Loyer étudiant, ma douleur

logement / La question du logement étudiant, sur Grenoble particulièrement, est un mauvais running gag aux implications épineuses. Entretien sur le sujet avec Delphine Grand, responsable du Centre régional d'information jeunesse de Grenoble. Propos recueillis par Bernard de Vienne

Quelles sont les missions du CRIJ ?Delphine Grand : Notre rôle est de donner une info la plus neutre, précise et actualisée possible sur tout ce qui touche la jeunesse. On est mieux qu'Internet ! Nous proposons des offres de logement et de job tout au long de l'année, et de l'information sur les droits des étudiants, le service d'affichage est en libre consultation et sans frais pour les proprios et les étudiants. Beaucoup de gens qui cèdent leur bail ou cherchent un coloc mettent des annonces chez nous. Et on a tout un volet info générale, défense des étudiants, où rechercher des annonces. Nous aidons aussi les étudiants étrangers dans leurs démarches. En ce moment, tout le monde est à peu près rentré, mais il y en a encore des personnes qui cherchent : des gens s'en vont, d'autres quittent une colocation qui se passe mal, certains ne sont pas satisfaits des logements en cité U et veulent partir. C'est pour ça qu'on fonctionne toute l'année. On ne sait pas combien d'étudiants ont recours à nous. On sait que les proprios sont contents du service, qu'ils reviennent. Pareil pour les étudiants, ils peuvent revenir pour un job après avoir trouvé une chambre. En quoi est-ce plus compliqué de se loger pour un étudiant étranger ?C'est un de nos soucis. Ils n'ont souvent pas de garant même si les parents sont riches, puisqu'il faut un garant français. J'ai même vu des étudiants prêts à avancer le loyer de toute une année, et se voir refuser un logement! Que demander de plus ? Des étudiants passent leurs coups de téléphone depuis notre bureau et on entend les réactions des propriétaires : Ils demandent quelles études font les gens, préfèrent une fille à un garçon... Certains sont ouvertement racistes et n'ont pas honte de dire, “je ne veux pas de noir, pas de chinois, etc...“. Les étudiants étrangers deviennent des proies pour des propriétaires de logements insalubres, loués illégalement. Certains reviennent de visite après avoir lu une annonce chez nous, et nous préviennent que telle offre est en fait une cave. Il faut en parler, sinon quelqu'un d'autre finira par la louer. Quels recours existent contre ce type de propriétaires ?Il est possible de porter plainte, des structures telles que la Confédération Nationale du Logement (CNL), qui protège aussi bien les locataires que les proprios, ou l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV), peuvent aider les plaignants dans leurs démarches auprès de la justice.Comment améliorer l'offre de logement locatif ?La région s'apprête à rénover des logements Crous, l'État a mis en place la garantie universelle du risque locatif : ça frémit, certaines choses bougent. À l'heure actuelle le système Locapass permet théoriquement, grâce au 1% logement, l'avance de la caution et fait office de garantie. Mais certains proprios le refusent. Le problème, ce n'est pas le manque de logement puisqu'on a des annonces toute l'année. Ce sont les prix qui sont devenus exorbitants : aujourd'hui un studio c'est 400 euros en moyenne, une colocation environ 350 euros. Pour une chambre chez l'habitant il faut compter 250 euros, soit 100 euros de plus qu'il y a deux ans ! Ce n'est quand même pas seulement à cause de l'inflation. Les propriétaires connaissent le montant des aides accordées par la CAF, et ils ajustent les loyers en fonction, sans scrupules. L'idéal serait que la CAF fixe des barèmes pour les loyers en contrepartie d'un conventionnement. C'est probablement le cas partout en France, mais Grenoble est bien placée dans le palmarès des villes hors de prix. Ça devient aberrant. Quels problèmes le CRIJ rencontre avec les propriétaires ?Certains ne veulent louer qu'à des étudiants car ils savent qu'ils peuvent augmenter à loisir à chaque départ. Certains propriétaires nous appellent en disant “je ne comprend pas, je n'arrive pas à louer“. Parfois on ose leur dire que c'est peut-être le prix qui est trop élevé : “ah, mais c'est un immeuble de standing en centre-ville !“, mais on s’en moque de savoir si c'est du standing, ou alors qu'ils louent à des gens de standing et pas à des étudiants ! Mais il ne faut pas tout mettre sur le dos des propriétaires, il y a aussi des étudiants qui abusent, il ne faut pas se le cacher, qui rendent des appartements dégueulasses. Tout n'est pas noir cependant, certains propriétaires louent en plein centre-ville à des loyers raisonnables. Les apparts corrects et à prix abordables sont loués en deux jours. Trop souvent les gens oublient de se mettre à la place des étudiants : ils comparent avec leur vie il y a 20 ans mais les choses ont changé, le coût de la vie en général a augmenté. Les étudiants sont déjà exploités dans leurs emplois, certains arrêtent leurs études. Un étudiant est là pour étudier, plus le budget logement est important dans ses dépenses, plus il doit gagner sa vie, moins il étudie. On oublie sa fonction première, il devient un objet social. On devrait les chouchouter nos étudiants, et on ne les chouchoute pas, c'est ce qui m'horripile. C'est notre avenir et on les met dans des situations pas confortables, alors qu'ils ont encore le droit de profiter un peu non ? Au lieu de ça, ils doivent se démener pour trouver logement, boulot, et mener leurs études. Toutes les infos pratiques pour trouver un logement sont réunies dans un livret gratuit : Les clefs du logement, disponible au Centre Régional d'Information Jeunesse (CRIJ), 16 rue Agutte Sembat, Grenoble.04 76 86 56 00 / www.j-net.orgOuvert du lundi au jeudi de 9h à 18h non-stop et le vendredi de 9h à 12h30

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