya‘l Abecassis, Roschdy Zem...Le sujet ne manque ni d'originalité ni d'ampleur : après l'épatant Train de vie, Mihaileanu suit le destin d'un jeune juif éthiopien qui émigre en Isra‘l pour fuir la misère. Historiquement, le film est passionnant. Formellement, la grande fresque lyrique alourdit surtout dans la deuxième partie un propos déjà consommé sur les problèmes de l'identité. Mais rien que pour Roschdy Zem, ça vaut quand même le détour.Voyage au centre de la Terred'Henry Levin (1959, EU, 2h12) avec James Mason, Pat Boone...Venu d'un temps immémorial où l'on ne ridiculisait pas encore Jules Verne à coups de films avec Jackie Chan, Voyage au centre de la Terre fut à l'époque une petite révolution du monde des effets spéciaux. De cette histoire d'une bande d'explorateurs poursuivis dans les tréfonds du monde par le terrrrrriiiiiiible Comte Saknussem, reste aujourd'hui un spectacle généreux, dont l'aura joliment kitsch ne nuit pas à son pouvoir de fascination. On entendrait presque la voix de Jean-Pierre Dionnet nous présenter le tout dans son Cinéma de Quartier : Des dinosaures ! Un canard ! Un méchant fourbe ! De l'action ! De l'aventure ! Un peu de romance ! Des dialogues un rien ampoulés !...

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