The Inspector Cluzo : du circuit court au court-circuit

THE INSPECTOR CLUZO

Ninkasi Gerland

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Rock débranché / Agitant une version acoustique de son dernier album, The Inspector Cluzo déshabille son blues-rock AOC pour sublimer sans artifice sonique l'artisanat d'un songwriting fiévreux.

Il fut un temps où l'album acoustique était dans une carrière pop un jalon à poser, une médaille à arborer. La chaîne MTV, qui fit à la musique autant de bien que de mal — « What is this fucking MTV ? » hurlait pour lui-même l'incorruptible critique Lester Bangs —, s'autoproclama gardien d'un temple qui se mit à convoquer dès 1989 des concerts — filmés — d'idoles invitées à renier la fée électricité. Dont certaines, de Bruce Springsteen à Shakira, d'Alanis Morrissette à Korn, accoucheraient de disques plus ou moins utiles.

Même le ronchon Bob Dylan accepta de couper la sono branchée sous des cris de haine un soir de 1965 à Newport. Si vous passiez dans MTV Unplugged, vous étiez une star et si vous étiez une star alors il vous fallait venir offrir votre empreinte acoustique à ce Walk of Fame d'un nouveau genre.

Lequel fut définitivement sanctifié en 1994 quand le Christ grunge Kurt Cobain — apostat sacrificiel du show business — choisit de s'immoler pile entre l'enregistrement et la sortie de l'Unplugged nirvanesque, élevé pour cette raison en relique, en testament, en manuscrit de l'amer mort. Et la chose devint un genre.

Retour à la terre

Que cela ne nous empêche pas de saluer la démarche du duo The Inspector Cluzo, ces deux types à la double vie qui passent une moitié de leur année à élever des canards et l'autre à faire lever les foules.

Car les deux agro-rockers à la geste sonique ont choisi eux aussi de s'offrir dans le plus simple appareil. Non pour enrichir vaguement de quelque fantaisie une réédition deluxe mais pour payer un tribut — révélé lors d'une épique tournée aux confins de l'Amérique profonde — à des racines musicales solidement ancrées dans la terre — on y revient toujours les concernant. Soit ce blues diabolique irriguant le Delta et ce folk habité qui n'est autre que la main droite du diable blues.

Voici donc, gratté à même le nerf et le cul dans la paille, Brothers in Ideals, une version bio de leur We the People of the Soil à peine attifé de quelques cordes et épinglé d'un Wurlitzer. Où éclate dans un élan paradoxal la sève bouillonnante des Gascons portée par l'organe vibratile de Laurent Lacrouts (terrestre, donc).

Et l'on peut légitimement penser que si Cluzo s'est prêté à l'exercice, forcément immortalisé à Nashville, c'est parce qu'y brillait la promesse de l'emmener sur la route pour une poignée de concerts exceptionnels éclairés à la flamme brute de l'intimité. Soit l'exacte inverse d'un M('as)T(u)V(u) Unplugged.

The Inspector Cluzo Unplugged
Au Ninkasi-Kao le dimanche 9 février

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