Michel Granger : « Pour Oxygène, Jarre a été gonflé de prendre un dessin écolo »

Jean-Michel Jarre

Halle Tony Garnier

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L'homme derrière les pochettes / Le peintre et illustrateur Michel Granger est indissociable de l’univers de Jean Michel Jarre : il a en effet signé les plus fameuses pochettes du compositeur depuis l’album fondateur Oxygène (1976). Histoire d’une rencontre et d’une amitié…

C’est votre aquarelle Oxygène qui a donné son nom à l’album de Jarre. Elle préexistait donc à sa musique ?
Michel Granger
: Oui, elle avait été publiée dans le journal Pilote en 1972. Je l’ai ensuite présentée à la galerie Marquet, rue Bonaparte à Paris, où j’exposais en compagnie d’un groupe de dessinateurs : André François, Topor, Folon… C’est là que son épouse de l’époque, Charlotte Rampling, a acheté l’original pour lui offrir. Peu après, la dame de la galerie m’a dit que quelqu’un voulait me voir : c’était Jean Michel. Le 15 septembre 1976 à 17 heures — mon calepin est formel (sourire) — nous nous sommes rencontrés pour un projet de couverture de disque. J’ai dû refaire le fond de cette aquarelle qui était en 21x29, 7 pour l’adapter au format carré de la pochette… et depuis 40 ans, Jean Michel l’utilise.

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Auriez-vous spontanément associé votre travail à son univers ?
Je n’aurais jamais fait un truc comme ça pour un album de musique — je n’y aurais même pas pensé ! Jean Michel a été gonflé, quand même ! Une tête de mort, à l’époque… C’était les débuts de l’écologie ; les dessins écolos n’existaient pas. C’est peut-être pour cela que ça a fonctionné : c’était un peu précurseur…

Impossible d’imaginer aujourd’hui sa musique sans ce “visage” graphique…
C’est ça qui est incroyable ! Ça m’échappe… Et plus le temps passe, plus j’ai une profusion de messages sur Facebook se rapportant à Oxygène : « J’ai passé ma jeunesse avec ça ; je l’ai découverte quand j’avais deux ans, etc. » Cette image fait partie de l’histoire des gens. Certains se la sont faite tatouer dans le dos — j’ai les photos ; je les garde toutes, c’est complètement dément ! L’image est devenue iconique grâce à la musique.

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Vous avez naturellement enchaîné sur Équinoxe (1978).
Équinoxe, c’était plus compliqué, car on n’avait pas le titre. J’essayais de travailler en fonction de ceux que Jean Michel me donnait, mais ça ne marchait pas du tout. Un jour, j’ai pris mon carrousel de diapos, et je suis allé le voir chez lui, à Bougival. Quand il a vu l’image Le Trac projetée, il a dit : « c’est ce qu’il me faut ! » Mais le titre Équinoxe, je n’y suis pour rien ; je ne sais pas qui l’a trouvé… L’histoire nous a en tout cas prouvé que c’était toujours mieux de travailler à partir d’une image existant auparavant.

Comment s’est poursuivie ensuite votre collaboration ?
J’ai dû réaliser environ huit pochettes pour Jarre, sans compter toutes les adaptations : Oxygène, Equinoxe, Oxygène 7-13, Chronology, Rendez-vous, Oxygène 2… Quand on voit les concerts de Jarre, tout son support graphique part de mes images — je ne sais même pas s’il en est conscient, mais tous les ronds et les cercles, ça sort d’Équinoxe. Il y a un mois, on a déjeuné ensemble et il m’a proposé de signer la pochette d’Oxygène 3D sur lequel il travaillait. Je lui ai suggéré de fouiller dans mes trucs, mais il tenait à garder l’image d’origine, parce que c’était son support graphique — « je vis toute la journée avec elle ». Alors il a fait faire une adaptation — avec mon accord, évidemment.

Vous restez en bons termes, donc…
Oh oui, on a une grande complicité. Ma relation avec Jarre a toujours été profonde ; distante, mais familiale. Quand on s’est vus l’autre jour, on était quand même deux mecs de presque 70 balais au restaurant… 40 ans sont se sont écoulés, aussi bien pour lui que pour moi (rires) ! Ce que j’ai réalisé avec lui, c’est plutôt bien dans ma vie d’artiste. À l’âge qu’a mon fils aujourd’hui, 29 ans, on a trouvé tranquillement dans ma piaule un titre qui a fait le tour du monde, sans doute grâce à notre naïveté. Et sans agence, ni conseil. D’ailleurs, c’est dès qu’il y a eu des conseils que ça a merdé : quand ils ont commencé à me dire : « il faut mettre du rouge dans le fond parce que le vert ne va pas ».

Vous arrive-t-il de travailler en écoutant sa musique ?
Non, je l’ai écoutée à l’époque. Aujourd’hui, cela m’arrive de temps en temps par nostalgie, pour le plaisir, mais très peu souvent. J’écoute toutes les musiques, avec une petite préférence pour la musique extra-européenne, indienne, sud-américaine ou africaine — et Vivaldi, aussi. Mais en fin de compte, je travaille surtout en silence. Lorsque je dois exécuter une grande toile technique qui ne nécessite pas de réflexion, alors là je peux prendre des musiques qui m’aident physiquement. Mais sinon, la musique, c’est quand c’est fini. J’aime pas trop mélanger les genres (rires).

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