Les mystères des Mystères

C’est la semaine de l’art et essai discount grâce à nos amis de Télérama, mais c’est surtout une des dernières occasions de découvrir en salles "Mystères de Lisbonne" et ses 4h30 inégales mais inspirées. CC

Sorti au Zola et au Comœdia longtemps après sa sortie nationale (pour des raisons liées à son exploitation en numérique et à la programmation complexe de cette œuvre-fleuve de 4h30), "Mystères de Lisbonne" a depuis glané pas mal d’honneurs : Prix Louis Delluc, meilleur film de 2010 selon Les Inrocks et les critiques du Cercle sur Canal +… Sa programmation au festival Télérama lui offre une visibilité supplémentaire : deux séances aux Alizés à Bron, deux au Comœdia et deux au Cinéma Gérard Philipe de Vénissieux. Un succès mérité pour Raul Ruiz, qui a failli ne jamais finir le film, sauvé in extremis d’un grave cancer du foie. Se plonger dans les méandres de ce labyrinthe filmique où une histoire entraîne une histoire qui entraîne une histoire, etc., le tout formant un dessin magnifique, mais qu’il ne faut surtout pas raconter (la fin justifie à elle seule de passer 270 minutes dans un cinéma…), est une expérience faite de fulgurances et de passages à vide, d’intenses envolées lyriques et de parenthèses à la frontière de l’académisme en costumes. Mais Ruiz, en bon sorcier de la mise en scène, finit toujours par nous rattraper par la manche avec un plan-séquence époustouflant, un coup de théâtre inattendu ou une ingénieuse trouvaille visuelle.

Une moitié de grand film

L’ouverture des "Mystères de Lisbonne", où l’énigmatique père Dinis révèle à Joao, l’orphelin qu’il a recueilli, les secrets de sa conception, fait souvent frissonner tant Ruiz y dépose quelques-uns des meilleurs moments du film : l’arrivée devant l’aristocratique maison de la mère de Joao, où la caméra s’élève dans les airs sur une musique toute en cordes majestueuses, ou la cérémonie de pendaison sont des instants de grâce noire à la lisière du conte fantastique. Bizarrement, il faut ensuite attendre que Ruiz introduise de l’humour, même discret, pour que le film retrouve ces altitudes-là : l’histoire de la naissance du père Dinis ou celle mettant en scène l’intrigant Alberto de Magalhães, avec son perroquet et son laquais claudiquant, comptent parmi les épisodes les plus réussis de ce ciné-feuilleton inégal (ceux avec les jeunes acteurs français sont en revanche clairement les plus faibles). Sans crier au génie, on ne peut que recommander la vision en salles des "Mystères de Lisbonne", dans lequel on doit bien trouver une moitié de grand cinéma (soit, du coup, plus long que la moyenne des films standard !).

Mystères de Lisbonne
Dans le cadre du festival Télérama, au Comoedia, aux Alizés et au Cinéma Gérard Philipe.

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