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"Ghost in the Shell" : critique et interview de Scarlett Johansson
Par Vincent Raymond
Publié Mardi 28 mars 2017 - 3654 lectures
Photo : © DR
Ghost in the shell
De Rupert Sanders (EU, 1h46) avec Scarlett Johansson, Pilou Asbæk...
À l’instar de ses héros humains améliorés par les machines, ce film en prises de vues réelles s’hybride avec toutes les technologies visuelles contemporaines pour revisiter le classique anime de Mamoru Oshii (1997). Une (honnête) transposition, davantage qu’une adaptation.
Dotée d’un corps cybernétique augmentant ses capacités humaines, le Major a été affectée à la Section 9, une unité d’élite dépendant du gouvernement. Sa prochaine mission vise à combattre un criminel capable de pirater les esprits, mais aussi de lui révéler un passé qu’on lui a dissimulé…
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En s’appropriant le joyau de Oshii, Rupert Sanders touche à un tabou. Ghost in the Shell constitue en effet un jalon dans l’histoire des anime : il est le premier à avoir été universellement considéré comme un film “adulte” (en tout cas moins familial ou jeune public que les Takahata et Miyazake) ainsi qu’une œuvre de science-fiction visionnaire, dans la lignée des adaptations de Philip K. Dick ou Asimov. Sa narration elliptique, intriquant anticipation et tensions géopolitiques, ajoutée à son esthétique élégante et épurée, l’ont érigé en référence d’un futur dystopique… dépassé.
Bien en chair
Car depuis vingt ans, EXistenZ, Matrix puis la réalité virtuelle ont rattrapé certaines des projections de l’anime. Sanders et ses scénaristes l’ont donc “déshabillé”, conservant l'essentiel de sa trame, avant de le reconstruire en version augmentée. S’ils ont simplifié l’intrigue (remplaçant les rivalités inter-étatiques en un conflit commercial plus diplomatiquement correct), ils ont su préserver et réintégrer les séquences visuellement remarquables.
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Elles surgissent comme des déja-vus — les “glitchs” parasitant la conscience du Major — pour ravir les nostalgiques, déjà conquis par la présence d’un Kitano parlant dans son idiome. Enfin, si la facture de l’ensemble est belle, la 3D confine une fois encore au gadget et prouve sa surpuissante inutilité. N’en déplaisent à leurs zélateurs, certaines prétendues améliorations technologiques demeurent de jolis leurres…
3 questions à... Scarlett Johansson
Après Lucy (2013) et Her (2014), Scarlett Johansson incarne dans Ghost in the Shell de Rupert Sanders un nouveau rôle célébrant les noces de l’humanité et de la cybernétique. Propos recueillis lors de la conférence de presse.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?
Scarlett Johansson : C’est difficile de dire ce qui m’a attiré de prime abord… C’est un long processus entre le moment où l’on en a parlé, et celui où l’on a tourné en Nouvelle-Zélande. Ce n’était pas très évident pour moi de comprendre au départ comment on pouvait transposer un anime qui est déjà un chef-d’œuvre, et où trouver ma place. Le Ghost in the Shell de Mamoru Oshii est tellement introspectif et poétique, et cependant très froid... Je me suis demandée comment entrer dans ce personnage. Petit à petit, cette idée m’a hantée ; l’histoire est restée en moi. Quand j’ai rencontré Rupert Sanders, il travaillait depuis deux ans sur les visuels et on a commencé à parler. Nos conversations ont duré une année, et je me suis de plus en plus sentie investie émotionnellement dans ce personnage.
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Votre personnage investit un corps qui ne lui appartient pas. Est-ce une métaphore de votre métier d’actrice ?
Lorsque l’on est actrice et que l’on joue, il y a une connexion intense entre le corps et l’esprit — c’est d’ailleurs ce qui est le plus important. Je crois que notre instinct est l’outil le plus essentiel dans notre métier d’acteur. Bien sûr, le corps est un outil supplémentaire, celui avec lequel on communique. Les deux sont complètement en osmose.
Quelle trace mémorielle avez-vous conservée de ce tournage ?
J’apprends toujours quelque chose lorsque je tourne, en particulier sur moi-même. J’apprends sur mes limites, sur ce qui m’embarrasse. Ghost in the Shell a confirmé une chose que je crois profondément : il faut travailler avec des réalisateurs qui sont de vrais partenaires créatifs. Quand la connexion est impossible, le travail devient difficile. Sur ce tournage, il l’a été de manière intéressante, car il y avait des défis à relever. Comme Rupert aime les acteurs, il a pris le temps de faire des répétitions, de parler avec nous sur la manière d’aborder les scènes. Ça m’a confortée dans ma croyance que cette collaboration sur un plateau avec un réalisateur est absolument essentielle.
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