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ECRANS

Margaret

Kenneth Lonergan Fox Pathé Europa

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Margaret

Kenneth Lonergan Fox Pathé Europa

Margaret

par Christophe Chabert

Mardi 29 janvier 2013
4026
LECTURES

par Christophe Chabert

Mardi 29 janvier 2013
4026
LECTURES

On aurait aimé vous recommander la sortie en DVD de Margaret. Vraiment. D’abord parce que c’est un grand film, d’une ambition peu commune dans le cinéma américain ; ensuite parce que sa sortie salles a été littéralement sabotée, réduite à une exposition "technique" sur une poignée d’écrans en plein été et en VF. Sans parler du fait que cette version-là n’était pas celle voulue par Kenneth Lonergan, et qu’il s’est battu contre ce remontage durant huit longues années, donnant à Margaret le statut peu enviable de film maudit. Or, stupeur, alors que le DVD anglais (disponible depuis de nombreux mois) proposait la version la plus longue et la plus conforme aux souhaits du réalisateur (un montage de 179 minutes), c’est à nouveau celle de 2h23 qui figure sur le DVD français.

Avant de revenir sur le film, deux mots sur Kenneth Lonergan. Il vient de la scène, où il a été considéré comme un des grands dramaturges américains contemporains, notamment grâce à une pièce culte, This is our youth (un titre qui aurait aussi pu être celui de Margaret). En 2000, il se lance dans le cinéma avec Tu peux compter sur moi, bien accueilli par la presse et le public américain, et qui récolte une poignée de nominations aux oscars. La voie était toute tracée pour monter d’un cran et se placer comme un des espoirs du cinéma indépendant US ; d’autant plus que Margaret, au départ, est entouré de deux bonnes étoiles : Anthony Minghella et Sidney Pollack, tous deux producteurs. Tourné en 2005, le film ne sortira pourtant qu’en 2011 aux États-Unis, après trois procès compliqués qui opposèrent le cinéaste à l’un des producteurs du film. Difficile de savoir où le bât a blessé : Lonergan n’a pas respecté les termes de son contrat et s’est montré particulièrement indécis et inefficace lors de la post-production, mais le producteur a outrepassé ses pouvoirs et commis l’erreur incompréhensible de refuser l’aide providentielle de Martin Scorsese, venu à la rescousse du film avec sa monteuse Thelma Schoonmaker.

On a parlé de l’ambition du film. Elle ne tient pas qu’à sa durée fleuve mais aussi à son envie de faire le point sur l’Amérique après le 11 septembre en se concentrant — ce qui n’est un paradoxe qu’en apparence — sur une poignée de personnages pris dans un microcosme et regardés à des périodes charnières de leur existence. En cela, Margaret est contemporain de nombreuses tentatives littéraires du même ordre (de Franzen à McInerney), même si Lonergan en tire des conclusions bien différentes. C’est un pays divisé qu’il montre à l’écran, idéologiquement déboussolé, où l’égoïsme et l’absence de communication sont à la fois un thème central de l’œuvre et la principale dynamique de sa mise en scène. Car non seulement Margaret est éblouissant dans ses dialogues, mais il est aussi bourré d’idées de cinéma assez expérimentales. La plus puissante consiste à noyer le texte principal sous une foule de dialogues saisis dans les arrières plans (ou le hors champ) des séquences, provoquant une cacophonie sonore qui rappelle Robert Altman et vient détourner la focalisation de l’action. Ce travail sur le son se retrouve aussi lorsque, en fin de scène, Lonergan remplace le dialogue par de la musique, en plein milieu d’une conversation.

Aussi étonnantes que soient les trouvailles stylistiques du cinéaste, son film tient au contraire par l’extrême rigueur avec laquelle il travaille le parcours romanesque de ses personnages. Au centre, Lisa Cohen (Anna Paquin, à l’époque encore X-woman et pas encore vampiresse), adolescente a priori protégée, faisant ses études dans un lycée privée pour «juifs de la middle-class», fille d’une comédienne de théâtre divorcée (J. Cameron Smith, la compagne de Lonergan à la ville), s’entretenant au téléphone avec son père parti animer des séminaires sur la côte ouest du pays. Lisa est témoin d’un accident de bus qui coûte la vie à une femme ; se sentant partiellement responsable de sa mort, elle dédouane dans son témoignage le conducteur du bus (Mark Ruffalo). Prise de remords, elle va vouloir rectifier sa version, puis se lancera dans une croisade judiciaire pour tenter de le faire virer par sa compagnie de transports. En parallèle, on suit sa relation conflictuelle avec sa mère et ses premiers émois sexuels avec un pote un peu stone (Kieran Culkin) et un jeune prof séduisant (Matt Damon).

Lonergan ne laisse aucun de ses personnages sur le bas-côté de l’histoire ­— ce qui lui valut le reproche, assez stupide, de «fouillis» — et se concentre sur leurs atermoiements moraux. Mais, en grand peintre de la nature humaine, il montre à la fois leur beauté et leurs limites. Ainsi, la révolte de Lisa apparaît d’abord légitime et touchante, avant que l’on comprenne qu’il s’agit avant tout d’une crise d’adolescence, avec ce que cela implique d’égocentrisme et de négation des autres. Deux scènes, à ce titre, sont exceptionnelles : la première la montre s’engueulant avec sa mère, qui entame une nouvelle relation amoureuse tout en débutant une nouvelle création sur les planches. Elle cherche le soutien de sa fille, mais se heurte à un mur ; Lisa lui renvoie son incapacité à se mettre à sa place et sa mère la défie en imitant ses réactions froides et distantes. Jamais l’incommunicabilité entre parent et enfant n’aura été si bien saisie, grâce à un crescendo dramatique qui, en effet, montre les origines théâtrales (au sens noble du terme) de Lonergan.

L’autre grand climax du film est la rencontre entre Lisa et le conducteur de bus chez lui, avec sa femme et son enfant. Là encore, tout est affaire de montée dramatique : Lisa débarque chez lui avec comme objectif premier de partager sa culpabilité. Mais lui ne se souvient plus d’elle — du moins, c’est ce qu’il prétend. Lisa ne peut pas supporter cette absence de réciprocité, et le ton s’envenime. Le génie de Lonergan, qui résume assez bien le caractère unique de Margaret, c’est d’arriver à nous faire osciller entre les deux points de vue, celui de Lisa et celui du chauffeur, sans que nous n’arrivions jamais à choisir notre camp, trouvant des raisons, bonnes et mauvaises, à chacun des camps en présence.

Rejaillit alors la grande idée du film : l’Amérique est irréconciliable car elle est fracturée à sa base, et non pas à son sommet. La chute du World Trade Center n’est pas une entaille dans ce qui était jusqu’ici un bloc de granit, une nation unie autour de valeurs communes : elle a seulement fait surgir le chaos latent qui faisait vaciller son socle. Lonergan montre dans Margaret tous les fossés qui peuvent exister entre deux êtres : fossé culturel (la mère de Lisa et son nouvel amant à l’Opéra), fossé existentiel (Lisa et ses différents amants), fossé judiciaire (l’accident est finalement réglé par des compensations financières, ce qui frustre Lisa, avide de châtiment, mais ravit la famille de la victime, résolument cupide)… Il faudra attendre le dernier plan, bouleversant, pour qu’enfin deux mains se rapprochent, deux émotions se synchronisent ; l’espoir fragile de voir renaître un lien.

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Lonergan ne laisse aucun de ses personnages sur le bas-côté de l’histoire ­— ce qui lui valut le reproche, assez stupide, de «fouillis» — et se concentre sur leurs atermoiements moraux. Mais, en grand peintre de la nature humaine, il montre à la fois leur beauté et leurs limites. Ainsi, la révolte de Lisa apparaît d’abord légitime et touchante, avant que l’on comprenne qu’il s’agit avant tout d’une crise d’adolescence, avec ce que cela implique d’égocentrisme et de négation des autres. Deux scènes, à ce titre, sont exceptionnelles : la première la montre s’engueulant avec sa mère, qui entame une nouvelle relation amoureuse tout en débutant une nouvelle création sur les planches. Elle cherche le soutien de sa fille, mais se heurte à un mur ; Lisa lui renvoie son incapacité à se mettre à sa place et sa mère la défie en imitant ses réactions froides et distantes. Jamais l’incommunicabilité entre parent et enfant n’aura été si bien saisie, grâce à un crescendo dramatique qui, en effet, montre les origines théâtrales (au sens noble du terme) de Lonergan.

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