Simon Werner a disparu...

Un premier long-métrage français bizarre, insituable, qui mélange les codes du teen movie, du film d’horreur et de l’intrigue policière, pour un résultat plaisant mais assez vain… Christophe Chabert

D’où sort ce drôle de film ? La biographie de son réalisateur, Fabrice Gobert, indique qu’il tournait des documentaires pour arte autour des premiers films de cinéastes connus, avant de signer une série «réaliste» pour ados. Curieusement, "Simon Werner a disparu…" semble synthétiser, sans trancher, ces deux sources : un peu film d’auteur, un peu téléfilm de luxe, un œil sur les cinéastes conceptuels, un autre sur le cinéma de genre. Du coup, il prend l’allure d’un projet improbable qui chercherait à marier "Elephant", "Souviens-toi l’été dernier" et "LOL", sans pour autant que le concept marketing délirant ne prenne le pas sur la cohérence de l’ensemble. Le titre donne le point de départ de l’intrigue : un lycée de la banlieue parisienne, dans les années 90, où Simon Werner, ado populaire mais ombrageux, a disparu. On retrouve du sang dans le labo de physique… Du coup, la rumeur s’emballe autour de cette disparition : fugue ? Assassinat ? Et pourquoi ? Déception amoureuse ? Vengeance personnelle ? Crime de pur hasard ? Cinq de ses camarades vont ainsi éclairer, en prenant en charge chacun une tranche du récit, le mystère autour de Simon Werner.

Conte cruel de la jeunesse

La narration, comme chez Gus Van Sant, revient à intervalles réguliers à son point de départ, son arrivée étant une scène de fête dans une maison en lisière de forêt où le film flirte très ouvertement avec l’angoisse et le fantastique. Plus que la résolution de l’intrigue, incroyablement décevante (mais c’est exprès), c’est ce portrait de groupe et les arabesques fictionnelles qui intéressent Fabrice Gobert. Jouant avec les archétypes du film d’ados (l’efféminé, la punkette marginale, la bombe sexuelle — effectivement superbe Ana Girardot, le beau gosse footballeur), "Simon Werner a disparu…" récite avec application son petit bréviaire du cinéma américain transféré dans une France abstraite, milieu social huppé et banlieue clean aidant (plus une très chic musique signée Sonic Youth !). Au-delà de la virtuosité du scénario et de la mise en scène, le film montre toutefois de grosses limites, notamment dans ses dialogues aussi maigres (et pas forcément mieux interprétés) que ceux des sitcoms AB de l’époque. Et, à force de manipuler les clichés pour soi-disant les subvertir, Gobert ne procède souvent qu’à un banal empilement de lieux communs sur l’adolescence. Drôle de film, donc : pas déplaisant à suivre, mais aussi assez irritant ; bien foutu, d’accord, mais dessinant un projet de cinéma dans le fond assez peu excitant.

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