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La fin des années 80

Entretien / Jérôme Bouët, directeur de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) depuis un an. Propos recueillis par Dorotée Aznar

Vous êtes Directeur de la DRAC Rhône-Alpes depuis bientôt un an. Quels sont les projets que vous avez déjà pu mener à bien, notamment dans le domaine du spectacle vivant ?

Jérôme Bouët : Les projets sont inscrits dans une durée assez longue et je poursuis le travail engagé par mon prédécesseur. Sur la question du spectacle vivant, s'il y a une chose que je revendique, c'est d'avoir permis au Théâtre de la Croix-Rousse de devenir une Scène Nationale.

Pourquoi avoir soutenu la candidature du Théâtre de la Croix-Rousse ? Pensez-vous que ce choix soit pertinent tant au niveau de la situation géographique que de la programmation qui y est proposée ?

À Lyon, il y a finalement assez peu d'institutions soutenues et labellisées par le ministère de la Culture dans le domaine du spectacle vivant. Il y a l'Opéra, le Théâtre Nouvelle Génération, l'Orchestre, le Théâtre des Ateliers et Le Point du jour, mais il manquait dans tous les cas une Scène Nationale. Il y en avait dans toutes les grandes villes de France sauf à Lyon. Le Théâtre de la Croix-Rousse, du fait de son emplacement et de son histoire me semblait tout à fait approprié. La présence de Philippe Faure à la tête du théâtre a également joué car, à mon sens, il permet un développement important du théâtre grâce à une programmation de qualité mais en même temps très grand public. Et il même également un travail d'action culturelle avec le milieu scolaire et avec les prisons. Cela me paraît correspondre à l'activité d'une Scène Nationale comme il y en a déjà à Valence, à Annecy ou à Chambéry. La convention avec le Théâtre de la Croix-Rousse est-elle signée ? Le statut n’est qu’en préfiguration. Mais nous sommes en train de travailler sur une convention pour attribuer de manière définitive ce statut de Scène Nationale. Pour l’instant, il n’y a pas de changement révolutionnaire : nous avons donné un petit coup de pouce budgétaire. Pour moi, ce statut permet de conforter l'action à la fois d'un lieu et d'une équipe professionnelle de qualité.?Il n'y a pas eu l'idée de créer cette Scène Nationale en dehors de Lyon, dans la périphérie ??Non, car en périphérie il y a déjà beaucoup de structures : le Théâtre National Populaire à Villeurbanne, le Théâtre de la Renaissance à Oullins, le Toboggan à Décines, le Centre Chorégraphique National de Rilleux la Pape... Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de difficultés dans ces communes.D'autres théâtres lyonnais ont-ils fait la démarche pour obtenir ce label ?Non, il n'y a pas eu de proposition concurrente. Les travaux de rénovation du Théâtre National Populaire est l’un des grands chantiers des années à venir…?Oui, même si c'est un travail un peu invisible, on refait un théâtre à neuf. Le TNP reste pour nous l'un des principaux emblèmes de la décentralisation du théâtre en France. En termes de budget, c'est un chantier très important pour nous.?Dans votre action, le spectacle vivant est-il l'une des priorités ??Cela compte beaucoup car, avec le patrimoine, ce sont mes deux domaines d'action. Le spectacle vivant est un enjeu de création ; il faut aider les artistes et être garant de leur liberté ?artistique (même si je ne l'ai jamais vue menacée ici en Rhône-Alpes depuis que je suis là), et leur donner les moyens de leur activité. C'est donc un sujet d'occupation permanent.?Les moyens mis en œuvre sont-ils à la hauteur de ces ambitions ??Le budget 2007 n'a pas été trop mauvais, il y a même eu une petite progression. Sur le territoire de la ville de Lyon, nous avons dépensé 24 millions d'euros en 2007, soit plus qu'en 2006. Pour 2008, ce n'est pas encore décidé mais vu le contexte budgétaire global, ?avec le poids de la dette de l'état, le budget va être tendu.?La culture est-elle toujours considérée comme un sujet important ??Bien sûr, chaque chose est importante ; la santé est ?importante, la justice est importante, l'école est importante. Objectivement, ce n'est pas très facile de faire une place plus importante à la culture, même si on le souhaiterait. Politiquement, la ministre de la Culture, Madame Albanel a reçu une lettre de mission qui est par son contenu politique très tonique et très volontariste. Le gouvernement pense que l’on a fait beaucoup de choses en France et créé une offre culturelle très importante depuis vingt ou trente ans. En revanche la démocratisation culturelle, l’accès des publics à la culture n’est pas suffisant. Maintenant, il faudra voir ce que donne le budget, concrètement.?Quels sont les projets dans le domaine du patrimoine à Lyon ??Il n’y a pas de projet majeur en ce moment sur le territoire de la ville de Lyon. Nous avons une convention avec la Ville de Lyon pour aider à restaurer le patrimoine comme on l’a fait pour l’Hôtel de Ville par exemple. On verra si on renouvelle cette convention l’année prochaine. C’est plutôt dans la Région qu’il y a des projets de développement importants. À Lyon, l’un des sujets importants est l’avenir de la prison de Montluc, un lieu de mémoire majeur car Jean Moulin y a été incarcéré, tout comme de nombreux résistants. L’idée est de ?protéger une partie de la prison. Nous travaillons avec l’Université Lyon 3 qui a un projet d’utilisation de la prison qui sera libérée des prisonniers dans les mois à venir. C’est un projet qui symboliquement est important. En termes d’architecture, ce n’est pas un lieu extraordinaire mais c’est un lieu qui a une telle histoire que l’on ne peut que vouloir le protéger.?À quoi serviront les locaux de la prison ??À des activités d’enseignement, de recherche qui ne sont pas différentes de ce que l’université fait ailleurs. Bien sûr, c’est un sujet qui demande un peu de délicatesse. Vous avez déclaré, il y a quelques mois que la vie culturelle à Lyon était trop «institutionnalisée», vous confirmez ces propos ??Depuis, j’ai découvert de nouveaux lieux, comme la Friche RVI, les Ateliers Frappaz à Villeurbanne, que je souhaiterais d’ailleurs pouvoir accompagner davantage dans les années à venir. Mon jugement s’est donc un peu enrichi même si, à Lyon, le poids des grandes institutions comme l’Opéra et les grands théâtres reste très fort. On va voir ce que donne la candidature de Lyon au label de Capitale Européenne de la Culture et le projet que cela va amener. Il va également y avoir des élections, un nouveau mandat… Dans ce cadre-là, de nouveaux projets pourraient être intéressants. Par ailleurs, le Maire a parlé d’un événement autour du cinéma… En fait, je trouve que l’on manque encore un peu d’événements qui créent de la vie, du rassemblement dans la ville, qui rassemblent autour de l’art et des ?artistes.?Il s’agit de savoir de quel type «d’événements» on parle car à Lyon, l’événementiel est souvent parfois davantage valorisé que la culture…?Attention quand je dis «événement», je pense à rassembler les gens en dehors des murs de l’institution, dans des espaces qui ne sont pas faits uniquement pour la culture : des festivals par exemple. Et c’est ce qui manque selon moi. Évidemment, la période n’est pas la plus propice pour créer des événements à partir de rien. On peut parler d’une phase de découragement chez les artistes locaux… La situation budgétaire est difficile. La Ville a une politique d’aide aux petits lieux ce qui est très efficace et j’aimerais que l’on puisse aider la Ville à développer cela davantage. Quand on voit la masse d’artistes présents sur la scène lyonnaise, on se dit que c’est évidemment difficile. Même si la crise de l’intermittence est un peu passée, on voit bien que le contexte général n’est pas facile et que la situation de la diffusion est complexe. Les artistes qui ne trouvent pas leur place, cela reste un véritable problème.?Quelles solutions proposez-vous ? Nous mettons des moyens, même s’ils ne sont pas à la mesure des besoins. Mais l’une des solutions est qu’il y ait plus de public pour le spectacle vivant. Cela paraît a priori évident, pourtant certaines salles ne peuvent pas accueillir plus de public avec leurs moyens actuels. Je pense par exemple au Théâtre Nouvelle Génération qui est au maximum de ses capacités d’accueil…. On n’est évidemment pas dans une conjoncture de développement fort comme on a pu l’être dans les années 80. Nous sommes dans une conjoncture plus difficile et il faut se mettre dans l’idée que cela risque de durer un peu. Quand je dis que la solution c’est le développement du public j’y crois vraiment. La solution c’est l’éducation artistique à l’École, former les jeunes, les enfants. C’est un travail de longue haleine, Il faut que la télévision parle plus de spectacle et d’art et que l’on arrive ainsi à renouveler le public, ce qui n’est pas impossible. Il ne faut pas avoir une vision négative de la fréquentation ; la fréquentation du spectacle aujourd’hui en France est forte même si c’est assez irrégulier. Je ne pense que les lieux sont saturés.?

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