70 millimètres

Retour / Pour remonter le niveau d’un été cinéma 2006 décevant, rien de tel que de le mettre en perspective avec ce qui se passait trente ans avant sur les écrans… Christophe Chabert

L’événement cinéma de l’été ne fut pas un film mais un livre : l’imposant Cinéma américain des années 70 écrit par Jean-Baptiste Thoret. Dévorer la bête, puis se plonger tout entier dans les films commentés par l’auteur, voilà une expérience qui laissait loin toute tentation de régression estivale ! Au point de ne plus voir le cinéma qu’à travers le prisme de cet âge d’or foisonnant ; or, les sorties de l’été se prêtaient assez bien à ce dialogue-là. Le Superman superfoireux de Bryan Synger aimerait ainsi retrouver dans un même mouvement un certain souffle politique tout en prolongeant le film original de Richard Donner. Le problème, c’est qu’on cherche 150 minutes durant le mouvement. Maintenant que la franchise est lancée, on pensait que Pirates des Caraïbes sortirait les pieds de la vase et prendrait des risques. À peine ! Passée une ouverture feuilletonnesque confuse mais excitante, ce 2e volet applique studieusement sa recette spectaculaire éprouvée. Ces deux trilogies annoncées rappellent que le modèle Star Wars, détonateur du déclin américain à la fin des années 70, reste 30 ans après l’idéal sclérosé des studios hollywoodiens.Le feeling 70’sBien plus intéressant, Miami Vice de Michael Mann prolonge les expériences précédentes du cinéaste, Collateral surtout, en affirmant son désir de privilégier la mise en scène sur l’écriture et les personnages, ici particulièrement stéréotypés. Résultat : un film désarticulé, bancal, mais souvent inspiré, que ce soit dans ses incroyables scènes d’action, ses expérimentations narratives ou sa manière de capter le climat des scènes plus que leur sens intrinsèque - Scorsese ne faisait pas autre chose dans Mean Streets en 73 ! Mais ce sont deux indépendants qui retrouvaient le mieux cet esprit des 70’s : d’abord, The Devil’s rejects, un film qui donne envie d’ouvrir un drive in pour le projeter en boucle. Rob Zombie ne cache pas ses références à la période, mais les traite avec un mélange de respect et d’ironie, entre tripaille pour de rire et agressions franchement dérangeantes. Dommage que, dans cette opposition entre une famille de psychopathes dégénérés et sadiques et un flic texan dégénéré et sadique, il oublie parfois les victimes, trop normales pour un film aussi mal élevé. Enfin, un mot sur le plus beau film de l’été : le touchant Les Berkman se séparent de Noah Baumbach qui, bien que situé dans les années 80, rappelle autant Cassavetes ou les premiers De Palma que La Famille Tenenbaum (dont Baumbach fut le coscénariste). De l’écriture à la direction d’acteurs, cette chronique pudique d’un divorce ordinaire ne prône qu’une seule valeur, celle de l’intelligence. Des gens intelligents, joués par des comédiens intelligents et filmés par un cinéaste intelligent : Les Berkman se séparent respecte autant ses personnages que le spectateur, à hauteur d’homme, les yeux dans les yeux. Comme il y a 30 ans…

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