La métamorphose

Live / Attention document ! The Other Side of The Mirror... décrit, l'espace de trois éditions du Newport Festival (1963-1965), grand messe folk de l'époque, l'ascension d'un Bob Dylan passant successivement du statut de jeune espoir (1963) à celui d'idole (1964) puis de Judas renié par ses ouailles (1965) à l'occasion du célébrissime tournant de sa carrière : son fameux passage à l'électricité. Le tout livré brut, sans voix-off ni analyse, entre moments pénibles montés à la va-comme-je-te-pousse (coulisses, duos avec Joan Baez et sa voix de cafetière) et instants de grâce : comme quand, en 1965, sur Love Minus Zero, les feuillages des arbres éventés derrière lui se confondent avec la tignasse rimbaldienne de celui qui a, comme le dit un speaker, «le doigt sur le pouls de sa génération». Mais quand, en 1965, il appuie sur la veine pour que «la génération» sente son cœur battre, quand il métamorphose les complaintes des ancêtres en grondement sonique, c'est comme si son doigt pressait une détente. D'abord avec cette version hirsute d'une Maggie's Farm besognée par la sorcière électricité en un boogie furibard chargé de dépoussiérer tout ce qui peut l'être. Les paroles crachées en rafale à un public défait sont alors une déclaration d'indépendance au nez du mouvement folk (cette «ferme de Maggie» où il ne peut «être lui-même»). Conspué par de gentils folkeux montrant enfin les dents, il enchaîne avec Like a Rolling Stone, alors inédit, qui enfonce le clou dans la tempe d'une Amérique à qui il demande d'ouvrir les yeux. Puis avec une version nue et bouleversante de It's All Over Now, Baby Blue qui n'est rien d'autre qu'un chant du cygne acoustique, dernier soubresaut d'une métamorphose. Car pour beaucoup, après Newport 65, instant électrique et infernal, Dylan ne sera plus jamais le même. Ce que peu savent alors, et démontre I'm not There, c'est qu'il ne l'avait jamais été.Stéphane Duchêne«Bob Dylan The Other Side of the Mirror : Live at The Newport Folk Festival (1963-1965)» (Sony/BMG)

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Mardi 17 octobre 2023 L'édito du Petit Bulletin n°1221 du 18 octobre 2023.
Mercredi 6 septembre 2023 C’est littéralement un boulevard qui s’offre au cinéma hexagonal en cette rentrée. Stimulé par un été idyllique dans les salles, renforcé par les très bons débuts de la Palme d’Or "Anatomie d’une chute" et sans doute favorisé par la grève affectant...
Lundi 24 avril 2023 Le secteur culturel grenoblois s’empare, depuis peu mais à bras-le-corps, du sujet épineux de la transition écologique. Mobilité des publics, avion ou pas avion pour les tournées des artistes, viande ou pas viande au catering, bières locales ou pas...
Lundi 13 février 2023 Dans la catégorie humoriste nonchalant, on demande le pas encore trentenaire Paul Mirabel, drôle de Zèbre (c’est le nom de son spectacle) qui cartonne depuis (...)
Lundi 16 janvier 2023 Trois soirées électro à Grenoble pour faire bouger tes nuits : Ed Isar le 24 janvier à la Bobine, Umwelt le 27 janvier à l'Ampérage et une Semantica Records night le 28 janvier à la Belle Électrique.

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X