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Corps et têtes brûlés
Photo : Spiegel (c) Jean-Pierre Stoop
À lier / La danse c'est aussi quelques chorégraphes barrés qui tordent et remuent le corps en tous sens pour mieux dégoupiller l'âme. Passage en revue de nos têtes brûlées de prédilection. Jean-Emmanuel Denave
À la poubelle donc virtuosité, technique, hiérarchies, séparation scène-public ; place au grand plan d'immanence deleuzien où le flux du vivant traverse en zig zags les corps de ceux qui montrent autant que les corps de ceux qui regardent (les nôtres donc). D'ailleurs avec ce diable de Bel, on ne sait parfois plus très bien qui regarde et qui s'expose. Le chorégraphe ne s'arrête jamais à la stase critique, mais continue, propose, construit : Show must go on ! Un mot de (dés)ordre qui est aussi le titre de son chef-d'œuvre créé en 2001. Vingt interprètes y suivent, quasiment mot à mot et pas à pas, une quinzaine de tubes pop-rock ou de variétés (David Bowie, les Beatles, Nick Cave, The Police, Paul Simon, Edith Piaf...), cassent les idoles, sollicitent le public, le font rire, le dérangent, l'éclairent en mauve, l'émeuvent. Une pièce inouïe, renversante. De là à la transmettre à un corps de ballet, il fallait être carrément gonflé : mais le chorégraphe l'est et le Ballet de l'Opéra Lyon aussi (souvenons-nous de ses égarements géniaux dans les pièces atypiques de Pierre Droulers, Tere O'Connor, Sarah Michelson...). Rendez-vous donc à l'Opéra du 18 au 20 septembre pour un Show qui s'annonce brûlant ! On citait Gilles Deleuze à propos de Jérôme Bel, le philosophe (son devenir animal, son devenir femme) pourrait aussi servir de boussole pour la dernière pièce de l'indomptable Mark Tomkins, Animal Femelle (aux Subsistances du 20 au 24 nov.). En 2005, le chorégraphe présentait à Lyon Animal tout court, mettant en scène et en ring quatre interprètes mâles, lutteurs jouant et déjouant les rapports de force humains, la tyrannie du verbe, l'épuisement physique ; et au milieu desquels Mark Tompkins officiait lui-même en maître de cérémonie dégingandé, petit dictateur sadique ou chanteur frappadingue de ses propres compositions. Cette fois, il sera confronté à quatre lutteuses femelles, ça promet.
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