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Giovanni Anselmo, un pavé dans la mare du modernisme

Le MAMC de Saint-Étienne accueille l'artiste italien Giovanni Anselmo et son "art pauvre", mettant sans dessus dessous, ou plutôt sous tension, bien des idées reçues, des identités officielles et des totalités trop lisses pour être honnêtes. Jean-Emmanuel Denave

Ça y est, les vacances approchent et c'est l'heure du tri. L'heure de jeter les vieilles amours, les vieilles idoles, les vieilles valeurs avant d'aller brûler au soleil. Les amoureux de l'art iront, pour cela, à Saint-Étienne se défaire du mauvais romantisme, du mauvais modernisme et des insipidités d'un certain post-modernisme. Ces fadaises qui voudraient respectivement faire de l'art une religion, un formalisme, ou le dissoudre dans l'eau polluée de la vie quotidienne. Bref, qui voudraient qu'il tienne dans le cercle asphyxiant et rassurant d'un "tout" bien lisse et homogène, qu'il vienne boucher nos angoisses, décorer nos fissures, adoucir nos luttes...

Giovanni Anselmo (né en 1934 vers Turin) lance sur ces idées ses gros blocs de béton dispersés, projette à même le visiteur un "détail" d'humilité lumineuse, redonne des auras colorées à des monochromes gris et laisse filer en douce cette idée que, dans le fragment, il y aurait à la fois la possibilité et l'impossibilité de reconstruire un "tout". Qu'on pourrait à partir de quelques détails ou de quelques images égarées prendre conscience de quelque chose de plus universel, de plus "grand", mais qui jamais ne tournerait en rond en un système d'astres respectant de belles lois physiques ou métaphysiques.

Tensions

L'artiste a rassemblé au Musée de Saint-Étienne des œuvres de différentes périodes de sa carrière pour constituer une vaste installation emblématique de sa démarche, longtemps classée dans l'Arte Povera. Il publie aussi parallèlement un catalogue monographique largement consacré à une série d'oeuvres réalisées dans les années 1970 (et malheureusement pas présentées au musée) : les Tutto ("tout" en français).

Un Tutto, c'est cette inscription gravée ou tracée en deux parties sur des matériaux épars : le "tut" sur un morceau de plomb et le "to" sur une cimaise par exemple, ou encore sur une feuille blanche et sur le mur qui la soutient... «Au lieu de succomber au désir tout-puissant de capturer la totalité de l'existant, les Tutto conjecturent la présence d'un ensemble, mais en même temps le fracturent» écrit avec brio Gabriele Guercio.

Avec une simplicité désarmante, Anselmo nous montre qu'un ensemble quelconque, une totalité quelconque (qu'elle soit celle d'une œuvre d'art, de l'univers ou du sujet humain) à la fois se fonde sur et vise une fissure, une disparité, une disjonction. «L’œuvre d'art se définit à travers la tension générée par la découverte que l'identité, ce que l’œuvre est, au lieu de l'exclure, intègre la déchirure comme un de ses signes structurants.» Un catalogue à emporter en vacances pour affronter les échancrures de l'été.

Giovanni Anselmo
Au Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne jusqu'au 3 janvier

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