Des films et des hommes

Festival / Pour leur 9e édition, les Rencontres Ethnologie et Cinéma ne déméritent pas, et affichent cette année encore une sélection de haute volée. Damien Grimbert

Mais, en premier lieu, de quel type de films parle-t-on précisément ? Dans son acceptation la plus stricte, le film ethnographique constitue une prise d’image brute, permettant d’observer de façon neutre une ethnie ou un groupe social, sans aucune analyse, prise de recul, commentaire en voix-off, ou mise en scène. Il ne s’agit donc ni d’un reportage, ni d’un documentaire, mais d’une simple collecte d’informations à l’aide d’une caméra. Vous l’aurez compris, le film ethnographique “pur” est un idéal rarement concrétisé, et tout l’intérêt de ses Rencontres est de s’intéresser à ce qui constitue justement ses frontières, des films proches de cet idéal mais ne l’atteignant jamais, permettant ainsi une saine et perpétuelle remise en cause de sa définition initiale. Une interrogation que l’on retrouve au travers des cinq thématiques qui subdivisent la programmation (chargée) de cette 9e édition. Après deux sélections consacrées respectivement aux pionnières de l’ethnologie (Germaine Tillon en tête) et aux films issus des participants de la revue Le Minotaure (creuset des artistes imprégnés par le surréalisme de 1930 à 1939), concentrées en début de semaine, place aux thèmes Façons de Naître, Les îles et Rapports de Pouvoir…Soldats russes, développement durable, et révolte papoueSi le premier d’entre-eux se focalise sur un champ bien précis (les problématiques et préoccupations liées à la naissance en France des années 1920 à 2000), les deux autres réunissent au contraire des métrages on ne peut plus hétéroclites. Ainsi, ils rassemblent aussi bien le documentaire très attendu Moken, l’aventure birmane d’un ethnologue, que la fiction indépendante japonaise L’Île nue, de Kaneto Shindo, en passant par l’enthousiasmant Ostrov, hallucinant portrait d’une quinzaine de soldats soviétiques et de leurs chiens, gardant la frontière invisible constituée par une île glaciale et complètement déserte, battue par les vagues et les vents, à mi-chemin de l’Alaska et de la Sibérie. Entrecoupé d’images d’archives de la population autochtone chasseuse de phoques, qui habitait l’île quelques 50 années plutôt, ce film d’à peine 30 minutes réussit à se faire poignant, sans jamais flirter avec le moindre voyeurisme. Mais l’un des temps forts des Rencontres sera sûrement constitué par la thématique Rapports de pouvoir, avec entre-autres l’excellent Nioro du Sahel, une ville sous tension, chronique touchante mais implacable des difficultés concrètes provoquées par les tentatives d’application des “formidables théories” du développement durable, à travers l’exemple de bénévoles d’EDF tentant de rendre l’électricité accessible au plus grand nombre dans une ville malienne ; ou encore l’assez intriguant Lever de drapeau chez les Papous filmé par un otage, dont les images simplissimes de Papous sautillant, s’agitant et criant, contrastent violemment avec les complexes sous-entendus engendrés par les conditions de tournage du film.9e Rencontres Ethnologie et Cinémajusqu’au samedi 16 avril, lieux divers (voir pages agenda)

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