Buridane : « Exprimer autre chose que ce que dit le texte »

Chanson / Après le succès d'un premier album, Pas fragile, empreint de dualité et de fausse légèreté, Buridane revient le 6 octobre avec un Barje Endurance viscéral et intense dans sa manière de sublimer par ses arrangements des textes à tiroirs toujours aussi profonds. Avant-première.

Il s'est passé cinq ans depuis Pas Fragile. A-t-il été compliqué de se remettre à l'ouvrage, après l'accueil positif que ce disque a reçu et la longue tournée qui a suivi, avec en plus l'enjeu que peut représenter un deuxième album dans ces conditions ?
Buridane : En termes de matière, ça n'a pas été un problème. J'ai commencé à écrire les chansons de Barje Endurance quand j'étais en studio pour le premier album. J'avais des choses à dire, j'avais 25 ans : c'est une période de la vie où il se passe beaucoup de choses, où l'on mûrit. La thématique s'est tout de suite axée sur la notion de transition, comme si j'avais déjà conscience que le premier disque n'était pas un aboutissement mais déjà le début d'autre chose.
Le plus difficile, c'était d'accepter la phase souterraine de création : fin 2014, j'ai commencé à faire moins de concerts. Cette disparition de la scène a été un peu difficile. Et il y a eu toute la phase de mise en œuvre du deuxième disque : bosser avec des réalisateurs, n'être pas satisfait, repartir de zéro à chaque fois... Convaincre les gens avec qui on travaille. Surtout que sur cet album, j'avais envie de faire les arrangements, ce que je n'avais pas fait sur Pas Fragile.

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Il semblerait qu'avec ces arrangements, beaucoup plus riches que sur Pas Fragile, tu as cherché à mettre davantage en évidence les aspérités et la gravité de tes chansons...
D'une façon inconsciente, oui. Les arrangements c'est ce qui définit la couleur d'un disque. Mais je voulais surtout exprimer via la musique autre chose que ce que dit le texte. Que la musique ne soit pas qu'un accompagnement. Sur un titre comme Bleu, il y a beaucoup de chœurs très aériens, alors que c'est un texte qui parle de la mort. Je ne suis pas forcément partie de la guitare pour écrire, mais beaucoup de la rythmique. C'est ce qui avait été légèrement gommé sur Pas Fragile, dont on a surtout retenue une forme de légèreté. C'est comme si j'étais passée de l'adolescence à l'âge adulte. À l'adolescence, on a beaucoup de choses en devenir qu'on ne parvient pas à exprimer. À un moment, ça devient plus clair et plus facile de dire « en fait, ce que je veux, c'est ça. »

Dire « ce n'est pas ça que je veux », ce n'est pas suffisant. C'est ce que j'ai gagné en vieillissant.

Tu parlais plus haut de la notion de transition, qui donne son titre au morceau qui ouvre le disque d'une manière assez épique. La transition peut évoquer quelque chose de personnel mais aussi quelque chose, peut-être, de plus général. Qu'en est-il ici ?
Je me suis aussi interrogé sur le fait – même si c'est plus visible en période électorale – que notre pays est dans une phase qui marque la fin d'une période. Le temps que quelque chose d'autre se mette en place est très long. Je me demandais si cela influençait l'imaginaire intime, si c'était l'inverse ou si c'était un aller-retour permanent. Quand on évolue dans une période un peu trouble, avec des choses qui disparaissent et des choses qui se réinventent mais qui ne sont pas encore solides, on est un peu tous en questionnement. La Transition, ça parle de cette dimension-là. Après seulement, on peut la réduire à nos histoires intimes et personnelles.

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Et le titre de l'album, Barje endurance ?
Ça évoque la résistance qu'on a à endurer des situations pas très confortables. Une résistance qui peut être une force, mais qui marque la limite entre se dépasser et s'abîmer. C'est très flou et ça nous échappe un peu. C'est une question qui me fascine et qui m'interroge.

L'expérience de ta longue tournée après le premier album a-t-elle changé des choses dans ta manière d'aborder ce disque ?
Je n'y avais pas pensé mais je me rends compte que oui. Parce que passer du guitare voix au fait de chanter avec un groupe oblige à évoluer. Et aussi à se rendre compte de tout ce qu'il est possible de faire musicalement. Ce champ des possibles, je commence tout juste à l'approcher avec cet album.

Buridane, Barje Endurance (Musique Sauvage / PIAS)
Sortie le 6 octobre

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