«Écrire un texte fédérateur»

Les lieux dits “intermédiaires” ou “alternatifs” sont cruciaux. Cet entretien avec Loïc Cloez, coordinateur du projet ADAEP, nous permet de revenir sur la situation plus que précaire de la structure, mais aussi d’évoquer les 30 ans du lieu qui se fêtent en 30 heures. Propos recueillis par Séverine Delrieu

Actuellement, quelle est votre situation ?Loïc Cloez : Depuis le 8 mars, nous sommes en redressement judiciaire. Le tribunal a décidé de notre mise en observation. On est en protection judiciaire : c’est-à-dire que les dettes sont gelées avant la date du 8 mars. Pour cela on respire. Par contre, on doit assurer le courant. Pendant cette période d’un an, jusqu’en mars 2008, on doit préparer un plan de redressement : à savoir, comment on va s’y prendre pour éponger nos dettes passées. Qu’est-ce qui se passe pendant ce temps ? On doit essayer de faire en sorte de s’équilibrer, de trouver d’autres fonds pour l’avenir : c’est-à-dire faire un budget prévisionnel et un projet de financement sur X années. Pendant ce temps, on a un liquidateur judiciaire qui veille à ce qu’on ne prenne pas de retard à nouveau. Et puis, il contacte nos créanciers qui eux vont faire connaître leurs dettes : certains les feront connaître, d’autres vont y renoncer, on le sait. On va se retrouver autour de 170 000 euros de dettes annoncées à rembourser sur X années. Nous, là où on attend que cela avance, c’est principalement au niveau de la Ville, en tout cas, au niveau des collectivités. Quelles sont les dernières positions de la Ville ? On a une échéance impérative qui est le 2 juin, où l’on ne doit pas avoir pris de retard car on doit faire un point avec le juge. On demandera un report pour continuer le plan de redressement, et, avant mars 2008, on aura une audience avec le juge pour mettre un plan qui sera validé ; et il faudra payer, sinon, il y aura une liquidation directe. Du coup on manque de moyens financiers. Les discussions avec la Ville ont commencé à être un peu plus sérieuses suite à la campagne (de cartes postales de “sensibilisation” adressées aux élus ndlr). Ça avance, mais trop lentement. Je crois que ce n’est pas un dossier qu’ils prennent à bras le corps. Ce qu’on voit, c’est que cela traîne. Je comprends qu’ils soient débordés, mais je crois que quand on est élu à la Culture on doit se rendre disponible pour ce à quoi l’on a été élu. Avez-vous eu des rendez-vous en Mairie ? Le rendez-vous avec le Maire, toujours rien. Avec la DGA (directrice générale adjointe), cela se prépare, mais à chaque fois, les rendez-vous sont décalés. Pour moi, ce dont cela témoigne, c’est qu’il n’y en a pas un qui dit “ce projet, il faut le prendre à bras le corps et le défendre”. Leur implication est ténue par rapport à la situation et par rapport à ce que représente l’ADAEP. Il y a une chose que l’on souhaitait et que la Mairie a fait : c’est un audit. La gestion déléguée est venue : c’était génial car la personne était très disponible, elle avant envie de comprendre, de gratter, c’était quelqu’un de compétent qui a regardé comment cela se structurait au niveau financier, comment le trou avait été créé. Cette personne a fait des propositions qui ont été attestées : il n‘y avait pas de dépenses fastueuses, il y avait une optimisation forte des moyens. Maintenant, on espère pouvoir parler projet et développement. La seule issue, ce serait d’avoir un élu qui prenne le temps de nous écouter. Mais, malgré la campagne (de cartes postales ndlr), l’attention se relâche. Je crois donc qu’il faut qu’on se mobilise de plus en plus. Depuis le Festival de la Marionnette, de nouveaux bénévoles sont venus, il y a eu deux forums qui ont drainé du monde, il y a eu une AG avec des gens très mobilisés et je dois dire que c’est encourageant : on a des difficultés, on est en redressement, on a une dette, mais on a une structuration à laquelle les gens croient. On est sorti de cette image - que finalement les politiques véhiculaient et nous on rentrait dedans -, à savoir qu’on était un gouffre. Là, ça y est, c’est fini et cela draine un potentiel de gens énorme. Et pour faire perdurer cette mobilisation, on fait un appel à témoigner. Avec l’envoi de lettres ? Voilà. L’idée est que chacun envoie à la Mairie une lettre sur laquelle chaque personne peut écrire les raisons pour lesquelles l’ADAEP est un lieu essentiel pour lui. Qu’est-ce qui le touche là-dedans... En tant qu’organisateur, artiste, spectateur... Cela peut être l’ADAEP, ou les lieux de ce type-là. C’est une lettre totalement libre, un témoignage qualitatif, c’est une lettre non pré-formatée. Pour nous, cela va nous permettre d’évaluer l’impact, cela va nous éclairer, cela va nous surprendre d’apprendre ce que les gens ont à dire sur ces lieux alternatifs. On va essayer de mettre l’accent là-dessus, c’est important pour nous. En effet, pourquoi les élus ne réagissent-ils pas plus ? À la MC2, on croise X élus, ici, on n’en voit jamais. Le problème, ce n’est pas ce qu’on programme ici, c’est la composition socioculturelle du Conseil Municipal qui n’intègre pas des gens comme tout le monde qui viennent ici. C’est une autre sphère. Et la fête des 30 ans durant 30 heures ? L’idée est de rassembler sur un temps toutes les assos qui ont envie d’y participer, c’est un appel au volontariat, un peu comme pour la lettre, et on a eu des réponses. Ce sont des gens qui se sentent liés à l’ADAEP : soit parce qu’ils y passent, soit parce qu’ils y ont joué dans les premiers temps, comme les Barbarins. Des gens qui s’identifient à ce lieu. D’autres qui ont été bénévoles et qui prennent en charge des propositions, comme la confection du petit-dej à 7h du mat après la nuit de concerts par exemple. Tout le monde est bénévole avec l’idée de faire la fête ensemble. Il y aura un 3e forum car ce qui s’est dégagé des précédents forums, c’était de dire ce qui nous rassemblait. Tous. Au-delà du cas ADAEP. Le problème qu’on rencontre n’est pas que lié à cette structure, ce n’est pas un épiphénomène lié qu’à cet endroit-là, c’est un problème plus général de politique culturelle, d’aide au développement de la vie associative. On avait besoin de se définir qualitativement au-delà de l’ADAEP. Cela rejoint les débats qu’il y a pu y avoir à La Bifurk ou au Brise-Glace. On va arriver à un temps commun pour s’exprimer et tenter d’écrire un texte fédérateur. Les 30 ans de l’ADAEP les 26 et 27 mai

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