Pas de quartiers !

La Villeneuve, outre le tristement célèbre discours que lui a consacré l’ex-président en 2010, s’illustre grâce au festival Quartiers Libres. Pour sa 12e édition, les festivités gagnent de nouveau le centre-ville, la caserne de Bonne et Saint-Bruno. L’occasion de revenir sur l’histoire de la manifestation avec Ségolène Clément, administratrice de l’association Sasfé et coordinatrice du projet. Benjamin Bultel

Sasfé a germé « dans les têtes de trois anciens habitants du quartier de la Villeneuve, en 1998 », raconte Ségolène Clément, membre de l’association depuis 10 ans et coordinatrice du projet. Face à la « carence culturelle du quartier par rapport au centre-ville », ils décident de « valoriser ses richesses » – les lieux mais aussi les habitants – autour de deux axes : un festival d’arts de rue et de musique, Quartiers Libres, et surtout la mise en place d’ateliers de sensibilisation aux arts tout au long de l’année. Faire entrer les arts dans les quartiers, voilà l’objectif que se donnent les membres de Sasfé en 2000 pour la première édition de Quartiers Libres. Au programme : spectacles, concerts et rencontres « au pied des immeubles, dans les parcs ou au coin des rues ». En plein air donc. « Notre volonté est de ne pas enfermer les gens », précise la jeune femme. Jolie formule à double sens qui résume bien cette volonté de faire sortir les habitants et de les ouvrir à toutes les formes de culture. Deux ans plus tard, le festival tente ses premiers pas en-dehors du quartier qui l’a vu naître et s’étend à Saint-Bruno et à Mistral, avec un principe qui n’a pas changé depuis : « une journée, un quartier ». Mais toujours avec la Villeneuve en point d’orgue. « C’est une forme d’essaimage », explique Ségolène Clément, « avec toujours cette mixité, ce mélange des couches sociales ».

Un festival ouvert à tous

Ainsi, dès les débuts, les fondateurs de Sasfé ont voulu lier le festival à la vie du quartier. Un village associatif a été créé « pour que les associations actives dans le développement durable, la vie culturelle et artistique puissent se faire connaître ». Même idée avec les ateliers, montés en partenariat avec les écoles, les collèges et les centres sociaux. Chaque année, ce sont 400 à 500 personnes, en majorité des enfants ou des ados, qui participent aux groupes de création artistique, puis au festival avec la réalisation de décorations, de parades ou lors des premières parties de spectacle. Une volonté d’ouverture d’esprit qui se traduit aussi par l’instauration d’une programmation off en 2009. « Cela permet d’élargir les horizons avec des compagnies qui viennent d’un peu partout en France », se réjouit la coordinatrice. Pour elle, une bonne édition est avant tout « une édition où il ne pleut pas ». Mais le nombre de spectateurs est aussi important : « on ne fait pas tout ce boulot pour qu’il y ait trois pelés et un  tondu », admet-elle. Pas de souci à se faire, l’année dernière Quartiers Libres a revendiqué 1500 personnes à Saint-Bruno et plus de 5000 à la Villeneuve.

Mal-aimés arts de rue

Pourtant la création du festival n’a pas été de tout repos. En cause, l’absence de vraie reconnaissance des arts de rue par la mairie. « Chaque grande ville a son festival, sauf Grenoble », déplore-t-elle. « Les arts de rue sont galvaudés, ils restent marginaux. Ils apportent pourtant un contraste entre l’environnement urbain et leur représentation, mais aussi avec le théâtre ou la danse traditionnels grâce à la participation du public. » De fait, l’association n’a été conventionnée par la mairie qu’à partir de 2010. Mais les subventions n’ont pas évolué depuis, alors que les frais de fonctionnement augmentent. « L’essentiel de notre rentrée d’argent vient des subventions accordées par la région », indique la coordinatrice. L’édition 2011 a toutefois été inaugurée par plusieurs élus, entre autres Michel Destot et son adjoint à l’animation Alain Pilaud. Une forme de récupération politique ? Pour Ségolène Clément, il s’agit plus la rançon du succès : « À partir du moment où l’on accepte les subventions, on doit jouer le jeu de la représentation de la mairie. »

Quartiers libres, du mercredi 30 mai au samedi 2 juin, à Grenoble. Programmation en page 9.

 

Encadré: La prog

Quatre jours et quatre lieux, programmations in et off, compagnies en provenance de tous les coins de la France et artistes locaux, le planning de l’édition 2012 de Quartiers Libres est chargé. Le festival donne à voir le travail réalisé dans les ateliers artistiques mis en place par Sasfé. La BatukaVI, la batucada de la Villeneuve, présente ainsi un spectacle monté en partenariat avec les associations Hadra et Afric’Impact. Autant dire que le mélange de DJing, de VJing, de percussions brésiliennes et de ragga détonne. Mais la grosse attraction est le retour de la géante d’osier Nissa pour la parade dans les rues du centre-ville. Au programme aussi, le ciné-concert du groupe électro SZ sur le film Soy Cuba, entre airs mélancoliques et rythmes rock. Sans oublier les nombreux spectacles des compagnies de théâtre. Chargé on vous dit.

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