« "À voix haute" est un documentaire militant dans une société en crise »

À voix haute - La force de la parole
De Stéphane De Freitas, Ladj Ly (Fr, 1h39) documentaire

Interview / Comment communiquer ? Dans une époque dominée par les réseaux sociaux où la question semble ridicule, Stéphane de Freitas et son film "À voix haute" pointent les béances d’un système éducatif excluant en se centrant sur le concours "Eloquentia", qui vise à élire « le meilleur orateur du 93 ». Discussion sans paroles en l’air en compagnie de son "personnage principal" Eddy Moniot, et critique d'un documentaire plein d'espoir.

Quel était votre point de vue pour filmer cette jeunesse actuelle ?

Stéphane de Freitas : Faire un film sur la formation aurait été un travers mais j’ai choisi d’inclure le concours pour en faire un objet cinématographique. Je me suis tout de suite imaginé Le Cercle des poètes disparus en référence, notamment avec les cours de Bertrand Périer [avocat et rhéteur – NDLR] : c’est un petit peu le Robin Williams du 93 (rires).

À voix haute est un documentaire militant dans une société en crise où l'on arrive plus à se parler. Pour que le spectateur s’amourache de ces jeunes, j’ai construit le film comme une colonne vertébrale, avec des émotions précises, déclenchées à des moments-clés.

Que pensez-vous de l’idée qui jalonne le film : “la parole vient avant l’écrit” ?

Eddy Moniot : Elle vient avant l’écrit lorsque vous êtes au pied du mur et qu’il faut défendre ce qui compte, sans avoir le temps de faire un roman. Cependant, un roman peut être aussi puissant. Le film ne dit pas que la parole est meilleure que l’écrit, mais qu’elle est importante et que tout le monde peut apprendre.

On parle plus qu’on écrit. Quand on lit une rédaction, on n'a pas forcément l’intention derrière. Si je fais un post sur Facebook pour dire que c’est très important de dialoguer, des gens vont peut-être mal le prendre car je n’aurais pas pu mettre l’émotion dans ma voix. Être écrivain demeure peut-être plus compliqué qu’être orateur.

Pourquoi sortir le film durant une année électorale, remplie de crispations identitaires ?

SF : Cela faisait trois ans que je voulais faire ce film. La société a commencé à se crisper de plus en plus et la tension sur la liberté d’expression a augmenté. Je voulais donner un message d’espoir allant à contre-courant des clivages politiques, religieux ou sociaux. Le but est de se comprendre.

Avec cette sortie, on tient le cap jusqu’au bout. Le film aurait pu concourir à Cannes et ça aurait été super pour l’équipe, mais nous avons préféré accélérer la sortie, une semaine avant l’élection présidentielle, pour en faire un acte militant. Son exploitation se déroulera durant cette période précise. C’était une opportunité qu’on ne pouvait pas laisser passer.

Avec votre association Indigo, avez-vous d’autres projets sur l’éducation ?

SF : On développe en ce moment un réseau social d’entraide, indépendamment d’Eloquentia. Lorsqu’on a créé le concours à l’université de Saint-Denis, les élus du conseil général étaient là et avaient vu qu’on rassemblait, de Kery James à Michèle Laroque en passant par Aymeric Caron, des gens de l’anti-système et des médias, de droite comme de gauche... Ils m’ont demandé ce qu’on pourrait faire dans les collèges de Seine Saint-Denis. Du coup, les anciens vainqueurs du concours comme Eddy s’y rendent pour transmettre la méthodologie et le savoir-faire.

Pourtant, le gros de notre activité dans l’association, ce n’est pas le concours, mais les collèges du 93. La philosophie Eloquentia a suscité des intérêts dans les institutions ou les ministères qui cherchaient à savoir comment créer cette atmosphère saine. Il y a une pédagogie qui est composite dans la prise de parole, que ce soit à travers le discours, le jeu ou le rap.

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Mercredi 5 juillet 2023 Alerte orange au Puy-en-Velay du 17 au 23 juillet : des rafales venant des 4 coins du monde sont à prévoir. Veillez à vous munir d’appuis bien solides, vous (...)
Vendredi 7 avril 2023 Suite à une expérience visant à réguler la température de la planète, la Terre subit des chaleurs extrêmes qui détruisent la quasi-totalité du monde comme nous le (...)
Jeudi 5 janvier 2023 Une silhouette élégante de nonce apostolique ou de clergyman gravit des escaliers. « Ne vous y fiez pas, il est très drôle, il faut juste le lancer » nous glisse Louis Garrel juste avant notre entrevue avec Michele Placido qui vient de le diriger...
Lundi 5 décembre 2022 Le premier fils, Dimitri, impétueux, sanguin et violent, est le rival de son père, entiché de la même femme que lui. Le second, Ivan, cynique intellectuel athée (...)
Mardi 22 novembre 2022 Chaque mois, Le Petit Bulletin vous emmène à la découverte d’une structure de diffusion culturelle du département. Concerts, théâtre, danse, expos… Il y a forcément un lieu qui vous attend quelque part ! Aujourd’hui, rendez-vous au Château du...
Jeudi 3 novembre 2022 Pour mieux connaître le Petit Bulletin, découvrez ce que ses journalistes écoutent : chaque semaine, un membre de l'équipe partage avec vous sa playlist du moment! Aujourd'hui, Anaïs, notre journaliste-testeuse-des-chouettes-endroits-où-manger, nous...
Mercredi 14 septembre 2022 La préfecture de Haute-Loire s’apprête une nouvelle fois à se parer de ses plus belles plumes, pour les traditionnelles fêtes du Roi de L’Oiseau. L’occasion d’un dépaysement total, au gré des déambulations dans les méandres du passé. En route !
Jeudi 29 septembre 2022 Avec ses paysages sonores qui racontent les grands espaces, le feu, le froid, les hommes et les âmes planantes, uRYa est un pur passeur d’émotions. Venue (...)
Mardi 13 septembre 2022 Dans le cadre des Cafés interculturels coorganisés par le Solar et l’École de l’Oralité, trois grands maîtres nippons illustrent le Japon traditionnel aux côtés (...)
Mardi 6 septembre 2022 Une femme aimante et disponible, un mari charmant et brillant : que pourrait-il arriver à ce couple en apparence parfait ? C’est l’intrigue qui rythme (...)
Mardi 5 juillet 2022 Depuis des lustres (1988 pour être précis), Craponne-sur-Arzon fait figure de référence sur la planète Country Music. Mais après quelques éditions compliquées et à (...)
Mardi 26 avril 2022 Le confinement, c’est loin. La preuve, vous avez arrêté de faire votre pain. Par chance, d’aucunes en ont fait leur profession.
Mardi 26 avril 2022 La Ville de Lyon et la Métropole réglementent l’offre en matière de logements meublés touristiques longue durée dans un hyper centre lyonnais assez large. Excellente nouvelle pour les habitants.
Mardi 26 avril 2022 Toujours là, ces types en costards Paul Smith et pompes en cuir qui brille. Toujours là, ces poignées de mains viriles à qui serrera le plus fort. Toujours là, (...)
Mardi 26 avril 2022 De confinements en couvre-feux, la pandémie aurait presque fait oublier qu’un festival de musiques est avant tout un temps de convivialité partagée, entre amis, dans une foule de mélomanes raisonnablement...
Mardi 26 avril 2022 Fruit du travail de bénédictin d’un homme seul durant sept années,  Junk Head décrit en stop-motion un futur post-apocalyptique où l’humanité aurait atteint l’immortalité mais perdu le sens (et l’essence) de la vie. Un conte de science-fiction avec...

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X