Pour la beauté du geste

Russell Maliphant, maître anglais de la danse contemporaine, présente avec sa compagnie trois pièces de son cru. L’occasion de nous pencher avec lui sur sa recherche d’un esthétisme original. Aurélien Martinez

De l’autre côté de la manche, au pays du pudding, des fish and chips et de la reine mère, vit un homme qui a fait de la grâce sa raison de créer. Présenté par les spécialistes du genre comme le Schubert de la danse moderne, Russell Maliphant est l’un des chorégraphes les plus appréciés de la scène européenne contemporaine. Bonne nouvelle, trois de ses créations (Flux, Push et Small Boats) seront présentées mardi soir à la Rampe. Trois créations qui illustrent parfaitement cette ambition d’une expression chorégraphique originale chère à Maliphant depuis ses débuts. De sa formation classique au London Royal Ballet entamée à seize ans, il apprend ainsi la technique et son intrinsèque nécessité d’exigence. Mais la forme classique contraint rapidement son imagination. « En quittant le London Royal Ballet, j’étais à la recherche d’un environnement esthétiquement très différent, d’un processus de travail qui ne soit pas le même. Je voulais simplement me baser sur ce que je voyais et aimais. » Il part donc collaborer avec les anti-conformistes britanniques (Michael Clark, Laurie Boothe, Rosemary Butcher, le directeur de DV8 Physical Theatre Lloyd Newson …), plus en accord avec sa conception de la danse. « C’est davantage une suite logique qu’une rupture. » Ses multiples expériences artistiques en tant que danseur ou chorégraphe le conduisent tout naturellement à créer sa propre compagnie en 1996 (la Russell Maliphant Company), avec laquelle il se produit aux quatre coins du globe. Son but ? « Explorer un large éventail de techniques, allant du ballet classique à l’improvisation, en passant par le yoga, la capoeira et le tai-chi. »Up and down
Le style Maliphant, éminemment reconnaissable, évolue au fil du temps. Au cours de sa carrière, il développe un style propre, basé sur l’auto-retenue et la maîtrise du corps dans l’espace. Deux aspects qu’il retrouve dans les arts martiaux qui irriguent son travail (le solo Flux en est un parfait exemple). « J’utilise différentes techniques, pour établir un lien entre le rapport au sol, la gravité, et la liberté du corps ; le fait que les mouvements aillent dans les deux directions, entre le haut et le bas, le sol et l’espace… Et je retrouve pleinement cette idée dans les arts martiaux. » D’une extrême fluidité, ses créations ne se placent pas tant dans le côté purement technique que dans l’exploration d’une certaine harmonie visuelle. Harmonie qui s’illustre parfaitement par le travail réalisé depuis quatorze ans avec le « designer lumières » Michael Hulls. Ensemble, ils essaient de modifier la perception du mouvement à l’aide de la lumière qui devient plus qu’un simple accessoire scénographique. « Sur le plateau, tout est évidemment essentiel, mais le travail sur la lumière imprime une forme, un esthétisme. Si vous faîtes un geste lentement, qui descend, et que la lumière devient de plus en plus forte, vous avez une juxtaposition entre le mouvement et cette lumière, la première sculptant magnifiquement le geste du danseur. »Maliphant x 3
En 2003, Maliphant croise la route de la ballerine rebelle Sylvie Guillem avec Broken Fall. Push est néanmoins la première pièce interprétée conjointement par les deux artistes. Créée en 2005 au Saddler's Wells de Londres, elle a notamment été jouée fin 2006 à l’Opéra de Lyon. Mais pour sa présentation à La Rampe, ni Maliphant ni Guillem ne seront sur scène. Les interprètes de la Russell Maliphant Company prennent le relais pour ce duo savamment construit autour du corps et de son expression, qui devient une lente et sensuelle connexion. Une danse athlétique et minimaliste que l’on retrouve dans le solo Flux, dansé à l’origine par Maliphant lui-même, et dans la pièce Small Boats, créée avec l’artiste vidéaste Isaac Julien. Trois facettes du style Maliphant et trois moments d’une grâce intense.Flux / Small boats / Push
Mardi 25 novembre à 20h, à la Rampe (Echirolles)

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