Troupe d'élite

Ours d’Or controversé du festival de Berlin, le film de José Padilha décrit avec une rage visuelle équivoque les méthodes des forces spéciales brésiliennes. François Cau

En amont de la visite du Pape à Rio de Janeiro, les forces d’intervention spéciales du BOPE sont chargées de sécuriser les zones à risque ; au beau milieu du chaos de violence engendré par la situation, le capitaine Nascimento doit trouver et former son successeur. Venu du documentaire, José Padilha applique ses recettes choc à la mise en scène de ce film mâtiné d’ambiguïté sulfureuse : tourné dans des conditions de guérilla urbaine, Troupe d’élite plonge son spectateur dans la violence et la corruption généralisée de la société brésilienne. Les manquements de la hiérarchie policière font échos à la brutalité choquante des barons de la drogue des favelas, le tout dans une urgence cinématographique garantissant à la réalisation une efficacité ravageuse. Au cœur de ce marasme social étouffant, Padilha se focalise sur le quotidien des hommes du BOPE, en particulier sur la figure moralement douteuse du capitaine Nascimento, tout entier voué à redéfinir le triste paradigme selon lequel la fin justifierait les moyens. Ma cité a crack-é
Si le réalisateur se garde bien, dans ses interviews, de toute glorification des méthodes du BOPE (grand bien lui en prend, l’officier ayant servi de source d’inspiration au personnage de Nascimento est aujourd’hui sous le coup d’une accusation de corruption… pour avoir vendu des armes aux caïds des favelas !), le film semble malheureusement clamer le contraire via ses partis pris esthétiques, via sa montée en tension crescendo tendant à avaliser la radicalité de ses protagonistes. Le trouble explose carrément lors d’une scène de confrontation entre un futur agent du BOPE et des étudiants contestant les brutalités policières, ces derniers se voyant in fine accusés d’entretenir le trafic… On ne peut s’empêcher d’avoir un arrière-goût assez nauséabond en sortant de la projection, tant Troupe d’élite pourrait servir d’étendard aux amateurs de justice expéditive s’il était interprété au pied de la lettre. Sous couvert d’une objectivité de façade, trahie en de maintes reprises par son irrépressible soif de mise en scène percutante, José Padilha prend le risque déraisonné de retranscrire tels quels les propos très limites de ses protagonistes, de ne voiler aucune de leurs exactions pour laisser le soin au spectateur d’en tirer ses propres conclusions. Un parti pris plutôt “étrange“ quand on connaît l’engouement pour les politiques sécuritaires à travers le globe…Troupe d’élite
De José Padilha (Brésil, 1h55) avec Wagner Moura, Caio Junqueira…

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