Les Jours sans : Micah P. Hinson au Groom

Micah P. Hinson + Pepe Ly

Groom

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Folk / Créature folk aux blessures incurables, l'étrange Micah P. Hinson revient avec...Presents the Holy Strangers, "opéra folk moderne" sur le thème de la guerre aux airs de requiem dépouillé à la beauté spectrale. Moment de grâce suspendue en perspective sur la scène du Groom.

Le morceau introductif (The Temptation) s'avance comme un cortège mortuaire, rappelant le clochard céleste texan Josh T. Pearson dont la voix semble ensuite apparaître sur The Great Void ("Le grand vide") tout en glissando de steel-guitar et crin-crin de fin de bivouac post-apocalyptique. Puis une "allée des amoureux" (Lover's Lane) se mue en Purgatoire romantique où l'on croise (un avatar de) Johnny Cash chantant des tourments infinis : « You're just a girl of my dreams but it seems that my dreams never come true. »

Bienvenue chez les morts-vivants condamnés à aimer dans le vide. Bienvenue chez Micah P. Hinson, spécimen cryptozoologique – il n'y a qu'à voir sa carcasse de sauterelle empêchée, lunettée façon Elvis (Costello) – qui charrie ses blessures (une enfance évangélico-texane courbatue d'ennui, une sortie de route en van lors d'une tournée en Espagne qui le priva un temps de l'usage de ses membres) mais donne toujours l'impression de gratter les cicatrices des autres. Preuve encore sur le déchirant Oh, Spaceman qui laisse entendre mimétiquement toute la détresse entrevue chez feu un autre fracassé, Vic Chesnutt, tandis qu'un bébé pleure au fond de la pièce et qu'un accordéon sanglote.

Requiem pour un opéra

Nous sommes donc ici sur le dernier album du crooner country zombie d'Abilene, ...Presents The Holy Strangers (qui pourraient être les pairs précités), défini comme un « opéra folk moderne sur une famille en temps de guerre ». De quoi laisser supposer qu'on ne risque guère d'y danser le quadrille autrement qu'avec des béquilles. Et à vrai dire, la chose, qui alterne chansons à se damner et instrumentaux d'une simplicité horriblement évangélique (The War : un piano lancinant, un métronome, des cordes pincées) a moins des airs d'opéra que de requiem millénariste.

Encore moins d'opéra bouffe car ici on crève la dalle et les orchestrations parfois lumineuses des précédents albums sont tenues sous le joug des ténèbres et du rationnement : quelques cordes grinçant dans la pénombre, là un synthé en lévitation spectrale et cet écho bouleversant dans la voix caverneuse ou parasitée de Micah.

Toutes choses résumées sur des titres comme The Darling ou le mal nommé The Last Song, qui se traînent et s'étirent comme un amour qui ne veut pas mourir, un album qui ne voudrait pas s'éteindre. Le sentiment que les guerres, fut-ce contre les ténèbres du Moi, ne finissent jamais vraiment.

Micah P. Hinson
Au Groom le samedi 21 octobre

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