Mickaël Furnon, à la ville comme au chant

Il s’affiche partout en ville et ne veut vivre qu’à la campagne. L’auteur, compositeur, interprète et guitariste forézien, connu comme Mickey (3d), n’aime pas les concessions mais plutôt écrire des chansons, sans qu’on lui pose des questions. Florence Barnola

« Tu verras, Mickey, il est cool ». Cool ? « Ouais, il est cool ! Je l’ai rencontré plusieurs fois, il est super », me lance enthousiaste un collègue. Pour son comeback, et pour le concert d’ouverture de l’Euro à Saint-Etienne qu’il fera le 10 juin, nous lui consacrons un portrait à Mickey… Une silhouette surgit de derrière le cortex : des yeux immenses, une tête ronde, pas de sourcils mais un large sourire, les bras levés prêts à embrasser, gants blancs, chaussé de souliers jaunes, vêtu de son éternel short rouge laissant passer sa fine et longue queue aussi noire que ses oreilles protubérantes… Mauvaise pioche, exit Mickey la souris enthousiaste et expansive.

Place à Mickael Furnon dit Mickey, ou Mick, 45 ans, Montbrisonnais d’adoption, aujourd’hui forézien indécrottable. Il a commencé à faire de la musique dans les années 80 parce qu’il était fan de Cure, a écrit depuis une pléthore de chansons pour lui et pour d’autres, chante et s’accompagne à la guitare, est connu et reconnu, sort après 6 ans de silence (enfin presque) Sebolavy… Difficulté : il n’adore pas les interviews.

Rendez-vous est pris aux Pénitents, vendredi 11 mars, 16 h, pour une conférence de presse avant ses trois concerts dans la salle montbrisonnaise.

Objectif Mickey !

Sur l’autoroute menant au théâtre, me revient l’air d’un tube que j’avais oublié et pourtant adoré quinze ans en arrière, tiré de l’album La Trêve, « Jeudi pop pop, on va enfin se retrouver, on ira au cinéma… ». Le lecteur de CD égrène au fil des kilomètres les succès de Mickey. Il chante en solo, en groupe, en duo : « Dis Birkin, pourquoi tu vas marcher dans la gadoue alors que ça salit tes bottes ? Je m'appelle Jane et je t'emmerde. Toi tu ne t'appelles pas Tarzan. Tu t'appelles Mickey, je t'emmerde. Moi je ne m'appelle pas Minnie.» La souris lui colle à la peau et pourtant il semble n’avoir rien pris d’elle. Des homonymes antonymes.

Parking de la place Pasteur. J’ai une heure d’avance. C’est ballot. Montbrison est une jolie petite ville, j’imagine le jeune Mickey courant dans les rues pavées, allant chercher du fromage dans cette boutique dont la réputation dépasse les frontières de la ville… Un PMU, j’entre. Je scrute les murs… Il paraît qu’à ses débuts il écumait les bars et restaurants de la région pour donner des concerts. Pas de photos, ni de sous-bocks dédicacés, je regarde l’heure, le moment est venu de le rencontrer.

Mickey ne force pas la bonne humeur mais ne paraît pas être de mauvaise.

Sur les lieux, je tombe sur son tourneur. Bertrand Aubonnet, stéphanois, valentinois et parisien, travaille avec Mickey depuis 1998 et l’album Mistigri Torture : « Je trouve qu’il a évolué énormément avec son dernier disque. Cet album a mis 7 ans pour arriver, c’est une vraie cure de jouvence. Il bascule dans quelque chose de plus moderne, la façon de chanter est une prise de risque sur les arrangements… Pour moi, c’est un nouveau Mickey 3d. Ce n’est pas seulement un album social, je le trouve surtout joyeux. » Joyeux ? Optimiste le Bertrand. Et sinon il est cool Mickey ? « C’est un garçon discret, je l’appellerai un gentil ours ».

Jeans, pull rouge, écharpe grise, il arrive. Décontracté, calme, détendu, pas rasé, il serre la main à tous autour de la table puis s’assoit. Mickey ne sourit pas. Impassible. En concert, à la télé, sur le marché, dans une salle d’attente, devant un guichet SNCF, il est égal à lui-même. Mickey ne force pas la bonne humeur mais ne paraît pas être de mauvaise.

« J’ai été opéré des intestins parce que je m’ennuyais… »

« Vous attendez une déclaration officielle ?! » lance-t-il au collège de journalistes dont certains se demandent si c’est du lard ou du cochon, « Merci à tous d’être venus, c’est vachement bien, ça m’évitera de courir dans tous les sens pour faire plein d’interviews, surtout que je vais être pas mal sur la capitale et sur la route pendant un moment. » Du cochon pince-sans-rire. « C’est super sympa de vous êtes déplacés jusqu’à la charmante petite bourgade de Montbrison pour venir poser quelques questions. » Et du lard sarcastique. Il a légèrement l’accent du coin, on se sent à la maison, on humerait presque la soupe aux poireaux.

« Je n’aime pas en promotion qu’on nous demande d’expliquer des chansons

Sept ans sans album… « J’avais pour l’habitude de sortir un disque tous les deux ans. J’ai passé une période où je ne supportais plus trop d’entendre ma voix donc j’ai fait d’autres trucs. J’ai écrit pour Zaz, Vanessa Paradis… J’ai fait du rock avec mon ancien groupe 3dK pour le plaisir. J’ai été opéré des intestins parce-que je m’ennuyais… » Son œil frise, imperceptiblement, on le sent en confiance. « Après je m’y suis remis, et c’est revenu. J’ai travaillé avec un copain qui habite à Toulouse, Thierry Bon, j’ai gardé quatre ou cinq de nos collaborations sur l’album, comme François sous la pluie. »

C’est un fidèle Mickey, il travaille avec les copains… « Ce sont des copains qui savent faire, qui sont compétents, donc on fait de la musique ensemble. C’est comme ça, c’est naturel. Il faut qu’il se passe quelque chose humainement. J’aurais du mal à partir en concert avec cinq personnes que je ne connais pas. » Sebolavy, album de la maturité peut-être, la crise de la quarantaine passée. « Je n’aimais pas au lycée les explications de texte, le pourquoi du comment Rimbaud a écrit Le Dormeur du val. Je n’aime pas en promotion qu’on nous demande d’expliquer des chansons ».

Dans quelques heures, il chantera à guichets fermés, sur une scène qu’il connaît bien. Il n’est pas stressé. « Ce n’est pas comme chanter au Stade de France. Ce que je ne ferai jamais. J’irai quand l’ASSE sera en finale de Coupe de France ». Une équipe de M6 l’attend pour l’interviewer, puis il fera les balances… Je tente une approche, Mickey s’éclipse. Je me tourne vers Bertrand. C’est possible de parler à Mickey 10 minutes de plus ? « Là, ça va être compliqué. Appelez-moi lundi, je verrai avec lui pour caler une interview téléphonique. Pour un journal de sa région, c’est sûr il fera l’effort. »

Après plusieurs jours d’attente, Mickey fatigué de sa semaine de promotion à Paris, n’a pas souhaité être contacté. Je pense alors à la souris, tout aussi insaisissable, mais au moins elle sourit.


Mickey en dates

31 juillet 1970 : Naissance à Saint-Étienne
Jusqu’en 1984 : Réside au Puy-en-Velay
1984 : s’installe à Montbrison avec sa famille
1988 : création de 3dK
De 1995 à 1998 : sortie de trois albums avec son groupe 3dK : Imminent Revolution Act, KoanZen, Play Station
1996 : Lancement de Mickey 3D
1998 : Mistigri Torture
2001 : La Trêve
2003 : Tu vas pas mourir de rire
2004 : Live à Saint-Étienne
2005 : Matador mais aussi Glamour (Avec NopaJam)
2007 : Les Chansons perdues (album solo)
2009 : La Grande Évasion
1er Avril 2016 : sortie de Sebolavy
10 juin 2016 : concert d’ouverture de l’Euro à Saint-Étienne

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