Recettes de saison

Alors que les nouvelles programmations de théâtre se dévoilent, un bilan s'imposait : d'un côté un constat encourageant concernant la fréquentation et la meilleure lisibilité du paysage des scènes théâtrales, de l'autre des lieux fragiles, des tatônnements qui questionnent. Séverine Delrieu

Si la réouverture de la MC2 suscitait des inquiètudes légitimes en terme de fréquentation dans les autres salles de l'agglo, les différents directeurs de salles proposant du théâtre sont aujourd'hui rassurés. Mais avant de se pencher sur celles-ci, commençons par le monument MC2, qui fit grand peur. Michel Orier parle d'une «saison de rêve» et «d'un merveilleux livre de souvenirs pour ceux qui l'ont suivie». En théâtre, 75% de "remplissage". Succès. Le Roi Lear a draîné entre 7 et 8000 spectateurs. «Pour donner une idée c'est ce que fera si tout va bien Elton John au Palais des Sports. On dit toujours que le théâtre est un art minoritaire mais c'est faux. Face à des puissances autrement plus puissantes, la télé, on est arrivé à faire un petit peu mieux que de resister». Et comme chacun s'est ingénié à trouver sa spécificité dans ce paysage théâtral, ces forces de "résistance" ont trouvé leur public. À La Rampe d'Echirolles, «le plateau et le rapport scène salle se prêtent mieux à la danse et à la musique», rappelle la Directrice Eliane Baracetti. Par ailleurs, elle reste «très attachée aux Arts de la rue», formes théâtrales dans lesquelles «les artistes ont une capacité formidable à interroger l'espace public». Mis en place en 2002, cet axe a fidélisé le public. «Avec une jauge étroite de 350 pour la Cie Kumulus, nous avons eu 288 personnes». Et comme le spectateur circule beaucoup d'un lieu à l'autre dans cette petite agglomération grenobloise, «il vaut mieux se compléter que se cannibaliser» ajoute-t-elle. À quelques kilomètres de là, l'Hexagone de Meylan, scène nationale depuis 90. Son directeur Antoine Conjard se félicite de l'augmentation des abonnements et du nombre de spectateurs. «On craignait une baisse, et même on se demandait si c'était la peine qu'il y ait un théâtre comme le nôtre à Meylan, c'est l'inverse qui s’est produit». Pourtant même s'il y a des zones de "chevauchements" avec d'autres scènes, «nos identités se sont clarifiées, et le public perçoit nos singularités». Pourtant entre le théâtre contemporain, du théâtre pour la famille, et Les Rencontres I, le pari n'était pas gagné. Mais le public a vite saisi la qualité des propositions. Mais tout n'est pas si roseÀ l'Heure Bleue de Saint-Martin d'Hères où la fréquentation et les abonnements croîent raisonnablement, Jacky Castang, directeur du spectacle vivant, - qui malheureusement à trop se heurter à des problèmes structurels n’a pas souhaité continuer (voir encadré), a mis en place le Mois de la Création Belge, qui en trois ans a forgé l'identité du lieu. À l'Amphithéâtre de Pont de Claix à la programmation théâtrale exigeante, la fréquentation stagne. Mais c'est surtout la situation financière précaire qui complique l'existence du projet : «chaque année c'est une nouvelle bataille pour continuer», explique Marianne Tournon, Secrétaire Générale. Pour les équipements dits de "proximités" de la municipalité grenobloise, le manque de moyens handicape les équipes. Même si une bonne nouvelle illumine l'Espace 600 qui s'est vu devenir Scène Régionale Conventionnée pour la Jeunesse. «Cette reconnaissance de notre travail va nous apporter plus de moyens», se réjouit Geneviève Lefaure, la Directrice. Le taux de fréquentation, de 86% témoigne d'une belle saison avec deux temps forts, 20 000 lieux sous l'ailleurs et Lettres d'Amour de 0 à 10. Dans la programmation du Théâtre Ste-Marie-d'en-bas on compte cinq spectacles de théâtre portés par des compagnies locales. Mais pour le théâtre de Diden Berramdane, le temps n'est pas encore au bilan puisque la saison n'est pas encore achevée : On dirait le Sud débutera prochainement. Le Théâtre Prémol rattaché à la MJC du même nom, se dédie à la pratique du théâtre amateur. Son responsable Benoît Caponi est plutôt satisfait en terme de fréquentation et le projet a vraiment décollé au bout de deux ans, même si des besoins financiers demeurent «pour accueillir dans de meilleures conditions les équipes». Au Théâtre 145, avec 3 créations d'équipes locales accueillies par Les Barbarins Fourchus sans compter les Rencontres du Jeune Théâtre Européen qui auront lieu en juillet, la fréquentation tourne autour de 1900 personnes pour le théâtre. Mais là aussi les difficultés persistent : «dans ce lieu on crée du lien entre les êtres humains. Mais même un projet à taille humaine a besoin de moyens. On voudrait un jour avoir la reconnaissance pour passer du CP au CM1», ironise Delfino. cuisines et dépendancesOui mais du côté de la Mairie, Jérôme Safar, adjoint à la Culture «conscient de ces difficultés» et garant de «l'autonomie de ces équipes», reconnait que la municipalité «fait un gros effort sur les grosses institutions, et là-dessus», ajoute-t-il, «je n'ai pas d'états d'âmes»... Et pour les autres équipes ? «Il faut leur assurer le minimum "vital"». Mais, si ce minimum n'est pas suffisant ? «Je crois qu'il va falloir qu'on voit dans les années à venir comment on va au-delà de la subvention publique. Cela ne me choque pas si demain un théâtre vient me voir en me disant qu'il a un mécène. Les finances ne sont pas extensibles». Reste à savoir si les équipes l'entendent de la même oreille. D'ailleurs, si tel est le cas (que «les finances ne sont pas extensibles»), il va falloir régler le problème majeur de la fréquentation au Théâtre Municipal. Inconvénient expliqué par «un loupé monumental en communication» que l'élu assume, et le fait que «sans doute par la remunicipalisation de l'équipement, on a emmené Evelyne Serive (la nouvelle directrice) à se consacrer sur l'organisation de la maison, et qu'elle n'a pas eu le temps de consacrer son temps en direction du public». Mais sur la programmation, Jérome Safar s'estime «satisfait», alors qu'on pourrait s'interroger sur le caractère pour le moins hétéroclite de la ligne éditoriale rivalisant avec d'autres. «La question est de savoir si on reste sur un côté très ouvert ou si on repart sur une ligne éditoriale de type théâtre privé à la parisienne. Je pense qu'on saura dès décembre où va la tendance». Enfin, reconnaissons que pour une première saison et compte-tenu du contexte, le Théâtre de Création a honorablement rempli ses missions et respecté le cahier des charges "défini" par la Mairie. Municipalité qui a décidé de ne pas renouvelé le contrat à Christian Verdier, le directeur artistique (voir encadré). Administrativement, le Théâtre de Création est rattaché depuis janvier à la Direction des Affaires Culturelles. Michel Roussel, le nouveau directeur de la DAC nous rappelle la vocation du projet : «le Théâtre de Création doit être complémentaire des autres équipements de la ville. Il est résolument ancré dans la politique municipale sous l'autorité de la DAC et sa volonté est l'aide à la création». Puisque c'est la municipalité qui décide, quelle sera la programmation future ?. «Pour l'instant nous avons validé 4 projets. Mais nous souhaitons laisser de grands trous pour pouvoir être réactif si un projet innovant se présente. Je vois le Théâtre de Création comme un espèce d'oasis où on prend le temps de respirer». De là à dire que les directeurs sont dans le désert...Retrouvez les nouvelles programmations des salles dans notre numéro spécial Rentrée Culturelle du 13 septembre

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