Jacco Gardner : l'insomaniaque

Jacco Gardner + Benjamin Fincher

Épicerie Moderne

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Second album et concert lyonnais en deux ans pour le jeune Hollandais planant Jacco Gardner, la nostalgie musicale toujours chevillée à l'âme mais explorant d'autres territoires du spectre, pour ne pas dire du fantôme psychédélique. Stéphane Duchêne.

L'hypnophobie, qui donne son titre au tout récent Hypnophobia de Jacco Gardner, démiurge maniaque faisant tout lui-même, fait référence à la peur de s'endormir (ou d'être hypnotisé, ce qui revient à peu près exactement au même). L'hypnophobique ne craint pas le réveil mais la perte de conscience qu'induit l'endormissement. Autrement dit, il y a là quelque part, la crainte d'un lâcher prise dont on ne reviendrait pas.

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On reste donc bien en terrain furieusement psychédélique, puisque s'il est des expériences dont beaucoup ne sont pas revenus, soit parce qu'ils n'ont pas pu, soit parce qu'ils n'ont pas voulu, ce sont bien les expériences psychédéliques.

Lors d'un précédent article consacré au jeune batave obsédé par les sixties, nous faisions ainsi référence à la figure tutélaire de Syd Barrett, jamais redescendu de son arbre à LSD, pas plus qu'il n'est sorti de sa cage à folie. Étrange titre donc de la part d'un jeune gars qui n'a que le rêve, l'expérience de décorporation et le voyage mental dans le temps pour moteurs.

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Claustrophobie

D'ailleurs, cela peut paraître fou quand on connaît Cabinet of Curiosities, mais Hypnophobia est sans doute encore plus barré dans les limbes psyché que son prédécesseur.

Plus abstrait, plus cinématographique et cinématique, moins attrape-cœur aussi, il ferait presque penser à un équivalent musical et pop des exercices de style du cinéaste Peter Strickland, auteur de Berberian Sound Studio et The Duke of Burgundy, dans sa construction d'un univers vintage clos (et un peu vain) confinant à la claustrophobie temporelle, comme en témoignent des titres comme Grey Lanes ou Before the Dawn. On peut d'ailleurs rapporter le soin que Gardner met dans le son de ses disques et les instruments utilisés à l'univers sonore maniaque de Berberian.

Dans The Duke of Burgundy, l'une des deux amantes sado-maso aime à se faire enfermer dans un coffre pour dormir. On est donc bien loin et à la fois très proche de l'hypnophobie, car celle-ci est sûrement un peu espérée. Comme elle l'est sûrement par Jacco Gardner. Moins pour ne pas s'endormir que pour ne pas avoir à se réveiller dans une époque qu'il juge n'être pas tout à fait la sienne – c'est ainsi qu'à la manière d'Air ou Stereolab, cousins soudainement pas si éloignés, il ne voit le futur que dans le rétro. Au point de se boucler à double tour dans un coffre esthétique d'où l'on ne s'échappe, comme sur la chanson-titre, que pour explorer d'autres dimensions.

Jacco Gardner [+ Benjamin Fincher]
Á l'Epicerie Moderne jeudi 8 mai

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