Fontaine de jouvence

Rentrée ciné / Après un début d’année calamiteux, la rentrée cinéma promet enfin de beaux moments : par-delà les générations, toutes très bien représentées, et les pays, les enjeux s’annoncent passionnants. Christophe Chabert

Cela arrive environ une fois tous les trois ans : les cinéastes les plus vénérés en activité sortent à quelques semaines d’intervalle leurs nouveaux films. À ce degré, c’est bien sûr le grand Clint qui fait l’événement cette année, puisque ce n’est pas un, mais deux films signés Eastwood qui débarquent sur les écrans. En fait, on devrait plutôt parler de double film : d’abord, l’adaptation d’un best-seller sur le conflit Etats-Unis-Japon pendant la deuxième guerre mondiale, Flags of our fathers (25 octobre) ; mais, et c’est là que le projet est grand, Eastwood a voulu tourner un contrechamp à l’Histoire officielle et patriotique, du point de vue japonais cette fois, avec des acteurs nippons et dans cette langue qu’il ne parle pas. Et voici Red sun, black sand (en décembre), ou comment celui qu’on taxait de fasciste il y a trente ans en remontre à tous les cinéastes progressifs. Notamment Oliver Stone qui avait voulu faire la même chose avec le Vietnam dans Entre ciel et terre, grosse daubasse comme il est capable d’en tourner de temps en temps. L’ami Stone a mis les mains dans le cambouis idéologique en cette rentrée avec sa fiction héroïque sur le 11 septembre, World trade center. La bande-annonce nous apprend une chose essentielle : si tu veux être flic à New York, t’as intérêt à porter la moustache ! Pourvu que le film nous en raconte d’autres comme ça…Derniers feuxAprès Eastwood, quelques maîtres feront l’actualité d’ici fin 2006 : d’abord Robert Altman, dont les fortunes diverses depuis… Cookie’s fortune, n’ont pas éclipsé la redécouverte émerveillée de son œuvre des 70’s. Altman réalise un nouveau film choral, dont on souhaite que le titre, The Last Show, ne soit pas prémonitoire (6 décembre). Match Point confirmait le retour au premier plan d’un immense cinéaste, Woody Allen. Avec Scoop, tourné au même endroit (Londres) avec la même actrice (Scarlett Johansson), on espère qu’il réalisera un magnifique doublé (1er novembre). Ladite Scarlett sera au cœur d’un des défis de 2006 : un film sur l’assassinat dans les années 50 d’une starlette ratée, Elizabeth Short, dont le meurtre jamais élucidé fascina l’Amérique et donna lieu à un chef-d’œuvre littéraire, Le Dahlia Noir de James Ellroy. C’est Brian De Palma qui s’y colle pour cette adaptation longtemps réputée impossible (8 novembre). Enfin, dernier dinosaure américain à faire l’événement en 2006 : Martin Scorsese, qui ne quitte plus son Leonardo depuis qu’ils ont galéré ensemble sur Gangs of New-York — à quand le mariage ? Cette fois, il l’entraîne dans le remake de l’excellent polar de Hong-Kong Infernal Affairs, rebaptisé The Departed (29 novembre).Jeunes poussesCe spectaculaire bataillon de vétérans côtoie une horde sauvage de nouveaux cinéastes prometteurs se lançant dans des projets hautement personnels. Changement de braquet pour Darren Aronofsky qui, après Requiem for a dream, réalise une ambitieuse fresque entre histoire et science-fiction, The Fountain (8 novembre), dont les premières images laissent d’ores et déjà muet d’admiration. L’éclectique esthète Christopher Nolan délaisse les névroses de Batman, mais pas son interprète Christian Bale, qu’il dirige à nouveau dans The Prestige (15 novembre), narrant l’affrontement entre deux magiciens rivaux dans le Londres du XIXe siècle. Guillermo Del Toro a à son actif une filmo dispersée (Mexique, Espagne, Etats-Unis) mais cohérente, qui a fait de lui un maître du cinéma fantastique. Pour son sixième film, Le Labyrinthe de Pan (1er novembre), il mélange conte de fées, film de monstres et réflexion historique sur les atrocités franquistes, et a obtenu (enfin !) une juste adhésion critique et publique au dernier festival de Cannes. C’est là-bas aussi que le Mexicain Alejandro Gonzalez Iñarritu (Amours chiennes, 21 grammes) a trouvé la consécration avec les histoires croisées de Babel (15 novembre) ou comment l’effet papillon déploie ses conséquences tragiques par-delà les continents et les enjeux géopolitiques. Cannes fut moins clément envers le jeune Richard Kelly : attendus au tournant après Donnie Darko, ses Southland tales (20 décembre) se sont fait égorger par une grande partie des festivaliers. La rumeur dit que le cinéaste, blessé par cet accueil désastreux, rebidouillerait le montage, pour en réduire la durée fleuve (2h40) à peau de chagrin. C’est aussi ça, l’effet Cannes ! Dernier nom à retenir chez les nouveaux cinéastes, celui de l’Anglais Christopher Smith. Creep, son premier film, fidèle à son titre, filait vraiment les miquettes ; Severance (18 octobre), son nouveau bébé, s’annonce généreux en hémoglobine. Tant mieux !OVNIS à l’horizonSi Taxidermia a pris une option pour le titre de meilleur film bizarre de l’année, il y a concurrence en cette rentrée, notamment avec le retour des frères Quay, énigmatiques cinéastes qui cherchent à réconcilier cinéma narratif, cinéma expérimental et cinéma d’animation. Leur nouveau film s’appelle L’Accordeur de tremblement de terre (20 septembre) : doit-on en dire plus ? D’habitude, en France, quand un comique télévisuel veut faire du cinéma, c’est soit moyen, soit hyper nul. Mais quand il s’agit de deux agitateurs grolandais (Gustave de Kervern et Benoît Délépine), cela donne Aaltra, grand film, et maintenant Avida (13 septembre), qui enfonce le clou d’un désir de cinéma hors normes. Culte ! L’étiquette est déjà posée sur un premier film américain, Hard candy, où une toute mignonne post-ado rencontre sur Internet un cadre propre sur lui. Ils boivent un coup en live, il l’emmène chez lui et… il ne se passe pas du tout ce que vous croyez ! Vraiment pervers ou seulement roublard ? À vérifier le 27 septembre…Pour finir au rayon perversions en tout genre, notre ami François Cau nous certifie sur la tête de sa mère que Princesse (4 octobre), manga danois ultraviolent dans les milieux du X, vaut largement le buzz qui l’entoure. On te croit François, mais laisse ta maman en dehors de tout ça, s’il te plait…

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