Retour au collège

Chouchou des bandes-sons de séries télés et autres gâteries adolescentes, Shout Out Louds a fini par se laisser aller, au fil des albums, dont le dernier "Optica", à calmer le (grand) jeu au bénéfice d’une pop de plus en plus sophistiquée mais toujours aussi efficace, digne des grands hits des college radios d’antan. Stéphane Duchêne.

On pourrait appeler cela l’effet The OC, du nom de la série américaine culte (autrement appelée Newport Beach par chez nous). Pour un groupe de pop indépendante, se retrouver à orner la bande-originale du programme qui révéla Adam Brody et Rachel Bilson (même si vous n’en avez pas conscience vous savez qui ils sont) valait alors amour adolescent, gloire et beauté.

Ce fut bien évidemment le cas des Suédois de Shout Out Louds, dont la pop romantique, chiadée, ensoleillée mais mélancolique (c’est une nuance tout aussi importante dans The OC qu’au royaume de Carl XVI Gustaf) avait tous les atouts pour figurer en bonne place aux côtés du gratin indé-pop mondial. Mieux, les Suédois ont fait un genre de grand chelem boutonno-branché en s’alignant au générique du post-Dawson One Tree Hill (Les Frères Scott en français, on appréciera là-encore l’acuité de la traduction) et du navet lycéen Prom – preuve que dans le domaine de la pop indé, séries télé et cinéma – n’oublions pas la pub – ont quasiment remplacés les college radios.

Est-ce à dire que la pop de Shout Out Louds est formatée ? Dans un certain sens oui, formatée sur les mêmes influences qui font le miel de tous ces programmes pour grands ados et n’auraient pas non plus déparé dans un roman de Breat Easton Ellis : The Cure, bien sûr mais aussi Death Cab for Cutie et Nada Surf inventeurs à eux seuls d’une esthétique de la pop traînante qui donne envie de regarder les étoiles en se tenant la main. Sauf qu’il faudrait plutôt parler, aussi paradoxal qu’il puisse paraître, de déformatage dans le cas d’un groupe qui a parfois donné dans l’emphase galvanisante et surexcitante de l’école Arcade Fire – oui, encore eux – et la surenchère d’hymnes rêvant, à peu près autant, si ce n’est plus de grands stades que Jean-Michel Aulas.

 

Briser la glace

 

On comprend donc mieux ce nom à valeur de raison sociale : «Hurle bien fort» ou quelque chose dans ce gout-là. Or, en parlant de goût, un peu dans le même esprit que ces Born Ruffians dont nous vous parlions la semaine passée – et dont il faut bien l’avouer on espérait sans doute trop – Shout Out Louds a, au bénéfice de quelques escapades solo de ses membres, décidé assez naturellement de cesser de jouer les fiers à bras pour calmer le jeu : jouer moins fort mais jouer mieux.

Au point de voir 14th of July, l’un des morceaux de leur dernier album en date, Optica, s’offrir un remix classieux et gracieux de ce délicat cœur d’artichaut qu’est leur compatriote Jens Lekman – dont l’ombre d’indécrottable romantique plane étrangement sur tout le disque – friand de petites rythmiques façon La Croisière s’amuse et d’arrangements de violons lacrimosa à un doigt (juste un doigt...) de la nunucherie – le Jens, on le refera pas et c’est comme ça qu’on l’aime.

En douceur, les hommes d’Adam Olenius – qui lors de la sortie du single Blue Ice ont offert en guise d’exemplaire promotionnel, un disque en glace voué à fondre après écoute – sont parvenus à la briser, la glace, à effacer ses élans trop grossièrement cold wave et pompiers à la fois, pour faire fondre jusqu’aux adolescents de séries télés branchouilles.

 

 

Shout Out Louds [+ Yeast + Pethrol]
Au Marché Gare, mercredi 9 octobre

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